#342 – Nous: Portrait de l’assistance sociale

Ce soir, nous recevons Robert Roussel et Marie-Josée Dupuis pour nous parler de l’exposition: « Nous: Portraits de l’assistance sociale ».

Bonjour, je m’appelle Marie-Josée Dupuis. Cette exposition parle des personnes qui reçoivent des prestations d’assistance sociale, des programmes d’assistance sociale et du vécu des personnes. L’idée de cette exposition est née d’une recherche que nous avons menée avec le professeur Normand Landry de l’Université TÉLUQ. Il y a environ 5 ans que nous avons commencé à collaborer avec lui à l’occasion d’une recherche partenariale entre le Collectif pour un Québec sans pauvreté et la Télé université du Québec, TÉLUQ.

Normand Landry s’intéressait à l’assistance sociale parce qu’il venait de faire une enquête pour le compte de la Commission des droits de la personne. Pour son 50ème anniversaire, la Commission voulait vérifier qui étaient les groupes de personnes les plus discriminés au Québec ? La recherche a mené un vaste sondage pour connaitre les préjugés de la population en générale envers certains groupes particuliers: personnes immigrantes, personnes racisées, personnes homosexuelles, etc. Cette liste incluait également les personnes vivant de l’aide sociale. À leur grand étonnement, ce sont ces dernières qui sont apparues dans leur liste comme étant les porteurs du plus grand nombre de préjugés dans l’ensemble de la population. C’était le groupe qui recevait le plus faible taux d’acceptation de la part des Québécois et Québécoises. MJD

Le fait que les personnes à l’aide sociale soient les plus stigmatisées socialement a été une grande révélation pour les chercheurs et chercheures. Nous au Collectif, on s’en doutait déjà parce qu’on est en contact constant avec la réalité des prestataires d’aide sociale. Autre fait étonnant, c’est que cette enquête a été menée à l’époque de la discussion sur la Charte des valeurs et où l’assistance sociale n’était pas à l’avant-plan dans les médias. Le débat public tournait autour des personnes immigrantes et de leurs religions. Malgré cela, c’est quand même les personnes à l’aide sociale qui sont ressorties comme étant les plus discriminées. C’est ce qui a été la bougie d’allumage du partenariat entre le Collectif pour un Québec sans pauvreté et la TÉLUQ. MJD

* Au sein même des familles québécoises, il y a beaucoup de bouc-émissaires et la raison principale c’est qu’ils vivent de l’aide sociale.

Monique et Éric ont aussi contribué à cette exposition et on les voit dans un autre aspect de cette réalité. Moi c’est Marie-Josée qui m’a appelé l’automne dernier pour me parler de photos qui avaient été prises de moi avant la pandémie en 2019 par Normand Landry. Ce dernier m’a demandé si j’étais intéressé à être le guide de cette exposition, rôle que j’ai accepté lors de l’exposition à Montréal. Ici à Québec, il y a certains modules qui ne seront pas présentés. C’est que l’exposition est très volumineuse. Par contre, vous avez deux opportunités pour la visiter. Dans un premier temps à la bibliothèque Monique-Corriveau sur la route des Église à Ste-Foy, puis pour les mois de juillet et août, dans le hall d’entrée de l’Assemblée nationale à Québec où tous les modules seront exposés.  Robert Roussel

Moi, Éric Lapointe et Robert Roussel, nous avons aussi participé à l’élaboration de cette exposition. Au départ, nous voulions qu’elle soit présentée dans les cégeps et les universités. Monique Toutant

La priorité actuelle, c’est de présenter l’exposition dans les musées, les bibliothèques municipales ou des centres communautaires assez grands pour l’accueillir. RR

Selon moi, les organismes communautaires sont déjà des lieux d’inclusion. Ce ne sont pas les endroits où l’on cherche à sensibiliser le public à cette réalité.  Il faut aller ailleurs dans l’espace public pour rejoindre la jeune génération. Je ne crois pas que les gens d’un certain âge vont changer d’idée. C’est plus difficile pour eux d’abandonner certains préjugés. Éric Lapointe

