Journée internationale pour l’élimination de la pauvreté, 17 octobre 2023
Panel organisé par le Collectif de lutte et d’action contre la pauvreté de la Capitale Nationale (CLAP03)
Bienvenue à cette table ronde sur la pauvreté et l’exclusion sociale organisé par le Collectif de lutte et d’action contre la pauvreté de la région de Québec, CLAP-03. Votre animatrice est Marie-Noëlle Béland (MNB), directrice d’Engrenage St-Roch.
Bonjour, je suis contente de vous voir aussi nombreux et nombreuses ce matin. Des activités comme celle-ci ont lieu dans une douzaine de villes au Québec et ailleurs dans le monde. On sait que cela va bouger partout aujourd’hui dans le cadre de la Journée internationale pour l’élimination de la pauvreté. Une journée pour nous rappeler que la pauvreté est un choix de société car nous produisons de la pauvreté. Aujourd’hui, on va le dire et on va nourrir la solidarité entre les gens et se donner encore plus de force pour la suite des choses. Je vois plein de gens ici qui luttent depuis 5, 10, 15, 20 ans, et je veux saluer votre détermination. Cela me fait penser au poème de Bertolt Brecht qui se termine : « Ceux et celles qui luttent toute leur vie sont irremplaçables. »
Nous commençons par un panel pour réfléchir ensemble. Je souligne que ce panel est entièrement composé de femmes. C’est un hasard, mais cela compense pour toutes les fois où les femmes auront été absentes du débat. Je vous les présente : Marie-Hélène Deshais, professeure adjointe à l’École de travail social et de criminologie de l’Université Laval. Elle s’intéresse aux enjeux d’inégalité et de pauvreté; Marie-Hélène Vallée, coordonnatrice du Comité Maison de chambres, un organisme qui travaille à l’amélioration des conditions dans les maisons de chambres de Québec; de l’ADDS-QM nous avons Monique Toutant, une militante infatigable qui est là depuis tellement longtemps.
Merci pour ton courage et ton espoir Monique ! Et Danielle Lambert, salariée à l’ADDS-QM. Avec nous, nous avons également Chantale Simoneau, directrice du Projet LUNE, un groupe d’appartenance, de reconnaissance et de défense de droit des travailleuses du sexe, un groupe par et pour les travailleuses du sexe qui agissent à titre de paires aidantes qu’elles soient actives ou non. Aussi, du Projet Lune, Johanne Gagnon qui est impliquée dans différents réseaux de lutte à la pauvreté dont le Collectif pour un Québec sans pauvreté et au Comité Maison de chambres. Alors, quelle est la situation actuelle de la pauvreté à Québec ? Qu’est-ce que cela veut dire vivre en situation de pauvreté au Québec en 2023 ? Marie-Hélène Deshais, je t’inviterais à te lancer. MNB
Je suis très contente d’être ici. Vous êtes une super belle gagne, c’est le fun de vous voir tout le monde ensemble. Habituellement, je parle de vous aux étudiants en travail social et en organisation communautaire, mais je ne parle pas devant vous. C’est la raison pour laquelle je me sens un peu intimidée parce que je considère que c’est vous les experts de la lutte à la pauvreté parce que vous militez, vous vous impliquez et vous la vivez la pauvreté. Ce que j’ai choisi de faire, c’est d’essayer de vous présenter un ensemble de visages, de réalités différentes par rapport à la pauvreté. Je vais faire un tour rapide qui ne sera pas complet, mais ce sera ma contribution.
On peut être en situation de pauvreté de façon individuelle parce qu’on est sur l’aide sociale et que les prestations sont insuffisantes, parce qu’on est victime au quotidien de préjugés, mais aussi parce que le système d’aide sociale est porteur de violence dans ses règles et leur application. Cela a notamment été documenté par Rose du Nord ces dernières années, des violences que des personnes ont déjà vécues dans leur milieu, ou pour les femmes, des violences sexistes dont elles ont été l’objet. Tout cela perpétue un cycle de violence.
On peut être en situation de pauvreté parce qu’on occupe un emploi faiblement rémunéré, précaire, ou qui n’a pas de protection sociale associées. Par exemple, si on tombe malade, cela veut dire qu’on tombe sur l’assurance-emploi avec 55% d’un revenu qui était déjà faible, pendant 26 semaines et après cela, si on ne retrouve pas un emploi, c’est possiblement l’aide sociale. C’est aussi lorsqu’on occupe un emploi précaire, c’est la difficulté d’avoir accès à un service de garde ou d’avoir des horaires de travail ajustés à ses obligations familiales.
On peut être en situation de pauvreté parce qu’on est à la retraite, parce qu’on a pas eu la chance ou l’opportunité d’avoir un régime de pension à son travail. Ceci fait en sorte qu’on dépend des prestations de vieillesse gouvernementales, des prestations très faibles à un moment de notre vie où on a souvent besoin de plus de soutien, on a besoin de soins et on a pas les moyens de se les payer. On est aussi plus à risque d’abus de la part de certains propriétaires. On peut aussi être en situation de pauvreté parce qu’on est un nouveau ou une nouvelle arrivante, parce qu’on est en attente de statut, qu’on est sans statut, les démarches sont hyper compliquées, nos droits vont être limités, voire même inexistants. On peut être victime de préjugés et on risque d’occuper les pires emplois. J’ai enquêté sur les conditions de travail des attrapeurs de volailles dans des abattoirs au Québec et c’est hallucinant comme réalité. Donc, des difficultés qui s’ajoutent aux traumatismes vécus et à l’exil.
On peut aussi être un travailleur étranger temporaire. Il y en a beaucoup dans la région de Québec, à l’ile d’Orléans et dans Portneuf, qui n’ont pas les mêmes droits ou les mêmes accès et même s’ils les ont ces droits, ils les ignorent en raison de la barrière de la langue. Par exemple, en cas d’accident de travail, plusieurs travailleurs n’auront pas droits aux indemnités parce qu’ils n’iront pas voir un médecin pour déclarer un événement. Les employeurs ont tendance à limiter les déclarations parce que cela fait augmenter leurs contributions à la CNESST. Les travailleurs temporaires sont astreints à un permis de travail fermé qui ne leur permet pas de changer d’emploi. Cela les place dans une situation de grande dépendance.
On peut aussi être en situation de pauvreté parce qu’on est une personne proche aidante. Ce sont la plupart du temps des femmes. Nous avons des responsabilités importantes. Cela peut être les parents âgés, ou bien des enfants avec des besoins particuliers. L’État ne soutient pas efficacement et c’est difficile d’occuper un emploi. On risque parfois de quitter son emploi, de réduire nos heures de travail, on risque de perdre son emploi, aussi on peut se retrouver en situation de dépendance par rapport à un conjoint parce que c’est la seule solution qui se présente pour prendre soin.
Aussi, on peut être en situation de pauvreté parce qu’on est locataire, parce que le logement est trop cher, qu’il est trop petit, ne répond pas à nos besoins, il est en mauvaise condition. On est à risque de le perdre en raison des réno-victions. Selon les statistiques compilées par le FRAPRU pour la ville de Québec, on parle d’un ménage sur quatre qui dépense plus de 30% de son revenu pour se loger. Dans certains quartiers, c’est beaucoup plus qu’un ménage sur quatre. Le prix moyen des logements a augmenté de 16,15% depuis 2018.
