Naissances et renouveau
Bonsoir, bienvenu à cette soirée mensuelle du CAPMO qui a lieu sur Zoom. Nous allons commencer par un tour de table pour nous présenter en nommant notre lieu d’engagement ou notre intérêt à participer à cette soirée qui a pour thème « Naissances et renouveaux ».
* Gérald Doré, membre du CAPMO et pasteur retraité et auparavant, professeur universitaire, sociologue et organisateur communautaire.
* Monique Toutant, militante à l’Association de défense des droits sociaux du Québec métropolitain, ADDS-QM. Membre du Comité consultatif de lutte à la pauvreté et à l’exclusion sociale, la lutte à la pauvreté est quelque chose qui me tient énormément à cœur. Je suis ici ce soir parce que j’ai envi de voir du monde. La nostalgie des fêtes me gagne parfois, je me suis dit que cela me ferait du bien de jaser avec d’autres.
* Joanne Laperrière, présidente du CAPMO depuis quelques mois et c’est mon principal lieu d’engagement social. Je suis ici parce que j’ai un grand besoin de la communauté, d’échanger avec d’autres et d’avoir du monde autour de moi. La période actuelle n’est pas facile, alors voir des sourires et des visages cela fait du bien.
* Fernand Dorval, membre du conseil d’administration du CAPMO ainsi qu’au Réseau du Forum social de Québec et de Chaudière-Appalaches. Je suis ici pour faire un renouveau à l’occasion de Noël et pour renouer avec certaines personnes présentes ici ce soir.
* Fernand Dumont, écologiste près de la retraite, je travaille en usine. Mes convictions sociales me viennent de mes ancêtres. Lorsque mes enfants étaient jeunes, je n’avais pas le temps de m’impliquer autant que maintenant. J’habitais en banlieue et j’ai commencé à réfléchir à des lieux possibles d’implication. C’est à Développement et Paix que je me suis impliqué, que j’ai connu Yves Carrier et le CAPMO. Aujourd’hui, je suis impliqué localement dans le comité de citoyens du Vieux Beauport, Croque ton quartier. Ce comité est formé de jeunes familles. Voilà en gros mes lieux d’insertion. Je suis ici ce soir parce que j’aime rencontrer des gens toujours très différents.
* Claude Garneau, je m’implique dans différents groupes comme le CAPMO, l’ADDS-QM, le Comité de citoyens et de citoyennes de Saint-Sauveur, le REPAC 03-12, l’Engrenage. Depuis au moins 25 ans, je m’implique dans de nombreux groupes communautaires.
* Daniel Desrosiers, je suis un retraité du milieu industriel. Je suis ici par curiosité. J’avais déjà assisté à quelques rencontres du CAPMO avant la pandémie. Le thème m’intéresse en plus. Je suis intrigué de connaître ce que les gens vont apporter comme objet significatif. J’aime aussi écouter les discussions que je trouve toujours très intéressantes au CAPMO.
* Robert Lapointe, membre du CAPMO depuis 2001, 2002, environ. J’avais participé à une activité organisée autour du 11 septembre 2001 et je m’y implique depuis ce temps-là.
* Juliette Ouellet, membre de CAPMO depuis 1993. Je suis toujours heureuse d’être membre, mais j’ai moins l’occasion de participer à cause de mon âge. Zoom me permets de participer à partir de chez-moi sans avoir à me déplacer. Je suis intéressée par ce qui se passe au CAPMO, la défense de la justice et des droits sociaux. Cela me parle au cœur. Je ne peux pas faire grand-chose, mais cela va me tenir jusqu’à la fin. Je suis rendue à 95 ans. J’ai toujours le cœur en feu lorsqu’il est question de justice sociale.
* Martine Sanfaçon, membre du CAPMO. Cela fait longtemps, mais je n’ai pas toujours été présente. Je suis retraitée de la pastorale et du métier d’infirmière. Je m’implique à Québec Solidaire, à Développement et Paix, ainsi que dans d’autres organismes comme une table de quartier. Le thème de ce soir m’intéresse énormément. Je suis contente d’être avec vous.
* Yves Bédard, moi aussi je suis retraité de la pastorale. Je suis membre du CAPMO depuis une trentaine d’années, même si ma participation a été très irrégulière. Nous avons plusieurs implications communes, notamment à la table de quartier, « Les incroyables comestibles ».