Pour certains, certaines, parmi vous, nous n’allons pas vous apprendre grand-chose ce soir parce que vous les connaissez déjà ces situations. Par contre, nous pensons que l’exposition peut servir d’outil de lutte aux préjugés. C’est pourquoi nous visons les endroits grand public comme les bibliothèques ou l’Assemblée nationale. L’idée étant de rejoindre des gens que nous ne croisons pas dans le communautaire. MJD

La Commission des droits de la personne est le troisième partenaire de l’exposition. Nous travaillons ensemble pour la faire rayonner partout au Québec et l’utiliser comme une arme pour combattre les préjugés. Évidemment, le format actuel ne convient pas pour des lieux plus petits ou pour réaliser des animations. Dans le format actuel, il y a beaucoup de façon de participer en utilisant des petits pitons en bois de différentes couleurs, en entrant dans une boîte aux préjugés, etc. C’est une exposition interactive en quelque sorte, ce ne sont pas juste des panneaux. Nous voulons trouver une façon de faire vivre cela pour que les organismes puissent l’utiliser après. MJD

Pour ce qui est de la présentation, c’est tellement volumineux qu’on ne peut pas l’envoyer par courriel. De plus, les images sont réservées pour l’exposition tant qu’elle va circuler du moins. Il y a aussi la question de l’anonymat de certaines personnes qui ne veulent pas être reconnues. RR

Le professeur Landry est allé rencontrer des groupes de personnes assistées sociales dans 7 ou 8 régions du Québec. Dont l’un d’eux où Robert était présent. C’est comme cela qu’il est devenu un porteur du projet. Normand a aussi photographié des portraits de certains volontaires. Certains ne souhaitaient pas être reconnus sur les photos. Il a aussi rencontré des intervenants pour comprendre la situation au niveau des politiques publiques, les enjeux et les obstacles liés à l’assistance sociale. Il a aussi réalisé deux sondages grand public, un pendant la pandémie et un autre après celle-ci, pour connaître l’opinion des Québécois sur les personnes assistées sociales et sur les programmes d’assistance sociale. L’exposition se base sur ces données pour construire son outil de lutte aux préjugés. MDJ

L’objectif de l’exposition était de donner une voix aux personnes assistées sociales, de les rendre visibles par les portraits entre autre et de faire comprendre leur réalité. L’assistance sociale se compose de quatre programmes: l’Aide sociale, la Solidarité sociale, le Revenu de base et Objectif emploi. Ceux-ci s’adressent à différentes clientèles, dixit le Ministère de la solidarité sociale, selon le type de contrainte à l’emploi que les personnes ont. Il y a l’état de santé, ceux et celles qui sont sans contrainte à l’emploi vont se retrouver à l’aide sociale. Le montant que le gouvernement leur verse est presque symbolique de 770$ par mois, ce qui ne leur permet pas de combler leurs besoins de base, ni de vivre dans la dignité. Il y a les contraintes temporaires à l’emploi qui reçoivent un chèque mensuel de 923$, ceux et celles qui sont reconnus comme ayant des contraintes sévères à l’emploi reçoivent une prestation de 1 205$ par mois pour une personne seule, pour un couple c’est 1 800$. Finalement, le Revenu de base de 1 548$ par mois permet de respirer un peu mieux après avoir vécu pendant 66 mois consécutifs sur le programme de contraintes sévères à l’emploi. MDJ

* Pour le plus bas revenu, cela représente moins de 10 000$ par année ? YC

* C’est 9 240$ par année. Ghislain Hudon

On peut y ajouter le crédit d’impôt pour solidarité et celui pour la TPS qui ajoute moins de 1 000$ à ton budget annuel. On est loin de ce qu’il nous faut pour la couverture des besoins de base selon la mesure du panier de consommation. Avec le Revenu de base qui est le double, on s’approche d’un niveau de vie décent sans y parvenir complètement. MDJ