On peut être en situation de pauvreté parce qu’on est en situation d’itinérance, visible ou invisible. Depuis quelques années, la situation s’aggrave. De nombreuses personnes se retrouvent à la rue après avoir perdu leur logement. L’occupation d’une chambre est de plus en plus difficile et les services sont limités dans les refuges. Aussi, les femmes sont plus à risque de vivre de la violence.
On peut aussi être en situation de pauvreté parce qu’on est étudiant. Les revenus sont plus faibles et on n’a peu de disponibilité pour travailler. On peut être obligé d’effectuer des stages non rémunérés. Les gens ici qui ont été stagiaires en travail social, métier traditionnellement féminin, vous savez de quoi je parle. Cela fait en sorte qu’on va avoir de la difficulté à se trouver un logement. Les propriétaires peuvent aussi refuser de nous louer. On va couper sur l’alimentation, sa vie sociale, etc. Ultimement, on va interrompre ses études.
On peut aussi être en situation de pauvreté parce qu’on a des problèmes de santé, physique ou mentale. Il y a des barrières d’accès, les médecins de famille sont rarissime et les services de plus en plus limités. On observe une privatisation des services de santé, donc cela implique des frais pour les personnes. On peut faire face à d’importants problèmes si par exemple, le personnel soignant discrédite notre parole et notre expérience. Une recherche récente menée par le Réseau des groupes de femmes de la Capitale nationale, le RGF, indique qu’être une femme et avoir été victime de violence sexiste, d’avoir eu un diagnostic de santé mentale, cela nous met dans des rapports très complexes et difficiles avec les professionnels du réseau de la santé et des services sociaux.
On peut être en situation de pauvreté parce qu’on vit avec un handicap ou un problème de santé chronique. Les services de transport adaptés sont insuffisants, parfois inadéquats. On n’a pas nécessairement accès à l’équipement dont on a besoin au quotidien pour assurer son autonomie, plusieurs lieux ne sont pas accessibles. L’accessibilité universelle n’est pas encore acquise. Il est difficile de se maintenir ou de décrocher un emploi pour un ensemble de facteurs. Aussi pour les femmes en situation de handicap, la question des violences sexuelles est assez présentes, mais peu documentée. C’est difficile parce que ce sont souvent les personnes qui apportent un soutien qui vont commettre ces formes d’abus.
La pauvreté a plusieurs visages et je ne prétends pas en avoir fait le tour. Il y a plein d’autres choses qui serait à nommer. C’est encore plus difficile quand plusieurs de ces situations se conjuguent dans la vie des personnes. Elles vont être plus à risque de s’appauvrir, d’être plus malades, d’être plus isolées. C’est toute la dimension que les groupes de femmes ont adoptée avec la perspective intersectionnelle. Peu importe la réalité des personnes ou le chemin qui conduit à la pauvreté, ce qui est certain, c’est que c’est une atteinte aux droits fondamentaux des personnes, le droit de répondre à ses besoins, le droit à la dignité, le droit à de bonnes conditions de vie, le droit de prendre la parole et d’être entendu, mais aussi encore plus, le droit que la perspective des personnes en situation de pauvreté soit prise en compte dans la construction des politiques publiques et comment celles-ci sont organisées. Marie-Hélène Deshais
Clairement, dans la solidarité il y a de la joie, mais donnons-nous aussi une place pour la colère et l’indignation. On continue avec Marie-Hélène Vallée du Comité Maison de chambres. C’est quoi Marie-Hélène vivre la pauvreté à Québec en maison de chambres? Marie-Noëlle
Je vais vous présenter brièvement ce qu’est le Comité Maison de chambres parce que nous sommes peu connu et parce que le phénomène des maisons de chambres est peu connu. Nous travaillons à l’amélioration des conditions de vie en maison de chambres. C’est premièrement un logement, ce n’est pas une ressource pour logement de transition. Les gens peuvent choisir d’y habiter de façon permanente, tout comme cela peut être un tremplin vers un autre type de logement.
Ce qui est important de savoir, c’est que les gens ont les mêmes droits dans une maison de chambres que toute personne en appartement. Malheureusement, c’est peu connu, ce qui mène beaucoup d’abus. Des propriétaires vont profiter de l’ignorance des gens. C’est pour cela que nous travaillons avec ces derniers pour les aider à connaître leurs droits. Souvent la maison de chambres est l’option la plus abordable, évidemment c’est relatif au revenu disponible. Avant on disait que c’était la première porte de sortie de l’itinérance, mais ce n’est plus le cas. C’est plutôt la dernière porte avant d’y retourner.
Vous savez que le logement est l’un des déterminants majeurs de la santé. Avoir des mauvaises conditions de logement, cela influence notre vie au complet, autant notre santé mentale que physique. Cela peut aller aussi jusqu’au réseau social qui nous entoure ou pas. C’est souvent le loyer qui occupe la plus grande part de notre budget. Si on parle de la situation actuelle, la première évidence, c’est qu’il y a peu de logements abordables. On déplore aussi qu’il n’y ait pas assez de logements sociaux. Pourtant, le gouvernement a aboli des programmes pour construire du logement social, le programme Accès logis par exemple. Ils ont prétendu que les organismes étaient trop lents pour construire. C’est certain que c’est lent quand on ne parvient pas à obtenir le financement nécessaire. Il faut avancer des sommes considérables qui sont remboursées plus tard par le gouvernement provincial.
Il y a un nouveau programme qui s’appelle le PHAQ, Programme en habitation abordable du Québec, avec les mêmes problèmes qu’il y avait, mais ce n’est pas du logement sur la base de 25% du revenu, mais ce qu’ils considèrent abordable. Qu’est-ce qui est abordable pour le gouvernement, je vous donne un exemple : un studio à Québec, ne devrait pas dépassé 690$/mois. Pour quelqu’un qui reçoit de l’aide sociale, cela représente 90% de son revenu, celui qui reçoit la Solidarité sociale, c’est 57% de son revenu. Cela n’en laisse pas beaucoup dans ses poches. Il manque de logement, il faut en construire et ce n’est pas facile. La ministre a même dit : « Si vous n’êtes pas capables de vous payer un logement, devenez propriétaires. » Cela dit tout. Avec ce programme, le plafond de prix exigé n’est que pour les dix premières années.
Les villes aussi vont tenter de construire du logement abordable par toutes sortes de façons. À Montréal, les promoteurs recevaient une amendes s’ils ne construisaient pas tant d’unités de logement abordable par projet. Ils préfèrent payer l’amende qui est peu élevée que de se conformer à ce règlement. Donc, aucun logement abordable n’a été construit, il y a un manque de logements sociaux et les propriétaires s’en mettent plein les poches. Il y a beaucoup d’abus présentement.
Pour revenir aux maisons de chambres, on constate dans les dernières années, beaucoup de changements. De nombreuses personnes qui peinent à se trouver un logement se tournent maintenant vers les maisons de chambres. Cela fait beaucoup de nouvelles personnes qui veulent y vivre pour peu de chambres disponibles parce que le parc de maisons de chambres diminue constamment. Alors les propriétaires vont préférer louer à une personne qui occupe un emploi plutôt qu’à des personnes marginalisées. Présentement, plusieurs maisons de chambres sont converties en logement, ou bien en RB&B. D’ailleurs, selon le code civil du Québec, c’est totalement légale d’évincer des gens pour faire un RB&B dans des appartements. C’est un problème actuel.