* Renaud Blais, l’une des activités dont je suis le plus fier, c’est le jardin communautaire que nous mettons sur pied à Ste-Foy avec le Centre culturelle islamique et la fabrique catholique et des citoyens de diverses croyances et incroyances. C’est situé à l’église Saint-Matthieu à Ste-Foy sur le boulevard des Quatre-Bourgeois. Cela me fait plaisir d’être là parce que j’ai toujours aimé l’ambiance au CAPMO, avec le respect des opinions de chacun et chacune.
* Robert Roussel, je vis à Montréal après avoir quitté Québec il y a quatre ans. Je suis toujours membre malgré la distance. Avec Monique, j’ai contribué à fonder le Collectif TRAAQ pour une tarification sociale du transport en commun à Québec. Le CAPMO représente une grande famille dont je m’ennuie parfois. Je m’implique à Montréal à l’ALV, Association des locataires de Villeray et à l’ACEF du Nord comme administrateur. C’est ma façon à moi de passer à travers la pandémie en siégeant par zoom sur des conseils d’administration. Je participe aussi aux activités d’ATD Quart-Monde.
* Mario Gil Guzman, employé au CAPMO, responsable au recrutement, à la mobilisation et aux relations interculturelles. Cela fait longtemps que je connais le CAPMO. Je viens de Colombie, et neuf jours avant Noël, nous avons coutume de nous réunir avec les voisins et la famille pour chanter ensemble dans la rue. Les théologiens de la libération travaillaient beaucoup à écrire des histoires, des récits, qui nous parlaient de justice et de solidarité, de l’amour, pour exprimer différents moyens de construire la communauté en solidarité avec les pauvres, ceux qui subissent les injustices.
* Éric Lapointe, je suis membre du CAPMO depuis 2014. Je suis une personne handicapée et je suis impliqué dans plusieurs organismes dans la ville de Québec dont le Collectif pour un Québec sans pauvreté. Je viens ici ce soir pour rencontrer les gens.
* Emilie Frémont-Cloutier, je travaille au CAPMO comme animatrice du Collectif TRAAQ.
* Claudia Fuentes, je suis une ancienne membre du CAPMO qui n’a pas participé aux activités depuis longtemps. J’ai toujours porté ce groupe dans mon cœur. D’autres avant moi ont mentionné le mot famille. Pour moi, revenir participé aux activités du CAPMO, c’est un retour vers une famille d’une certaine façon. Cela représente la grande famille de ceux et celles qui se sentent solidaires des autres humains et qui souhaitent construire un monde meilleur. Le CAPMO, ce serait comme la famille nucléaire. Dans ma vie quotidienne, avec tous ses défis, c’est difficile de participer, mais cela me manquait beaucoup. Je suis très contente d’être avec vous.
* Francine Bordeleau, membre du conseil d’administration du CAPMO et au journal Droit de Parole.
* Gabriella Mamrick, j’ai participé à la rencontre du mois de novembre sur la Colombie.
* Chantale Coulombe, coordonnatrice du Carrefour d’éducation à la solidarité internationale de Québec, CÉSIQ.
* Yves Carrier, coordonnateur du CAPMO depuis la fin de l’année 2009. J’aime mon travail puisqu’il s’agit d’un espace de création extraordinaire dans lequel je rencontre plein de gens intéressants.
Alors le thème de ce soir s’intitule : « Naissances et renouveau ». Au CAPMO, à chaque année, nous avons le défi de parler de Noël sans nous répéter, alors nous essayons de renouveler le sens de cette fête. Nous avons abordé Noël par rapport à la consommation, au partage, à la transmission des traditions, à la mémoire, à la paix dans le monde, à l’accueil des réfugiés. Cette année, le thème nous est apparu évident parce qu’Emilie nous quitte bientôt pour un congé de maternité. Mais comme ce n’est pas tout le monde qui va avoir un enfant, nous avons ajouté « renouveau » parce que chaque naissance représente quelque chose de nouveau qui arrive dans le monde, cela change la vie de ceux et celles qui ont le bonheur d’accueillir un petit être dans leur foyer. En équipe, nous avons aussi pensé demander aux participant-e-s d’apporter avec eux un objet qui représentait pour eux une période de renouveau qu’ils ont vécu dans leur vie. D’habitude lorsqu’on demande cela, la moitié des gens oublient l’objet en question chez eux, mais grâce à Zoom, vous n’avez plus d’excuse puisque vous êtes chez-vous. Comme nous voulons être dans le positif, nous vous demandons de nous présenter un objet qui représente un tournant positif dans votre vie où les portes se sont ouvertes devant vous. YC
Comme Yves l’a présenté, j’attends un bébé pour le mois de mars. Je n’ai pas beaucoup de recule. Quand j’ai appris cette grande nouvelle, cela m’a demandé d’accepter une perte de contrôle. Je suis en lien avec ma vulnérabilité et je sais que le petit être qui s’en vient va chambouler ma vie, mais de manière positive. Tu perds le contrôle sur le temps et sur le fait de chercher à tout contrôler. Il y a une sorte de lâcher-prise qui est bon. Je vais beaucoup apprendre sur la vie en général et sur certains aspects de la solidarité et de l’engagement. L’objet que j’ai apporté, c’est une doudou de bébé. Cela représente à la fois le passé et l’enracinement, de même que la transmission et l’avenir. C’est la doudou de mon conjoint que ma belle-mère m’a offerte. Pour moi cela signifie la transmission qui est garante d’avenir. Cela veut dire que pour construire l’avenir et aller de l’avant, je pense que nous avons aussi besoin d’enracinement dans le passé et dans les relations. Je pense que toutes les renaissances et les renouveaux dans la vie, cela ne peut pas se vivre seul. C’est en relation que cela se vit. Un enfant pour s’épanouir a besoin de beaucoup de relations et de rencontres humaines et de grandir là-dedans. C’est la réflexion que je souhaitais vous partager ce soir. Emilie Frémont-Cloutier