Quand on parle de apte et inapte, cela cause encore un problème de nos jours. Quand j’ai commencé à militer en 2009, on se battait pour l’abolition des catégories à l’aide sociale et en 2023 ce n’est pas encore réglé. On devrait arrêter de faire des catégories. Le Revenu de base constitue de fait une nouvelle catégorie, mais ce n’est pas tout le monde qui y a accès. C’est injuste parce que le coût de la vie ne cesse d’augmenter et les gens n’arrivent plus à se loger et à se nourrir. Actuellement, je paie 650$/mois de loyer pour un 1 et demi. Si je n’avais pas eu le revenu de base, je mangerais mes bas pour souper. RR

Comme disait Robert, les catégories à l’aide sociale augmentent avec le temps. Il y a quelques années, nous avons eu l’ajout de la catégorie Objectif emploi pour les premiers demandeurs, et maintenant nous avons le Revenu de base. On divise toujours plus les gens selon leur niveau d’éloignement perçu du marché du travail, parce qu’on sait bien que les personnes dites sans contrainte sévère ne le sont pas toujours vraiment. Plusieurs peinent à se faire reconnaître les contraintes qu’elles ont. Ici, nous avons un portrait du nombre de personnes à l’aide sociale selon les données de janvier 2023. Cela a recommencé à augmenter alors que leur nombre décroissait depuis une vingtaine d’années. Il y avait 270 000 adultes qui recevaient des prestations d’assistance sociale pour les quatre programmes d’aide confondus, ce qui correspond à 5,4% des personnes âgées entre 18 et 64 ans. MDJ

* Il y a 30 ans, nous étions près du million de personnes.

Il y en avait  plus de 800 000 au début des années 1990. Le programme objectif emploi offre trois parcours d’insertion au marché du travail : 1) Développement des compétences, 2) Développement des habiletés sociales et 3) Recherche active d’emploi. La participation à ce programme offre une allocation supplémentaire pour couvrir les frais de déplacement et parce que tu es jugé plus méritant. Pour les premiers demandeurs, il est obligatoire de participer à ce programme. Sa durée est d’une année seulement. Si tu ne veux pas participer, tu as des pénalités. En réalité, ils n’en donnent pas souvent parce que couper 770$ c’est indécent. MDJ

* Le gouvernement et le ministère de la solidarité sociale a peur des critiques qu’ils pourraient recevoir de l’opinion publique.

Quel est le chiffre caché du nombre de personnes qui n’ont pas accès à l’aide sociale pour une quantité de motifs? Dans certains cas, c’est la famille qui supporte ses proches pour éviter le stigmate social. YC

Il y  des endroits où ils sont capables d’estimer ce chiffre. En France, ils ont une façon de calculer le non recours à des programmes comme l’aide sociale.  Ici, il n’y a pas vraiment de façon de calculer ça. MDJ

* Parfois j’ai l’impression que le Ministère crée la peur. Oui il y a des pénalités, mais ce sont des épouvantails pour que les gens embarquent dans les programmes d’employabilité. Éric

* C’est une bonne observation.

Selon vous, est-ce qu’il y a plus d’hommes ou de femmes, sur les programmes d’aide de dernier recours? Ce sont les hommes, 54% contre 46% pour les femmes. RR

Ce serait intéressant d’avoir une explication du chiffre et une mise en contexte parce que quand tu regardes les chiffres globaux de la pauvreté dans la société, les femmes arrivent en tête. Emilie

* Moi, je pense que les femmes sont plus instruites que les hommes, alors elles parviennent mieux à sortir de l’aide sociale.

En effet, cela pourrait être un facteur qui joue. La proportion s’est inversée au cours des dernières années. Il y avait beaucoup de femmes monoparentales. Sans doute que les allocations familiales, le régime québécois d’assurance parentale et les garderies subventionnées, les ont aidées à revenir sur le marché du travail. MDJ

La condition des familles avec enfants s’est améliorée à partir de 2005 environ avec de nouvelles politiques familiales. Cela a probablement donné une chance d’émancipation pour des femmes. Je pense qu’il y a plus d’hommes qui vivent seul que de femmes. Jean-Yves Desgagnés a travaillé fort sur la question de la pauvreté des hommes. La société est ingrate envers les hommes seuls. Vivian Labrie