Si vous êtes chambreurs, ce ne sont pas des bonnes conditions et il est extrêmement difficile de faire valoir ses droits. Engager un avocat, se déplacer au tribunal, toutes choses très difficile lorsqu’on est à faibles revenus. Les démarches sont tellement compliquées qu’il est très difficile de s’y retrouver même pour les intervenants qui accompagnent ces gens. Ils vont abandonner parce qu’ils sont découragés et qu’ils doivent mettre leur énergie dans d’autres choses. Certains propriétaires vont leur dire de prendre leur trou ou bien de déménager et s’ils se défendent, ils vont avoir un dossier qui va les suivre à vie à la Régie du logement. Les propriétaires ont le gros bout du bâton, ils peuvent se permettre de discriminer les gens puisqu’ils savent qu’ils vont louer de toute façon. Ils se permettent de mettre les gens dehors de façon illégale, pour du dérangement ou des retards dans les paiements. Ils savent qu’une personne en état de survie qui se retrouve à la rue ne va pas engager un avocat pour les poursuivre. Ella va plutôt essayer de survivre et de se revirer de bord. Quand j’y pense, je me dis : Moins qu’on a d’argent, moins qu’on a le droit de se tromper. Tout le monde a le droit à l’erreur et parfois ce n’est pas de notre faute si on ne peut pas payer notre loyer à temps.
Je trouve aussi que le monde immobilier a beaucoup changé dans les dernières années. Je me souviens d’un temps où c’était un investissement sur le long terme. On s’achetait un immeuble pour avoir un revenu d’appoint, pour mettre de l’argent de côté et léguer quelque chose à ses enfants. Maintenant, c’est normal de dire : « On achète un immeuble et on veut faire du profit demain. » Certains trouvent qu’un investisseur est brillant parce qu’il est parvenu à faire de gros profits en contournant la loi. La société les admire parce qu’ils font beaucoup d’argent. Les gens oublient que derrière ces gros profits, plein d’individus ont perdus leur milieu de vie, leurs repères et qu’ils ont de la misère à se loger. En résumé, la réalité c’est qu’on a de moins en moins de choix pour ce qui a trait au logement et même lorsqu’il y a des choix, ils sont peu intéressants. Marie-Hélène Vallée
Je n’ai rien à ajouter. C’est tellement claire que la crise du logement aggrave les situations de pauvreté. Cela prendrait tellement de moyens maintenant pour être capable de faire une différence dans les vies. Le temps de construction, et il y a tout un travail à faire pour dégager les sommes qui viennent du fédéral, du provincial et des municipalités. Nous allons poursuivre avec les représentantes du Projet LUNE. Johanne, qu’est-ce que cela veut dire vivre en situation de pauvreté en ce moment ? MNB
Bonjour, au Projet LUNE, nous sommes un organisme à haut seuil d’acceptation et il n’y en a pas assez, qui prennent les femmes comme elles sont, d’où elles viennent, en état de consommation, parfois complètement déconnectées de la réalité. Entendre parler de la pauvreté et la vivre en même temps, c’est difficile. Il y a plein de choses qui amènent les femmes à l’itinérance: la violence conjugale, la santé physique, la santé mentale. Pour ce qui est de la pauvreté, c’est 7 jours sur 7, 24 heures par jours, 365 jours par année. Il n’y a pas de congé, même à Noël. On doit continuer de lutter pour passer à travers, ne serait-ce que pour manger, avoir un toit, avoir des vêtements. Je ne sais pas si vous savez ce que c’est de vivre à la rue et d’être obligée de porter des souliers ou des bottes d’hiver que quelqu’un d’autres a déjà mis avant ? Pour l’intégrité de la personne, c’est pas le fun.
Les problèmes de santé mentale à LUNE, on en voit beaucoup. Les femmes en situation d’itinérance vivent du rejet et lorsqu’elles vivent un problème, elles ne savent pas où s’adresser parce que souvent les organismes ne sont pas accueillants en raison des critères qu’ils ont. Ces femmes ne rentrent pas dans le moule et elles se sentent rejetées. Je vais passer la parole à Chantale qui va vous expliquer le parcours des femmes qui se sortent de l’itinérance, mais pas nécessairement de la pauvreté. Johanne Gagnon
Bonjour à tous et à toutes. À LUNE, nous sommes un organisme de défense des droits des travailleuses du sexe ou des ex-travailleuses du sexe. La moitié de l’équipe sont des travailleuses du sexe ou d’ex-travailleuses du sexe, les autres intervenantes s’identifient comme des alliées. Nous avons 9 axes d’intervention. Il y a des travailleuses de rue, un hébergement à haut seuil d’acceptation, on fait de la représentation, on fait de la présentation, etc. Et l’axe transversal à tout cela, c’est celui de l’inclusion socioprofessionnel. Dès le départ, le Projet Lune a été mis sur pied par des femmes qui voulaient absolument que ce projet existe. C’était des femmes travailleuses du sexe qui utilisaient des drogues par intraveineuse. Elles se sont tellement mobilisées que l’organisme est né de cette volonté.
Depuis les débuts, elles font partie intégrale du projet. C’est pour cela que tout le monde peut venir travailler à LUNE, même celles qui sont le plus loin du marché du travail, nous essayons de les inclure pour leur donner une chance. Parce que travailleuses du sexe, ce n’est pas un travail reconnu qu’elles peuvent inscrire dans leur cv. Pourtant, elles y développent beaucoup d’habiletés. Les femmes se demandent ce qu’elles peuvent faire d’autre ? Cela ne veut pas dire qu’elles sont prêtes à travailler à temps plein. Il se peut que loyer ne soit pas stable encore, que tu sois entre l’itinérance et la stabilité. C’est très difficile. Des situations de violence, on en voit tout le temps. Il y a plus de 50 femmes à LUNE si on inclut le conseil d’administration, alors chacune a une histoire différente. Mais la ligne entre la pauvreté et je m’en sors, elle est où? Dès le départ, on s’est dit qu’on allait pas maintenir les femmes dans la pauvreté. Alors chaque heure travaillée à LUNE est rémunérée. Ce n’est pas du bénévolat. Tout le monde qui commence a le même salaire, les intervenantes, les paires aidantes, les intervenantes paires aidantes. On commence par demander un 10 heures par mois et à cause des gains permis à l’aide sociale, on ne peut pas payer plus que 20$ de l’heure. Comme le chèque est coupé intégralement si on gagne plus de 200$/mois, alors c’est difficile d’occuper progressivement un emploi sans être à temps plein. Il y a toujours des embuches pour arriver. Dans le fond, la recette pour revenir sur le marché du travail traditionnel, c’est de commencer tranquillement, mais si tu fais cela, tu gagnes moins que si tu étais sur l’aide sociale. L’aide sociale est un très petit revenu, mais tu es assurée de l’avoir et les soins dentaires et les médicaments sont couverts. Prendre le risque d’avoir un meilleur revenu, c’est aussi risquer de perdre le peu que tu as.