Merci Emilie, je sens que cela va être très riche comme réflexions. (YC)
* Moi, mon objet, c’est ma caméra vidéo sur l’ordinateur. Je vois la pandémie comme un gros avertissement adressé à l’espèce humaine. Nous étions rendus là, c’est juste qu’il nous manquait un impératif pour agir. Hier, j’ai participé à une rencontre où il y avait des gens de partout dans le monde. C’est « Initiative et changements » qui faisait un bilan. C’est fantastique. Les théâtres, par exemple, qui enregistrent leurs présentation et qui vendent cela sur le web et les gens peuvent y assister de n’importe où dans le monde. C’est prometteur et très écologique aussi. Pour moi, Noël représente le retour de la lumière après le solstice d’hiver. Bonne soirée à vous.
Voici les photos de mes enfants. Je suis très fier d’être père. Quand on pense aux enfants, on pense aux relations qu’ils vont avoir et où cela va-t-il les mener ? Il y a un récit autochtone qui raconte pourquoi les femmes de cette communauté portaient leurs enfants sur leur dos lorsqu’elles se déplacent en forêt en leur faisant regarder vers l’arrière pour qu’ils assimilent que le futur est derrière nous et qu’il se trouve aussi dans l’histoire. Chaque naissance, c’est aussi se rappeler qui on est. Mes enfants reproduisent ce que je leur apprends. Qu’est-ce que j’appris de mon éducation et de mon expérience? J’aime beaucoup réfléchir sur le concept de territoire. Quand on aborde cette question, on s’interroge sur comment les ancêtres ont appris à survivre avec les ressources disponibles sur ce territoire. Quelles sont les relations qu’ils ont connues et qu’ils nous ont transmises ? Les anthropologues parlent que sur la côte du Pacifique, les ancêtres construisaient des canots à partir de l’arbre de caoba et qui les utilisaient pour aller pêcher. Alors lorsqu’on détruit l’environnement d’un territoire, on détruit également un mode de vie et une culture. On détruit non seulement la terre, mais les savoirs-faires associés et c’est aussi en quelque sorte, mettre fin à une histoire humaine. Pour moi, la naissance consiste à récupérer notre lien avec le vivant. Alors le futur sera la récupération du lien avec le vivant. C’est l’opposé du concept de développement prôné par les sociétés industrielles. Ce concept nous a mis en échec parce qu’il déconsidère les espaces naturels non transformés par la main de l’homme. Le retour aux équilibres naturels, c’est la naissance dont nous avons besoin. Mario Gil
* Moi, j’ai deux objets parce qu’il y a deux moments qui ont été charnières dans ma vie. Le premier, c’est la Bible en portugais, édition pastorale du Brésil où j’ai vécu une expérience missionnaire de trois ans en Amazonie avec mon conjoint. Je ne peux même pas imaginer ma vie sans cette expérience fondatrice. La rencontre de ce peuple m’a transformée et cela continue d’avoir de l’effet sur moi. Comme on dit souvent, tu peux sortir du Brésil, mais le Brésil ne sort pas de toi. L’une des choses que j’ai ramenée et qui m’interpelle, c’est cette bible dont les commentaires de bas de page font toujours le lien entre la vie quotidienne et la justice sociale. Nous sommes demeurés avec cet esprit alors lorsque nous la lisons, nous nous replongeons dans ce vécu et nous essayons de faire le lien avec notre expérience actuelle. Nous sommes revenus avec un trésor. L’autre objet que j’ai amené, c’est un plat d’enfant de Carmen Campagne. Cela représente nos filles qui mangeaient dans ce plat lorsqu’elles étaient petites. Une chose importante dans ma vie, c’est d’être mère. Cette expérience a été transformatrice. Je te salue Emilie. Aujourd’hui, elles ont 22 ans et 24 ans et nous sommes encore transformées par elles. Même si elles sont des adultes et qu’elles sont parties de la maison, nous apprenons encore à être parents. Une chose que Jacques Bélanger m’avait dite lorsque j’étais enceinte: « Cet enfant que tu portes ce n’est pas seulement le tien, mais c’est aussi le nôtre. » Ça aussi, c’est important à savoir. Il y a une communauté qui porte aussi cet enfant avec toi. De sorte que chaque enfant amène avec lui un paquet de relations. Les enfants nous apprennent tout le temps des choses, à chaque étape de leur vie, ils nous font cheminer et grandir. Il n’y a rien au monde qui me rend aussi fière que d’être mère. Alors ce sont ces deux expériences qui ont été transformatrices pour moi et je me sens privilégiée. Tu vas voir Emilie que Noël ne sera plus jamais pareil à partir du moment où tu deviendras mère.