L’aide financière de dernier recours, cela implique que tu dois liquider tous tes biens et avoirs avant de recevoir de l’aide. Si tu as droit à une pension alimentaire, il faut que tu l’aies demandée, si tu peux avoir du chômage, il faut que tu l’aies demandé, si tu as eu un accident de travail, il faut que tu fasses d’abord une demande à la CNESST. Toutes les autres possibilités où tu aurais pu aller te chercher de l’argent doivent avoir été épuisées. Il faut avoir pratiquement vidé son compte de banque, il faut d’abord épuiser ses ressources personnelles. Si tu possèdes une maison, elle ne doit pas valoir davantage que tel montant. C’est vraiment le dernier recours. MJD

* Les avoirs liquides de 887$, c’est un gain à quelque part. Avant cela, tu ne devais avoir rien. MT

* Une fois admis à l’aide sociale, tu as le droit d’avoir jusqu’à 1 500$ sur ton compte d’épargne. VL

Le taux d’assistance sociale dans la Capitale nationale est l’un des plus bas au Québec avec 3,4% âgé de 0 à 64 ans ce qui représente 20 327 personnes en date de janvier 2023, regroupées dans 16 800 ménages. MJD

* Pour l’assurance-chômage, Québec a le plus bas taux dans l’ensemble du Canada. Christian Loupret

Il y a souvent une forte corrélation entre les deux, l’aide sociale et l’assurance chômage se suivent beaucoup. Le gouvernement a souvent tendance à se féliciter de la baisse du nombre de personnes qui reçoivent des prestation d’aide sociale alors que dans les fait cela provient du taux de chômage et de la démographie, le vieillissement de la population fait en sorte qu’un grand nombre de personnes quittent l’aide sociale parce qu’elles ont atteinte l’âge de la retraite. MJD

 

Si on parlait de préjugés…

Êtes-vous capables de me nommer un préjugé qu’une personne vivant de l’aide de dernier recours reçoit?

* T’es un profiteur.

* T’es un lâche!

* Je me suis déjà fait traiter de grosse vache.

* Moi, de parasite.

* Fraudeur

Le plus méchant c’est : BS. C’est l’équivalent du mot N que je ne prononcerai pas. On est pas des BS. Ça me révolte quand j’entends cela. RR

C’est violent les mots que vous avez nommés.

* C’est ce qu’on entend sur les ondes des radios populistes.

C’est aussi le reflet de l’opinion publique.

Je me souviens d’une conversation que j’avais eue au Chili et j’entendais exactement les mêmes préjugés envers les personnes sans emploi. J’ai réalisé que c’était international. YC

* Vivre de l’aide sociale, c’est perçu par plusieurs comme si nous avions une maladie contagieuse. Alors la personne qui est à l’aide sociale est identifiée à une maladie, il ne faut pas que tu lui parles, c’est dangereux. MT

Cela montre comment les préjugés sont forts. Toutes les catégories dont nous avons parlé sont associés au marché du travail. Le montant que tu reçois dépend de ton éloignement du marché du travail. C’est perçu que si tu ne travailles pas, tu vaux moins d’argent parce que tu contribues moins à la société. Tout est basé sur cette idée. MJD

 

* On ne tient pas compte des difficultés pour plusieurs personnes de s’intégrer au marché du travail. Quand tu as des problèmes de santé, tu ne peux pas travailler. On ne remet jamais en question cet aspect. Martine Sanfaçon.

 

C’est pour cela que les personnes qui ne peuvent pas travailler reçoivent plus d’argent. Ce sont les bons pauvres. (Ironie) MJD

* Ça aussi c’est un préjugé, les bons et les mauvais pauvres. MS

* Je ferais une analogie avec les stéréotypes de genre, un homme doit être fort et ne jamais pleurer, le travail était dur et il ne fallait pas se plaindre. Ce sont des valeurs du capitalisme que nous avons intégrées et nous sommes devenus comme cela pour satisfaire le pouvoir de l’argent. Tous ces comportements irrationnels que nous avons acquis font tellement partis de nous que nous ne les voyons même pas. Ça nous est inculqué depuis notre tendre enfance et c’est répandu dans la société et on l’accepte sans se questionner, c’est même valoriser. CL