Au départ, le Projet Lune s’autofinançait avec des Gofundme. On se disait une nuit de plus, en luttant pour demeurer ouvert. Tu viens de sortir de l’itinérance et d’avoir un premier emploi, mais tu ne sais même pas si l’organisme va pouvoir te payer le mois prochain. Quel stress pour ces femmes ! Que dire de plus ? Chantale Simoneau
Tu as parlé de la limite de 200$ par mois pour les gains admissibles. C’est toute la complexité de la gestion si tu dépasses ce montant. Il faut que tu rembourses et cela finit par être un découragement. MNB
Effectivement, cela en décourage plusieurs. Parfois, il y a des erreurs et elles se font couper le chèque au complet. Alors elles ne peuvent pas payer leur loyer et cela devient ingérable. Ce n’est pas tant le problème de dépasser le montant, mais comment on fait pour le déclarer sans avoir de problème. Cela devient super compliqué. Chantale
On continue avec Danielle Lambert de l’ADDS-QM. MNB
L’Association de défense des droits sociaux du Québec métropolitain, cela fait 50 ans que nous défendons les droits des personnes à l’aide sociale. À chaque jour, on reçoit des appels et des visites de personnes pour qui l’aide sociale est un vrai calvaire. C’est une loi qui punit, qui soupçonne, qui t’enfonce encore plus, qui fait passer les intérêts du gouvernement à coup de frais d’intérêts sur les dettes envers le ministère. Ce sont des dettes pour avoir aimé, pour s’être entre-aidé, pour avoir reçu des dons, pour avoir omis de déclarer un changement de situation. L’aide sociale cela vient avec des demandes de fouillage dans ton compte bancaire, des avis de réclamation sans explication, sans compter les critères d’admissibilité à l’aide sociale qui t’enfonce encore plus dans la pauvreté. Pour être admise à l’aide sociale, il faut aller quêter son droit et se faire refuser sous prétexte qu’il te reste un peu d’argent dans tes poches. Pour être admissible, il faut que tu aies moins de 887$. Mais s’il te reste 200$ dans tes poches, tu vas être admissible, mais ce montant sera déduit de ton premier chèque. C’est zéro dollar que tu dois avoir pour être admissible à l’aide sociale. La situation se dégrade partout et les dossiers d’aide sociale sont éparpillés dans toutes les régions du Québec, il n’y a plus d’agent qui te connait, qui est capable de te dire: « Ça vas-tu bien ? As-tu des besoins ? » Cela n’existe plus. On ne parle pas des prix des logements qui explosent. Alors, vivre dans la pauvreté, je vais laisser Monique en parlé. Danielle Lambert
Aujourd’hui en 2023, vivre dans la pauvreté quand tu es une personne à l’aide sociale, tu dois faire des choix. Parfois t’est coincée parce que tu es obligée de choisir entre t’acheter à manger, une passe d’autobus parce que tu veux essayer de retourner sur le marché du travail. Avec la COVID, l’inflation et la récession qui s’en vient, cela donne beaucoup de soucis aux personnes en situation de pauvreté, particulièrement les personnes à l’aide sociale. On voit la hausse des prix des aliments dans les épiceries, c’est faramineux. À chaque fois que j’y vais, je suis étonnée de voir les prix dont certains ont doublé. Vivre dans la pauvreté, c’est aussi ne pas avoir accès à des soins de santé. Les chèques d’aide sociale ne sont pas suffisant pour se payer un loyer adéquat. Même si tu vis dans un HLM, le jugement social est là, tu te fais regarder parce que tu vis de l’aide sociale. Si tu essaies de gagner un petit peu d’argent, tu te fais couper ton chèque d’aide sociale. On t’empêche d’essayer de vivre au lieu de survivre. Aussi, c’est se retrouver avec une dette à rembourser à l’aide sociale. Il te charge des intérêts et elles sont à 10%. Imaginez-vous quand une personne a une dette à l’aide sociale, elle ne voit plus la lumière au bout du tunnel. C’est trop demandant de rembourser une dette avec un si faible revenu. Si jamais cela vous tente, nous avons fait un dossier noir sur les dettes à l’aide sociale. On parle de ce que cela fait une dette quand tu es une personne à l’aide sociale.
À l’aide sociale, il y a des catégories. Je trouve cela inacceptable qu’on crée des catégories parce que tout le monde a besoin de se loger, de se nourrir, de se vêtir et de se transporter. Les chèques à l’aide sociale, le plus bas c’est 770$/mois et le plus haut, c’est 1 500$/mois. Mon souhait, ce serait que tout le monde ait droit à ce montant parce qu’on a tous et toutes les mêmes besoins de base.
S’il arrive un événement dans ta vie, dans ta famille, quelqu’un décède par exemple et tu dois aller aux funérailles, il faut que tu fasses des choix difficiles comme te priver de nourriture pour pouvoir aller aux funérailles à l’extérieur de la ville. Ou encore, ton frigo brise et tu es obligée de t’en acheter un nouveau. Même dans des magasins de meubles usagers, il faut que tu aies les sous pour l’acheter et c’est quand même dispendieux. Souvent, ce sont des choix qu’on doit faire. Cela devient dure pour le moral de la personne et à force d’être toujours obligé de gérer la précarité, tu te retrouves avec des problématiques monétaires ou de santé, parce que tu n’y arrives pas.
Il y a aussi les préjugés véhiculés à l’endroit des personnes à l’aide sociale. Par exemple, si tu essaies d’aller sur le marché du travail, si tu dis que tu es une personne à l’aide sociale, il arrive qu’on te dise qu’on va vous rappeler dans quelques jours. Cela m’est arrivée des affaires comme ça. Cela m’est arrivé de me faire dire par un agent que je devais travailler en cuisine parce que j’avais une formation là-dedans et que je ne pouvais pas regarder ailleurs. D’après la loi de l’aide sociale, ils disent qu’ils veulent nous aider à nous en sortir, mais souvent ce n’est pas le cas. Je me rends compte que dans la loi elle-même, il y a des préjugés envers les personnes à l’aide sociale. C’est ça être dans la pauvreté, aujourd’hui en 2023. Plus ça va et pire c’est. Je m’inquiète de la récession qui s’en vient pour les personnes en situation de pauvreté, les femmes, les hommes, les travailleurs au salaire minimum. Il faut être vigilant et faire attention à la pauvreté parce que c’est quelque chose qui est vraiment important. Monique Toutant
J’ai envie de vous relancer Danielle et Monique avec la deuxième question : Quel sont les leviers pour éradiquer la pauvreté ? Qu’est-ce qui fait que cela s’aggrave? Qu’est-ce qui nous a amené là? Qu’est-ce qui nous y maintient ? Quel est votre point de vue ? MNB
L’entrée en vigueur de la première loi à l’aide sociale c’est 1970. Dès son adoption, elle se définissait comme étant un droit. Quelle est la logique des conditions derrière ce droit et surtout comment la pauvreté sert les intérêts du système et du marché de l’emploi? Dès les premières années, on a décidé de plafonner les montants d’aide sociale à 50% du salaire minimum. L’idée étant que les montants des prestations ne soient pas perçus comme un encouragement à ne pas aller sur le marché du travail. On voit tout de suite que les grands décideurs ont des grands intérêts derrière. Avec les années, on ajoute de plus en plus de conditions et de pénalités. Au fur et à mesure que la loi est modifiée, on s’aperçoit qu’elle est construite sur des préjugés et l’absence totale d’objectif visant à éliminer la pauvreté.
Contrairement à ce que le ministère dit, l’aide sociale, ce n’est surtout pas du soutien. On maintient la pauvreté, mais on veut que les personnes soient actives. Au fil des années, rappelons que la loi à l’aide sociale est passée d’une responsabilité du ministère des affaires sociales, au ministère du travail, puis de l’emploi et de la solidarité sociale. Parlons en du marché, la référence à l’effort et au mérite revient toujours pour les personnes à l’aide sociale. C’est un préjugé qui est là depuis toujours. « T’as pas de volonté, tu veux pas travailler. Fais des efforts, sois responsable. » C’est ce que les gens reçoivent comme message.
