Rapport d’activités 2017-2018

Mot du coordonnateur

La méthode des « carrefours de savoir » élaborée au CAPMO correspond à la théorie conceptuelle d’« écologie des savoirs » définie par Boaventura de Sousa Santos comme méthode d’interprétation et de transformation du monde réalisée à partir de la pluralité des expériences humaines issues de différentes cultures. Contrairement à la pensée occidentale, connue pour son caractère hégémonique et ses prétentions universelles, l’écologie des savoirs se présente comme un « pluriversalisme » où peut s’exprimer chaque sujet en quête des meilleures solutions possibles aux problèmes réels. À la fois ouverture à la différence et source d’inspiration et d’innovation, elle se veut une méthode inclusive qui, à l’opposé de tout rapport de domination ou de hiérarchisation exclusive, s’inscrit dans un partage des différents savoirs sur le chemin d’une coéducation. Elle est fondée sur le vivre-ensemble dans le respect de l’environnement et des personnes issues de différentes cultures, avec une priorité aux exclus du système. Dépassant le dualisme discriminatoire, l’écologie des savoirs apparaît comme une récapitulation de la pluralité des expériences du passé confrontées aux problèmes actuels, de façon à inspirer les chemins inédits de l’avenir à une échelle humaine.

Notre mission embrasse de nombreux horizons et nous devons sans cesse nous recentrer sur notre spécificité, sans toutefois renoncer, dans la mesure de nos capacités, aux élans de solidarité. Depuis janvier 2018, avec le soutien de la Fondation Béati, nous menons un carrefour de savoir sur l’interculturalité et l’engagement social. Cette expérience collective fondée sur la rencontre et la découverte de l’autre est aussi une démarche qui permet d’explorer l’histoire afin de dissiper certains stéréotypes entourant la question identitaire. Avec en tête les préceptes de Paulo Freire, qui plaide en faveur de l’autonomie du sujet conscient de lui-même, de son potentiel créateur et de sa mémoire collective, nous explorons différentes avenues de ce passé oublié. Dans cette permanente remise en question de notre devenir collectif, j’aimerais, pour finir, rappeler l’exemple de la lutte des femmes au Québec. Au départ, cette lutte émancipatrice n’était pas évidente car les hommes ne reconnaissaient pas l’oppression qu’ils exerçaient à l’égard des femmes. « Il n’y a de pire aveugle que celui qui ne veut voir », n’est-ce pas? Nous les Québécois, issus d’une société pauvre et opprimée, ne serions-nous pas devenus le reflet du maître qui nous observe, imitateurs de l’oppresseur auquel Hollywood nous commande de nous identifier, oubliant la solidarité nécessaire avec les opprimés de la Terre?

Yves Carrier

 

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