* Merci pour ces bons mots Martine, cela me touche. EFC
* J’ai apporté un livre que Vivian Labrie a publié en 1994 et qui s’intitule : « Les trois princes, voir plus clair à partir des pauvres ». C’est un livre qui a été écrit à partir d’un conte traditionnel recensé par les Archives folkloriques du Québec. Vous saviez que Vivian était ethnologue et elle a demandé à quelques militant-e-s de nous situer dans le conte. L’histoire parle de trois princes: le prince blanc, qui serait l’équivalent d’un bureaucrate manipulateur, il y a le prince étudiant qui serait le prototype de l’intellectuel déconnecté et le prince des pauvres. En réalité il n’est pas pauvre, mais il est leur allié. Elle nous demandait de raconter un épisode significatif qui pourrait correspondre à « Naissances et renouveau » qui étaient survenus dans notre vie. Moi, j’étais très terrain lors d’événements qui se sont produits à la fin des années 1960 dans le quartier Saint-Roch. J’ai été surpris de retrouver des bouts de cela sur le nouveau site web du Mouvement du christianisme social au Québec du Centre justice et foi. Je présente le quartier et l’action du curé Lavoie. Après cet engagement, je ne pouvais plus me trouver du travail parce que mon nom était brûlé en tant qu’agitateur social du point de vue des notables de la ville. Comme j’avais beaucoup étudié, j’ai déniché un poste à l’École de travail social de l’Université Laval. Ensuite, j’ai perdu peu à peu le contact avec le terrain même si j’étais un peu un corps étranger dans le milieu académique. Heureusement, j’avais beaucoup théorisé Paulo Freire. Dans le conte populaire, la rencontre déterminante, c’est celle avec une femme pauvre. Moi, j’ai rencontré des femmes assistées sociales engagées avec une militante à Montréal. La caractéristique de ces femmes, c’est qu’elles avaient tellement cheminé qu’elles étaient devenues des personnes ressources pour la formation des personnes assistées sociales et de leurs alliés y compris les intellectuels. Cette rencontre m’a permis de renouer avec la pratique. C’est de cette expérience qu’est né le Collectif québécois de conscientisation dans lequel j’ai été actif pendant des années. Ce Collectif a existé pendant 40 ans, jusqu’en 2017. J’ai retrouvé un peu de cet esprit au CAPMO, mais il fait aussi retravailler pour faire en sorte que lorsqu’il y a des rencontres, ce ne soit pas juste les princes étudiants qui prennent la parole, mais aussi les personnes qui vivent les situations, qui ont le savoir du vécu, puissent être habilités à devenir elles aussi des personnes ressources dans la démarche d’éducation populaire et de défense collective des droits. Cela serait un renouveau au CAPMO et un retour aux sources.