Si on regarde actuellement par rapport à la pénurie de main-d’œuvre, cela représente une belle occasion d’améliorer les conditions de travail, mais pour les personnes assistées sociales, c’est d’autant plus de préjugés et de difficultés pour faire reconnaitre leurs droits. Les contraintes, essaie de les prouver. Si tu n’as pas de médecin, tu n’auras pas de rapport médical, ni de soutien psychosocial, et pas de reconnaissance de contrainte, aucune reconnaissance de personne. Tu restes pauvre et arrange toi. En plus, on va te mettre dans des catégories. Il y a toujours l’emploi derrière ça. T’es apte à l’emploi, t’es en contrainte temporaire à l’emploi, t’es en contrainte sévère à l’emploi. Cela passe par objectif emploi. Ce n’est pas juste sur les lieux de travail les conditions. Il faut toujours bien que tes conditions de vie et ta santé te permettent d’occuper un emploi, mais ce n’est pas quelque chose que le ministère reconnait. Tout à l’heure, nous parlions des gains de travail permis par mois, cela équivaut à 5 heures par semaine. Passé 200$ mois, on va te le couper et après cela on prétend que l’on veut te soutenir, qu’on t’encourage à retourner sur le marché du travail, et essayer de faire des efforts comme ils disent. Au-delà de 200$, c’est comme si tu étais imposé à 100%. Je ne sais pas, mais moi je ne vais pas travailler si je suis imposée à 100%. C’est ce qu’on demande aux personnes à l’aide sociale.
Nous avons parlé du Dossier noir des dettes à l’aide sociale. Ne lisez pas cela avant de vous coucher parce que vous aller faire des cauchemars. Pendant ce temps, le ministère ne tient pas compte de ses propres négligences. Les problèmes pour rejoindre un agent à l’aide sociale, les difficultés à remplir les formulaires en ligne, la sévérité des pénalités, les avis que les personnes reçoivent à coup de pas d’explication. Cet été nous avons vu des personnes recevoir des avis comme quoi les ententes avec les organismes pour des transports pour des soins médicaux et thérapeutiques avaient été abolies. Les gens ont reçu un avis comme quoi ces ententes n’existaient plus et qu’ils devaient avancer l’argent pour se rendre à leur traitements médicaux. Puis, tu demanderas au ministère de te rembourser après. Les gens qui vivent à l’extérieur des grands centres ont du annuler leurs rendez-vous. On joue avec la santé des gens.
La société dans laquelle nous vivons et le système mettent beaucoup de mesures en place. Si on regarde les banques alimentaires, au départ c’était une mesure d’urgence qui ne devait pas durer. Plus ça va, plus c’est un passage obligé pour les personnes à l’aide sociale, et de plus en plus, pour les travailleurs et travailleuses à faible revenu. On parlait d’itinérance tantôt, le dénombrement des personnes en situation d’itinérance, c’est assez violent. On sort, on va calculer le nombre de personnes en situation d’itinérance, on va leur parler si c’est vraiment le cas, après on va faire des statistiques avec ça, puis on va dire que l’itinérance est en hausse. Merci de nous l’apprendre.
La société et le système dans lequel on vit maintient cela grâce à la philanthropie qui est encouragée par l’État qui se désengage de plus en plus. Alors, c’est le privé qui s’en fait une fierté. Individuellement, chacun choisit ses causes, ce qui donne une valeur morale. La porte est grande ouverte au privé pour prendre le relais du rôle de l’État. Les élites font des pieds et des mains, ils ouvrent des fondations, ils font des belles campagnes et cela leur apporte une belle image. Ils entretiennent ça et en plus ils bénéficient des largesses de l’État. Quand on pense à la grande Guignolée des médias pour les banques alimentaires, Bell jase pour la cause, pour la santé mentale, t’auras beau mettre du fric dans des pubs pour contrer les préjugés, si tes propres lois les entretiennent et les encouragent, cela ne mène nulle part. Ce sont tous des systèmes et des pratiques mis en place par le privé – on parle ici d’évitement fiscal, ils ne font pas cela pour éliminer la pauvreté –. Si on prend la firme KPMG, qui encourage la création des paradis fiscaux pour les grandes entreprises, ils ont écrit un beau document qui s’appelle : « Philanthropes perturbateurs, une nouvelle vague de philanthropes contemporains façonnent l’avenir ». C’est l’écosystème qui est instauré à travers la prétendue lutte à la pauvreté. Un écosystème qui sert à soulager les consciences et que l’on retrouve aussi en santé et en éducation, on le voit partout, mais pendant ce temps là, on ne lutte pas contre la pauvreté. Danielle Lambert
Selon moi, ce qui nous maintient dans la pauvreté, c’est la loi de l’aide sociale. Il y a beaucoup d’interdits qui empêchent les gens de s’entraider ou de s’en sortir. Cela devrait être enlevé de la loi pour donner une chance aux gens de vivre adéquatement et sainement. Aujourd’hui, c’est le gouvernement qui est problématique. Monique Toutant
Johanne, selon toi, qu’est-ce qui nous a amenés à cette situation et qu’est-ce qui nous emprisonne dedans? MNB
La première chose qui nous emprisonne ce sont les préjugés. Ils ne viennent pas juste du gouvernement, ils sont aussi présents dans la population en général. Essaie d’aller travailler quand tu n’es pas capable de t’habiller comme du monde, quand tu n’as pas d’adresse pour être rejointe, etc. Il y a un manque d’accès aux soins de santé mentale et physique. Cela fait que les gens s’auto-médicamentent, alors ils restent dans ton cycle de consommation. C’est une roue qui tourne et c’est bien dure de sortir de ça. La fracture numérique, quand tu es à la rue, tu n’as pas accès à Internet. Parler à des êtres humains, c’est le fun, mais cela n’existe plus vraiment. L’accès difficile au logement, c’est presqu’impossible. On parlait de la loi de l’aide sociale, quand on a un conjoint, on a un chèque à deux, c’est difficile pour les femmes. Souvent cela les maintient dans la violence conjugale. Aussi, avec un chèque à deux, tu as un compte conjoint. Juste de penser à toute la paperasse à remplir quand tu veux te séparer d’un conjoint violent. La séparation du chèque d’aide sociale c’est vraiment pas simple. En plus le chèque à deux et plus petit que deux chèques pour des personnes seules. Johanne
Au Projet LUNE, les personnes peuvent arriver dans l’état qu’elles sont, c’est première arrivée, première servie. Nous n’arrêtons pas d’entendre qu’il y a assez de places en hébergement, je ne crois pas que cela soit vrai. Nous recevons un minimum de 230 femmes par année. Dimanche dernier, entre 7 h 00 et 9 h 00, nous avions refusé quatre personnes déjà. Quatre femmes à qui nous avons dit qu’elles devaient rester dehors par manque de place. Comment veux-tu avoir un travail si tu ne sais même pas où tu vas coucher ? Combien de fois on a appelé une ambulance pour une personne connue des ambulanciers et ils ne se déplacent même pas. La santé mentale, la santé physique, les personnes qu’on voit, les femmes sont de plus en plus en mauvaise conditions physiques, elles sont vieillies prématurément. Elles sont plus âgées également. Les 18 à 25 ans, nous N’en voyons presque plus. Parfois elles ont perdu leur logement, le propriétaire les a mises à la rue parce qu’elles accumulaient (ramasser toutes sortes de choses chez soi au point d’encombrer tout l’espace habitable). Maintenant, elles accumulent dans la rue, elles se promènent avec leurs sacs. Comment on peut faire après quand tu es rendu là?