Tout à l’heure, je vous parlais d’un sondage grand public qui avait été fait pour les besoins de cette enquête sur les préjugés envers certains groupes de personnes. Dans l’exposition, on pose des questions sur ce qu’ils aiment ou jugent acceptable. On commence par les préférences politiques, puis les politiciens eux-mêmes, ensuite sur les BS qui ne reçoivent qu’une côte de 45% d’approbation. Puis, on leur demande que pensez-vous des personnes assistées sociales, et le taux monte à 51% d’approbation, alors que ce sont les mêmes personnes nommées autrement. On voit comment les mots sont importants. MJD

* J’ai un ami qui a fait de la prison et même incarcéré, il était victime de préjugés des autres détenus parce qu’il provenait d’un milieu défavorisé.

* Je vais vous nommer une autre forme de préjugé. Quand tu es handicapé et que tu reçois l’aide sociale automatiquement à partir de l’âge de 18 ans, c’est un préjugé favorable dans ce cas. Les gens pensent que ce n’est pas de l’aide sociale que nous recevons. Ils croient que c’est une subvention un peu comme pour les accidentés de la Société de l’assurance automobile. Je ne l’ai jamais dit clairement,  mais c’est souvent ce que j’ai entendu. Ça a toujours été une façon de nous séparer. Il y a de fausses croyances qui circulent à l’endroit des personnes vivant avec un handicap. ÉL

Dans l’exposition, il y a un endroit qui s’appelle la boite aux préjugés, parce qu’on ne voulait pas nécessairement que tout le monde soit exposé aux préjugés que nous avons nommés. Il y a aussi les résultats du sondage qui frappent. On a demandé aux gens quelle était la part du budget du Québec consacrée à l’assistance sociale? Ils ont répondu 21% du budget pour l’assistance sociale. Dans les faits, c’est seulement 3% du budget du Québec. La population se dit que c’est bien trop cher l’aide sociale alors que leur perception est fausse. Pour couvrir les besoins de base, on leur disait cela prend tant par mois. Combien vous donneriez aux personnes à l’aide sociale selon chaque catégorie ? Aux personnes sans contrainte à l’emploi, ils leur accordaient le montant actuel ou encore moins, tout en sachant que c’est loin d’être suffisant pour vivre. Certains  étaient d’avis qu’il fallait ne leur apporter aucune aide. MJD

Je trouve cela indécent de vivre dans une société riche qui colporte de telles valeurs. Quelle est la valeur d’une vie humaine ? Je suis prêt à laisser mourir de faim et de froid des gens en raison de mes préjugés sur la performance. Emilie

Tout à fait. Cela vient de ce que Christian nous parlait tout à l’heure. On a tellement intégré l’idée qu’il faut travailler fort. C’est la logique de ceux et celles qui disent : « On ne doit pas les aider parce qu’ils sont aptes à travailler. » MDJ

* Combien on donne aux riches par rapport à ce qu’on donne aux pauvres ?

* Cette année, le gouvernement avait une marge de manœuvre de 2 milliards de dollars qu’il a préféré donner en baisse d’impôt récurrent pour les plus fortunés au lieu de l’investir au bas de l’échelle dans le crédit pour la solidarité sociale pour assurer une meilleure couverture des besoins de base. Alors les écarts entre les riches et les pauvres se creusent davantage encore. VL

 

Petit quiz…

1– Quelle part des personnes assistées sociales a une contrainte sévère ou temporaire à l’emploi reconnue par le ministère de la Solidarité sociale?

1 sur 4

1 sur 2

2 sur 3

Réponse : La réponse est 2 sur 3. C’est le tiers des bénéficiaires de l’aide sociale qui sont dans la catégorie des sans contraintes à l’emploi.

 

2— Quelle part des personnes assistées sociales sont à la tête d’une famille monoparentale ?

9 %

24%

38%

Réponse : 9%

3—Quelle part des personnes assistée sociales sont des personnes seules ?