Juste avoir la liberté de choisir ce que tu as le goût de manger, elles ne l’ont pas. Nous fonctionnons avec des dons de nourriture, alors elles ne choisissent pas vraiment. Au début, nous ne comprenions pas, mais les femmes hébergées chez-nous allaient dans le frigidaire pour boire du lait. La raison, c’est que si tu es une femme seule, tu n’as pas accès à du lait dans les distributions alimentaires parce que c’est réservé aux familles. Habituellement, dans les organismes, on offre du café ou du jus super sucré, parce que c’est ce que tu eux offrir. Mais le lait, on en passe et on en passe, c’est vu comme la gâterie ultime. Je comprends que les femmes à la rue font des crises de nerfs. J’en ferais moi aussi des crises si je ne pouvais jamais décider ce que je mange, comment je m’habille, à quelle heure je me couche, à quelle heure j’ai la chambre de bain, etc. C’est terrible et t’es prise là-dedans.
Tu peux pas t’en sortir en un claquement de doigt. Oui, il y a un continuum de service et d’autres hébergement, mais avant de pouvoir y aller, c’est compliqué. Tu as un hébergement pour quelque temps puis après tu te ramasses à nouveau à la rue parce que quelque chose est arrivée. Une fois tu t’es fâchée puis on t’a expulsée. Si tu as un emploi, tu ne peux pas être malade et c’est hyper difficile d’avoir un billet du médecin. Pour une infection urinaire, une personne a manqué trois jours de travail, c’est une paie qu’elle n’a pas, après, cela engendre d’autres problèmes pour payer son loyer, etc. C’est déprimant. Chantale
Non, il faut le dire aussi. Moi je travaille à l’Engrenage, et c’est quelque chose que je ne savais pas qu’il manquait de places dans les refuges. À l’Auberivière, il y a un tirage au sort pour savoir qui va dormir à l’intérieur et les autres retournent à la rue. C’est important de le dire parce qu’il ya un manque de ressources qui enferme les gens. Tu n’en as pas d’alternative. Même chose, les gens disent: « Il y a juste des ressources dans Saint-Roch, cela prendrait plus de ressources ailleurs pour soutenir les gens. » Quand tu perds ton logement sur la Côte de Beaupré, est-ce qu’il ya des ressources qui te viennent en aide ? Il pourrait avoir un dépannage, une chambre de motel, le temps de te virer de bord, pour que tu puisses être soutenu dans ton milieu plutôt que de devoir aller au centre-ville. Il y a des choses à mieux connaître pour lier les enjeux d’itinérance avec le discours global sur la pauvreté. J’ai trouvé ça super intéressant qu’aujourd’hui le CLAP aborde tout cela dans son ensemble. Merci Chantale de nous amener ces informations. On poursuit avec Marie-Hélène Vallée du Comité Maison de chambres. Donc, qu’est-ce qui nous maintient dans cette situation et qu’est-ce qui nous amené là? MNB
C’est toute une question, il y a juste trop de réponses. Je vais essayer de répondre le plus succinctement possible, mais je n’ai pas toutes les réponses. Il faut travailler ensemble pour les trouver. Si on parle de la crise du logement, cela fait longtemps qu’on sait que cela s’en vient. Il y a quelques années, on se faisait répondre qu’il y avait une crise du logement lorsque le taux d’inoccupation a moins de 3% de disponibilité. Comme il y en avait plus de 3%, nous n’étions pas en crise du logement. Oui, mais il suffit d’aller sur Kijiji pour essayer de trouver un appartement abordable.
Donc, il y a une crise du logement abordable. On l’a vu venir, sauf que souvent on attends d’être dans la crise pour réagir. Les gouvernements sont lents à réagir. Il y a plusieurs choses qui fait en sorte que les décisions sont difficiles et longues à prendre. Ce n’est pas le cas seulement pour le logement d’ailleurs. Comme coordonnatrice d’un organisme communautaire, on voit les choses, notre force c’est qu’on travaille avec les personnes qui vivent ces réalités. On les voit les obstacles qu’ils vivent, ils nous le disent, on travaille avec eux. Ce qu’ils vivent, c’est assez évident, je pense qu’on a pas besoin de faire une grosse recherche scientifique pour le découvrir. Cela ne devrait pas prendre trois ans au gouvernement pour réaliser que si les gens n’ont pas assez d’argent pour s’acheter de la nourriture, ils vont avoir faim. Je trouve que souvent on n’agit pas assez rapidement. Je ne suis pas contre les recherches soit dit en passant. Le Comité Maison de chambres a été créé suite à une recherche et on se base encore sur ses recommandations pour enligner nos actions.
On fonctionne encore avec du financement par projet. C’est pas facile d’obtenir le financement, il faut essayer d’adapter notre façon de voir aux objectifs proposés par les bailleurs de fonds. Il faut inventer un projet qu’on fait déjà, en disant que c’est un nouveau projet. Il faut que cela soit novateur et nous concevons un nouveau projet pour répondre à votre appel. On essaie de rentrer dans les petites cases, et parfois c’est très difficile. Ils disent qu’ils ont besoin de nous, mais pourtant on ne rentre dans aucune case nulle part. Les gens qui veulent aider, faire quelque chose, et qui comprennent le plus la réalité, n’ont pas la voix pour parler. Je pense surtout à ceux et celles qui vivent en situation de pauvreté. Nous essayons de les aider à faire entendre leur voix. J’ai entendu Legault, il n’y a pas longtemps, c’était un peu décourageant, qui disait qu’il ne pouvait pas répondre à tous les besoins du communautaire. Ça nous a fâchés d’entendre cela parce que les besoins du communautaire, ce sont les besoins de la communauté. Ce n’est pas aux besoins du communautaire qu’il faut répondre, mais à ceux de la communauté.
Pour dire aussi comment ils peuvent être longs à réagir, le 13 octobre, le fédéral et le provincial ont signé une entente de 900 millions pour construire des logements au Québec. Ça a pris 7 mois de négociation avant qu’ils en viennent à une entente. Imaginez combien de temps cela va prendre pour que cet argent devienne des logements ? Cela prend des années. Ça me rappelle un financement que nous n’avons pas encore eu parce qu’on attendait que cela soit signé par la ministre. C’est plein de détails comme ça qui font que pendant ce temps le prix des logements montent, l’argent accordé n’est plus suffisant et des milliers de personnes n’arrivent pas à répondre à leurs besoins.
J’ai lu une étude qui a été faite à Vancouver. Ils ont donné 7 500$ à des personnes en situation d’itinérance et ils les ont suivies pendant un an. Suite à cela, les résultats ont révélés que les participants avaient emménagé dans un logement stable après trois mois. En général, ils ont fait une bonne gestion de leur argent. L’argent a permis à près de 70% d’entre eux d’être en situation de sécurité alimentaire après seulement un mois et les dépenses en alcool, en cigarettes et en drogue, ont diminué de 39%. Si je me souviens bien, plusieurs avaient même réussi à économiser un peu d’argent.
Je sais que ce n’est pas assez, mais cela permet de voir comment un montant de départ peut aider. Ils en venaient aussi à la conclusion, qu’en bout de ligne, ils avaient aussi sauvé de l’argent. Ça avait coûté moins cher de refuge, de soins de santé, d’interventions policières, etc.
Une autre chose intéressante, c’est que les chercheurs ont sondé la population sur ce qu’ils pensaient de cette expérience. L’opinion était que les bénéficiaires allaient dépenser 300$ par mois pour de l’alcool, de la drogue et des cigarettes alors qu’en réalité leur consommation a diminué et c’était moins de 100$ par personne. Donc, on peut se poser la question, est-ce qu’on ne donne pas d’argent à des personnes qui en ont vraiment besoin parce qu’on croit qu’elles vont prendre de mauvaises décisions ? Est-ce que ce sont les préjugés qui font que les solutions proposées ne sont pas suffisantes et qu’on bloque les gens à essayer d’avancer ?
Je termine en vous parlant d’une situation dont nous avons été témoins. Quelqu’un nous a fait une demande d’aide au Comité Maison de chambres, c’est une vingtaine de locataires d’une maison de chambres qui ont reçu un avis d’augmentation de loyer de 40 à 60%. En plus, le propriétaire annonçait qu’il allait faire une enquête de crédit sur chacun d’eux. Certains habitaient là depuis des années et payaient toujours bien. Le propriétaire les informait aussi qu’il allait faire enquête sur leurs antécédents judiciaires. On voyait que ce qu’il voulait, c’était de faire place net pour pouvoir augmenter le prix de ses loyers. C’était en fait toutes des choses que les gens avaient le droit de refuser. C’est ce qu’on leur a dit et malheureusement souvent les gens sont mal informés.
Je ne sais pas si vous saviez que le tribunal administratif du logement a pour mission d’informer la population sur leurs droits. Pour ma part, je n’ai jamais vu cette information nulle part. Quand on pense que plusieurs personnes vivent avec la fracture numérique, c’est encore plus difficile de trouver l’information et de savoir qu’on peut toujours refuser une augmentation. Donc, il y a des gens qui étaient déjà partis et d’autres qui, par peur des représailles, ont décidé soit de quitter ou d’accepter l’augmentation. Leur loyer est passé de 450$/mois à 700$ d’un seul coup. Ce qui maintient de telles situations, c’est le manque d’informations. On maintient les gens dans l’ignorance. Merci. Marie-Hélène Vallée
On termine ce segment avec Marie-Hélène Deshais. Donc, qu’est-ce qui nous maintient dans tout ça ?MNB
C’est difficile d’ajouter quelque chose après tout ce qui a été dit. Nous avons 50 ans de politiques néolibérales dans le corps. On l’oublie et on en parle peut-être moins, mais ça laisse des traces. Quand vous avez parlé de la loi de l’aide sociale, en 1989, le gouvernement a vraiment renforcé l’idée du bon et du mauvais pauvre avec cette réforme. Nous vivons les conséquences de cela et vous avez bien nommé comme elles sont présentes dans les relations non seulement avec les agents d’aide sociale, mais aussi dans les règles, ainsi que dans les discours politiques, de même que dans les discours populaires qu’on entend dans les différents médias. Un autre exemple de comment l’histoire nous suit, ce sont les coupures dans l’aide logement de la part du gouvernement fédéral en 1994. Coupures dans les budgets pour les HLM, il n’y a plus eu de construction par la suite.
Après cela, il y a eu des coupures dans les programmes de coop d’habitation et plusieurs programmes qui étaient très bons et qui ont été démantelés ou reconfigurés. Donc, la crise du logement n’est pas nouvelle, elle s’est amplifiée, mais elle était là et elle était annoncée depuis longtemps. Je pense que Véronique Laflamme du FRAPPRU l’a bien nommé. Autre exemple, insuffisance chronique du soutien accordé au maintien à domicile et aux CHSLD depuis des décennies. Ce que cela fait, c’est que les personnes âgées qui n’ont pas de soutien à domicile se retrouve dans des résidences privées pour aînés où elles paient trop cher. Elles paient les services à la carte. La situation actuelle, c’est que des propriétaires de résidences décident de fermer. On a vu des batailles extraordinaires qui ont été menées. Ces personnes devraient pouvoir rester chez elle ou être en CHSLD, en logement public si elles en ont besoin. Marie-Hélène Deshais
Ce sont les conséquences de gouvernements qui, les uns après les autres, ont surfé sur cette vague qui consistait à dire : « On va en faire moins pour certains groupes de la population, mais on va en faire beaucoup pour le privé, pour favoriser le privé en santé et services sociaux, etc. »
La COVID est venue renforcer les inégalités qui étaient déjà présentes. Vous savez comme cela a affecté, le stress et la pression, le manque aussi de biens et de services essentiels. La santé mentale et la santé physique des gens ont été affectées. Aujourd’hui, même si le taux d’infection est très bas, la COVID est toujours présente dans le corps et dans la vie des gens. J’ajouterais aussi que les groupes communautaires ont été et demeurent sous pression en raison de la hausse des demandes, les tâches qui ont augmentées, et les demandes auxquelles ils ne peuvent pas répondre, cela a un effet sur les travailleurs et les travailleuses du communautaire. C’est dure pour les gens et il y a aussi un fort roulement de personnel. Certains sont partis à la retraite, fatigués et épuisés, et c’est parfois difficile de combler les postes. Il y a une pression sur les groupes communautaires et les équipes sont fragilisées. Dans certains cas, il y a eu du financement supplémentaire, mais il était temporaire ou bien en deçà des besoins. Donc, ce n’est pas facile non plus pour les groupes communautaires. Pour d’autres, le financement a cessé et ils fonctionnent avec du financement par projet. Alors comment on continue à répondre à ces besoins?
C’est difficile d’ajouter quelque chose après tout ce qui a été dit. Nous avons 50 ans de politiques néolibérales dans le corps. On l’oublie et on en parle peut-être moins, mais ça laisse des traces. Quand vous avez parlé de la loi de l’aide sociale, en 1989, le gouvernement a vraiment renforcé l’idée du bon et du mauvais pauvre avec cette réforme. Nous vivons les conséquences de cela et vous avez bien nommé comme elles sont présentes dans les relations non seulement avec les agents d’aide sociale, mais aussi dans les règles, ainsi que dans les discours politiques, de même que dans les discours populaires qu’on entend dans les différents médias. Un autre exemple de comment l’histoire nous suit, ce sont les coupures dans l’aide logement de la part du gouvernement fédéral en 1994. Coupures dans les budgets pour les HLM, il n’y a plus eu de construction par la suite.