2 sur 10

4 sur 10

8 sur 10

Réponse : 8 sur 10

 

C’est pas mal difficile d’être en couple à l’aide sociale parce que tu te fais couper ton chèque ou bien le conjoint doit prendre à sa charge son amoureux, amoureuse. EFC

 

4—Quelle est le pourcentage des personnes assistées sociales qui sont chambreurs ou pensionnaires ?

22%

33%

44%

Réponse : 44%

 

* Vive les logements subventionnés.

* Actuellement, on détruit les maisons de chambres en Basse-Ville et ailleurs.

Cela démontre que les prestations sont insuffisantes pour se payer un logement. Presque la moitié des gens vivant de l’aide sociale vivent en chambre. C’est significatif 44%. MJD

L’allocation au logement est un montant supplémentaire que le gouvernement donne pour nous aider à payer les coûts du logement. Moi, je reçois 150$ par mois parce que je n’habite pas dans un HLM ou une coopérative d’habitation. Cette aide est pour les 50 ans et plus. RR

À 58 ans, le gouvernement leur attribue automatiquement une contrainte temporaire à l’emploi. VL

Les 55 ans et plus représentent le tiers des personnes qui reçoivent des prestations d’aide sociale. Alors, lorsqu’on entend le gouvernement qui veut les remettre au travail, on peut s’interroger sur la faisabilité de cet objectif. On ne sait pas grand-chose des propositions de réformes de l’aide sociale qui s’en vient à l’automne. Il n’y a pas grand-chose d’annoncer, mais on peut lire entre les lignes que ça risque d’aller vers l’incitation à aller sur le marché du travail. Les jeunes risquent d’être davantage ciblés. Sauf que les jeunes sont peu nombreux. MJD

 

Les services publics qui profitent à tout le monde…

Comme citoyens, citoyennes, nous bénéficions sans même nous en apercevoir de nombreux services tels que l’eau, les routes et les trottoirs, les parcs et l’école primaire et secondaire gratuite, le système de santé, d’inspection des aliments, le système judiciaire, les services de polices, d’incendie, les pensions de vieillesse, l’assurance automobile, la commission des normes du travail, les cégeps et les universités, etc., etc.

Souvent les gens croient qu’ils ne bénéficient aucunement du système, des différents paliers de gouvernement, parce qu’ils ne reçoivent pas de prestation directe. Pourtant, à tous les jours, nous marchons sur les trottoirs, nous empruntons les routes avec notre voiture, nous envoyons nos enfants à l’école, nous buvons de l’eau potable, nous vivons dans une société où nos droits sont reconnus. Même si on envoie ses enfants au privée, ces écoles sont subventionnées à 60%. La mise en commun de nos impôts nous permet d’avoir la société que nous avons. Tout le monde en bénéficie. Dans l’exposition, il y a un module avec plein de petits goujons de différentes couleurs  avec des petits points qui invitent les gens à prendre un goujon de chacun des programmes dont ils ont déjà bénéficié et de les situer sur un tableau. Cela fini par créer une mosaïque. Cela vise à faire prendre conscience que nous bénéficions tous et toutes au quotidien et au cours de notre vie de différentes formes d’aide de l’État sous forme de services ou de prestations. MJD

* Le Revenu de base est non seulement une catégorie à part à l’aide sociale, mais pour ceux et celles qui en bénéficient, il donne l’impression que ce n’est plus un programme d’aide sociale mais davantage une préretraite pour ceux et celles qui ne parviendront plus à réintégrer le marché du travail. De fait, il est déjà à part depuis 2018. Ce ne sont pas les mêmes règles qui s’appliquent. Cela fait 30 ans qu’ils veulent que les personnes inaptes ne soient plus gérées par le système de l’aide sociale. ÉL

* Ce qui est certain en ce moment, c’est que ce programme n’est pas géré de la même manière. Depuis qu’il y a le Revenu de base. Ce qui se disait ce matin à l’ADDS-QM, il y a une partie du Revenu de base qui est imposable. Ce ne sont pas des gros montants, et ce n’est pas une mauvaise chose que les gens paient un petit montant d’impôt. Ce sont comme des allers-retours puisque nous sommes dans le même système, mais il est clair que le traitement n’est pas tout à fait le même. Alors tu n’es plus vraiment à l’aide de dernier recours à ce moment là. Il y a une réflexion à faire là-dessus. VL