Après cela, il y a eu des coupures dans les programmes de coop d’habitation et plusieurs programmes qui étaient très bons et qui ont été démantelés ou reconfigurés. Donc, la crise du logement n’est pas nouvelle, elle s’est amplifiée, mais elle était là et elle était annoncée depuis longtemps. Je pense que Véronique Laflamme du FRAPPRU l’a bien nommé. Autre exemple, insuffisance chronique du soutien accordé au maintien à domicile et aux CHSLD depuis des décennies. Ce que cela fait, c’est que les personnes âgées qui n’ont pas de soutien à domicile se retrouve dans des résidences privées pour aînés où elles paient trop cher. Elles paient les services à la carte. La situation actuelle, c’est que des propriétaires de résidences décident de fermer. On a vu des batailles extraordinaires qui ont été menées. Ces personnes devraient pouvoir rester chez elle ou être en CHSLD, en logement public si elles en ont besoin. Marie-Hélène Deshais
Ce sont les conséquences de gouvernements qui, les uns après les autres, ont surfé sur cette vague qui consistait à dire : « On va en faire moins pour certains groupes de la population, mais on va en faire beaucoup pour le privé, pour favoriser le privé en santé et services sociaux, etc. »
La COVID est venue renforcer les inégalités qui étaient déjà présentes. Vous savez comme cela a affecté, le stress et la pression, le manque aussi de biens et de services essentiels. La santé mentale et la santé physique des gens ont été affectées. Aujourd’hui, même si le taux d’infection est très bas, la COVID est toujours présente dans le corps et dans la vie des gens. J’ajouterais aussi que les groupes communautaires ont été et demeurent sous pression en raison de la hausse des demandes, les tâches qui ont augmentées, et les demandes auxquelles ils ne peuvent pas répondre, cela a un effet sur les travailleurs et les travailleuses du communautaire. C’est dure pour les gens et il y a aussi un fort roulement de personnel. Certains sont partis à la retraite, fatigués et épuisés, et c’est parfois difficile de combler les postes. Il y a une pression sur les groupes communautaires et les équipes sont fragilisées. Dans certains cas, il y a eu du financement supplémentaire, mais il était temporaire ou bien en deçà des besoins. Donc, ce n’est pas facile non plus pour les groupes communautaires. Pour d’autres, le financement a cessé et ils fonctionnent avec du financement par projet. Alors comment on continue à répondre à ces besoins?
Comment on s’en sort ? Pourquoi on ne prend pas juste la peine d’écouter les gens ? À la base, c’est quoi que vous avez besoin, qu’est-ce qui vous aiderait ? Toutes les personnes ne sont pas pareilles. Cela permettrait de regrouper et d’avoir de nouvelles idées si nous prenions le temps d’écouter les gens qui vivent la situation. Chantale Simoneau
Deux petits messages: Pour les personnes comme moi qui vivent la pauvreté, c’est de s’impliquer dans notre communauté pour être la voix de ceux et celles qui ne sont pas capables de s’exprimer. L’autre message, c’est pour le communautaire : « Faites nous de la place! » Johanne Gagnon
Je pense que dans ta question, il y avait une partie de la réponse. Comment est-ce qu’on agit collectivement d’abord? Avec les personnes qui le vivent, qui sont les mieux placées, pour nous le dire. Au début, tu as dit : « On est fâché. » Je pense qu’il faut être un peu fâché, pas trop. Il faut aussi se préserver pour être capable de continuer. Juste assez pour se dire que ce n’est pas normal de vivre comme ça. On ne devrait jamais trouver ça normal. Être fâché, mais travailler tout de même en dialogue et ensemble. Il faut que les ministères se parlent, que les gouvernements se parlent et que tout le monde travaille ensemble plutôt que d’avoir toujours une lutte de pouvoir. C’est long changé, mais il faut travailler en prévention, donc, deux mots clés: collectivement et en prévention. Marie-Hélène Vallée
Moi, je continue à croire au travail d’éducation populaire, au travail de mobilisation, de défense des droits. À partir d’où j’ai les pieds, j’essaie de former des alliés pour que les prochaines générations qui arrivent dans les organismes communautaires, ou ailleurs, qu’ils se positionnent comme des alliés par rapport aux personnes en situation de pauvreté. Marie-Hélène Deshais
Pour moi, étant une personne en situation de pauvreté à l’aide sociale, je suis d’accord avec Johanne. Il faut s’unir les uns, les autres. Pour les personnes assistées sociales, je dirais que ce serait de supprimer l’entièreté des dettes à l’aide sociale. Cela ferait vraiment du bien. Ce serait aussi de cesser de comptabiliser les dons et les héritages pour les personnes à l’aide sociale. Je terminerais en disant qu’il serait à peu près temps que le gouvernement se réveille et qu’il augmente les revenus de tous et chacun pour qu’on puisse vivre dignement en couvrant enfin ses besoins de base. Monique Toutant
Je pense que tout a été dit. J’aurais envie d’ajouter, mangeons les riches. Danielle Lambert
Nous le savons, nous devons continuer à rassembler plus de monde pour avoir la force de frappe nécessaire pour exiger des changements dont plusieurs ont été mentionnés. On vous lance maintenant la question à vous dans la salle : Comment on s’en sort ? À chaque table, un membre du CLAP va animer l’atelier. L’idée c’est d’écrire des réflexions et d’entendre les idées clés qui ressortent. MNB
Retour d’ateliers
* Nous, le mot qui est ressorti, c’est ensemble. Il y avait aussi, l’union fait la force, l’humain aussi revenait souvent dans les échanges.
* Nous avons parlé de réformer les lois sur l’aide sociale et de combattre les discours sur le mérite, d’écouter les personnes sur ce qu’elles veulent au lieu d’écouter l’argent. Faire la révolution. Tout ce que ça amène, c’est de changer des lois. Faire des lois par et pour le peuple et créer de nouveaux ministères. Au lieu du ministère de l’économie et de l’innovation, si on avait le ministère de la richesse collective, cela changerait les discours. Inspirez de Monique, il y aurait les trois saints : s’informer, s’indigner et s’impliquer. « On veut vivre, pas survivre! »
* On a parlé des lois et du mode de scrutin. Comment on participe à l’élaboration de la gouvernance? Rendre les lois plus compréhensibles et toute la question de l’éducation populaire et de la conscientisation. On a parlé de la répartition des richesses, de s’attaquer aux structures qui mènent à l’enrichissement et au règne de l’argent. Si les lois sont faites de façon à n’échapper personne, la couverture des besoins de base, le salaire minimum, ainsi une meilleure répartition coulerait de source.
* On a parlé qu’il fallait revenir à la solidarité comme principe de base pour répondre à tous ces enjeux. Arrêter de marchandiser les biens de base comme le logement, le transport, la nourriture, etc.
* Nous avons parlé de la place centrale des émotions, de l’indignation, le fait que nous soyons dans une situation où nous sommes épuisées collectivement. Il faut laisser une place aux sentiments. Il faut brûler d’être indigné et dire non à la pauvreté.
* Il est incontournable de passer par l’action politique pour lutter contre la pauvreté. Nous avons parlé de changement de loi par rapport à l’aide sociale et d’autres lois, de l’importance de travailler ensemble et d’élargir la lutte. Par rapport à la pauvreté, c’est aussi la classe moyenne qui est touchée. Il faut s’allier plutôt que de se diviser. Pour la justice sociale et climatique, il faut continuer de se mobiliser. Il faut aussi continuer d’aider les gens au quotidien et les accompagner, mais il faut agir sur les causes en même temps.
* Sensibilisation, travailler ensemble, communication, information, élargir les luttes entre les régions, revenus de base et redistribution par l’impôt.
* On a parlé de l’importance de soutenir les besoins de la vie, d’avoir des politiques sociales qui soient justes. Il y a un enjeu de politisation, de ramener le pouvoir au peuple.
* Nous réclamons un revenu de base pour tous et toutes qui couvrirait aussi les loisirs. Nous réclamons que l’accès aux services soit plus humain et avoir des intervenants qui comprennent l’ensemble des services. Nous avons une proposition d’un service civil qui visiterait les organismes communautaires pour sensibiliser les travailleurs et les travailleuses pour consolider la société.
* Nous avons parlé d’inclusion et d’accessibilité et que les droits sociaux soient améliorés par différents moyens.
Propos rapportés par Yves Carrier