Actuellement, la ministre Rouleau parle d’une modernisation de l’assistance sociale. Il faut voir dans quel sens est-ce qu’elle veut faire cela ?  Nous n’avons pas tous la même conception de ce que c’est que la modernisation. Gardons l’œil ouvert. MJD

* Le Revenu de base est une forme de revenu minimal garanti tout comme le crédit pour la solidarité. VL

* Au fédéral, il y a le projet de loi C-22 qui accorderait un montant supplémentaire pour les personnes handicapées ou ayant des besoins particuliers. La difficulté c’est comment cela va-t-il s’accorder avec le Revenu de base du Québec ? J’ai assisté à une rencontre avec le gouvernement fédéral sur ce nouveau programme qui s’appelle DWP, Disability without porverty. Il y a eu des consultations et cet automne la loi devrait être adoptée. Il y a beaucoup d’enjeux. ÉL

Dans l’exposition, il y a un module où l’on voit la complexité des règles de l’assistance sociale. C’est pour nous aider à comprendre la complexité des calculs des prestations. Il n’y a rien à comprendre. Vous n’avez pas besoin de le lire, cela sert à illustrer l’absurdité de ses règles. MJD

Ce qui est aussi compliqué, c’est de remplir le formulaire de demande d’aide sociale qui devait être fait le 15 de chaque mois. Je ne sais pas si cette règle est toujours en vigueur? RR

* Ce n’est plus comme cela. Si tu as des changements dans ta vie tu dois les déclarer. MT

* Pour faire une demande en ligne, le formulaire n’est même pas accessible. GH

Il y a même des formulaires de réclamation comme ce fut le cas lors du verglas, dont les gens ignorent l’existence. Si vous manquez d’électricité pendant plus de 24 heures, vous pouvez demander cette aide pour compenser la nourriture que vous avez perdue. RR

* Pour obtenir le statu de contrainte sévère, cela prend un formulaire rempli par un médecin, sauf qu’actuellement, la plupart des gens que je connais n’ont même pas de médecin de famille. Comment on fait alors ? YC

* Les démarches qu’il faut faire pour acquérir ce statu sont très complexes. Cela m’a pris 3 ans avant d’être reconnue comme ayant une contrainte sévère à l’emploi. À tous les 3 mois, je devais retourner voir le médecin avec le fameux formulaire pour qu’il le remplisse et le signe. Au bout de 3 ans, j’ai eu une convocation à une rencontre téléphonique avec des agents d’aide sociale pour voir si j’étais admissible à la contrainte sévère à l’emploi. MT

C’est comme la maison des fous dans les Douze travaux d’Astérix. RR

* Actuellement, avec la production des rapports d’impôts, il ne faut pas se tromper pour cocher la bonne case à une question précise, sinon tu dois payer 123$ d’impôt. Alors je dois faire signer un papier du médecin à cause de cela pour être exempté. ÉL

On va voir quel est le type de réforme qui s’en vient. Nous avons fait une analyse au Collectif pour un Québec sans pauvreté que nous pourrions vous partager sur différents problèmes et irritants concernant le programme actuel d’aide sociale. Cette analyse est basée sur la loi et ses différents règlements. Les avoirs liquides et les gains admissibles n’ont pas été indexés depuis plusieurs décennies. De plus, plusieurs problèmes dans la loi demeurent invisibles comme par exemple la difficulté de trouver le formulaire ou simplement de savoir que c’est possible de réclamer de l’aide, la difficulté de parler à un agent d’aide sociale ou de faire un suivi sur ton propre dossier. Comment comprendre le formulaire qui est beaucoup trop compliqué pour de nombreuses personnes qu’on accuse ensuite de fausses déclarations. MJD

* De plus en plus, il y a une fracture numérique avec le gouvernement en ligne. EFC

* Il n’y a plus d’agent attitré à chaque prestataire de l’aide sociale. ÉL

Le document sera présenté en assemblée générale du Collectif la semaine prochaine. Comme nous ignorons ce qu’il va y avoir dans la réforme de l’aide sociale, nous avons décidé de faire l’analyse des principaux problèmes que nous connaissons et de parler avec les différents groupes de base pour connaître les angles morts que nous ne voyons peut-être pas à partir des différentes situations de vie. Ce sont des irritants qui proviennent des règlements et de la loi ou encore du fonctionnement du système lui-même, l’attitude des agents, la difficulté de faire reconnaître les contraintes sévères à l’emploi, toutes les formes de prestations dont on ignore l’existence. C’est très difficile de faire un suivi sur son dossier parce que ce n’est jamais le même agent qui te répond au téléphone. MJD

Pour moi, être sur l’aide sociale, c’est un obstacle parce que si demain matin un employeur m’appelle pour m’offrir un emploi. Si j’accepte et qu’au bout de quelques semaines, je suis remercié, est-ce que je devrais recommencer du point de départ mon admission à l’aide sociale, puis le reconnaissance des contraintes sévères avec lesquelles je vis, pour ensuite attendre 66 mois avant de pouvoir revenir au revenu de base? Vous voyez la complexité de la chose. C’est préoccupant, même si j’ai appris aujourd’hui qu’on nous accorde 6 mois pour réintégrer le marché du travail sans perdre nos acquis à l’aide sociale. Je demeure avec une certaine crainte si mon état de santé se détériore au bout d’une année par exemple, je vais me retrouver à la case départ. RR

* Il manque de fluidité dans le système d’aide sociale qui empêchent les gens de quitter le programme par peur de ne pas être réadmis. Plusieurs personnes ont des problèmes de santé cyclique qui reviennent après un certain temps. YC

Le système fait en sorte que c’est prendre un risque que de retourner travailler si on n’est pas certain d’y demeurer. Ce n’est pas fait pour que cela soit fluide et que tu puisses travailler à temps partiel par exemple. MJD

* Ce qui est spécial avec le Revenu de base, c’est que pour l’obtenir il faut être considéré comme ayant une très grosse contrainte à l’emploi, mais en même temps tu as le droit de gagner beaucoup plus d’argent, 11 000$/année. Il y a là une contradiction. Dans le fond, cela revient à dire que si on accepte cela pour des personnes qui ont des contraintes à l’emploi, qui gagnent l’équivalent de leur chèque de Revenu de base, pourquoi on n’accepterait pas la même chose pour les personnes aptes au travail ? Je pense qu’il y a là une base argumentaire pour finir par convaincre les décideurs politiques. VL

* À l’ADDS-QM, nous revendiquons que les gains permis de 200$ par mois soient augmenté jusqu’au montant du chèque qu’une personne reçoit avant qu’elle ne soit coupée. C’est ce que nous avons dit à la ministre quand nous sommes allés la rencontrer. MT

* C’est un gain pour le gouvernement parce que cette personne va dépenser ce qu’elle gagne et elle va payer des taxes. Cela ne lui coûte rien. GH

* Quand tu dis qu’on peut gagner plus, mais tous les programmes et tous les projets de recherche auxquels nous participons, nous recevons des compensations financières. ÉL

L’exposition se termine par l’implication des gens qui vivent de l’aide sociale. Cela permet d’exprimer la fierté des gens qui s’engagent et cela est inspirant. Il y a un livre des fiertés. Moi je suis fier de mon bénévolat, moi je suis fière d’avoir élevé mes enfants, moi je suis fier d’être en vie. MJD

Il y a aussi une manifestation prévue le 23 mai prochain pour exiger un Plan de lutte à la pauvreté qui en soit vraiment un. MJD

Un grand merci à Marie-Josée Dupuis et Robert Roussel pour leur présentation.

Propos rapportés par Yves Carrier

 

Photos de la grande manifestation du 23 mai 2023 à Québec

Crédit : Collectif pour un Québec sans pauvreté

 

 

 

 

 

 

 

 

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