* Pour moi, cela va être bref. Il y a environ deux ans, Jim Sheppard a demandé à Yves de lui trouver quelqu’un pour lui traduire en français l’essai qu’il avait écrit dans le passé sur son expérience de communautés de base à Toronto et à Victoria. Ce n’est pas un livre de recettes, c’est le récit d’une expérience. Finalement, lorsque j’étais sur l’assurance chômage, je me suis amusé à traduire ce petit livre et nous venons de l’éditer à compte d’auteur. La traduction est un travail très respectueux où l’on essaie de se mettre dans la peau de l’auteur. Dans le texte, j’ai retrouvé plein de choses de mon cheminement et de celui des groupes. Le livre s’adresse à tout le monde et nous le distribuons gratuitement en format pdf sur le web. La spiritualité, c’est universel. C’est sûr que le livre a été écrit par un jésuite, donc un chrétien catholique, mais il l’a écrit de manière à ce qu’un laïc s’y retrouve. Par exemple, des cercles de parole, il a vécu cela au Brésil et en Colombie-Britannique. Ça a été mon expérience pendant la pandémie où j’ai appris à faire un livre, édition et mise en page. Alors il est disponible sur le site de la Bibliothèque nationale du Québec : Le Verbe est des nôtres, spiritualité et communauté, Manuel d’inspiration en temps de crise, Jim Sheppard s.j., ISBN : 978-2-9819446-0-3, dépôt légal 2020. Pour Jim, l’histoire n’est pas linéaire, c’est un faisceau de relations en perpétuel mouvement, c’est-à-dire qu’on peut vivre le présent de quelque chose qui est arrivé il y a 2000 ans. Noël, c’est la naissance du Verbe fait chair. C’est un texte théologique, mais écrit dans la vie concrète du monde ordinaire et quand des gens ordinaires commencent à se donner avec l’inspiration du Verbe dans leur contexte social, c’est extrêmement puissant. C’est un livre pour s’inspirer et pousser en avant. Le point faible du livre, c’est écrit seulement par des hommes. Il faudrait que les femmes écrivent un pendant féminin à ce livre.
* J’avais l’intention de vous parler de quelque chose qui m’a fait voyager dans la vie. C’est une canne à pêche qui m’a permis vivre des expériences et de découvrir des endroits merveilleux dans la nature. Par contre, ce qui m’a permis de voyager sans bouger de ma chaise, c’est une bible. Sa lecture me touche énormément. Je n’ai jamais été un grand lecteur et il y a beaucoup de choses que je lis dans la Bible que je ne comprends pas. Il y a des choses qui me fâchent ou qui me réconfortent. Je suis dans une position d’ignorance parce que j’ignore tout de la religion. Alors lire la Bible, cela m’ouvre à plein de choses. C’est ce que je souhaitais vous partager.
* Je suis émue par tout ce que je viens d’entendre, des témoignages de personnes qui nous aident à grandir. Tout ce que vous avez dit est venu me toucher. Je vais vous parler de la petite feuille qui pousse à travers les chardons, les roches et l’asphalte. Toute cette vie qui grandit me parle énormément. Cela prouve comment la vie est forte et qu’elle nous entraîne. Dans toute vie, je pense qu’il y a des moments difficiles à traverser, mais on finit toujours par sortir la tête de ces pierres ou de ces ronces. Ce qui me parle beaucoup aussi, c’est celle du semeur qui sème puis quelqu’un de méchant est venu répandre des graines d’ivraie après lui. Jésus recommande de laisser pousser les deux ensembles, le bon grain et l’ivraie pour les départager au moment de la récolte. Quand j’ai vu le thème de la rencontre mensuelle : NaissanceS et renouveau, Jésus, c’est la naissance de quelqu’un qui apporte un renouveau spirituel pour l’humanité. Dieu sait comment cela a été difficile au début parce qu’Hérode a fait mourir combien d’enfants pour l’éliminer? Ensuite, il a passé toute sa vie à affronter des difficultés et cela l’a mené à la croix qui semble un échec. Pour les croyants, trois jours après il est ressuscité et c’est encore la vie qui triomphe. C’est à cela que je réfléchissais dernièrement. Tout à l’heure, nous avons parlé de la Bible dont on ne comprend pas toujours le sens de ses écrits. Mais il arrive des moments dans la vie où certains passages s’ouvrent à notre intelligence en fonction de ce que nous vivons. Cela ressemble à ce que je vis présentement, mais il y a de l’espoir et au bout, il y a la victoire. Je félicite Emilie et je partage tout ce que Martine a dit. Cet enfant va appartenir à notre communauté, il va être le bébé de CAPMO.
* Ma vie n’a pas été un long fleuve tranquille, ce n’est pas une continuité et j’ai vécu de nombreuses ruptures et des brisures. Il y a eu des moments difficiles, mais il y a toujours eu comme Juliette l’a dit : la petite pousse qui a émergé. Ça a parfois été des coupures qui ont été volontaires de ma part. À un certain moment, il y a eu une situation difficile de laquelle j’ai du m’extirper assez rapidement. Je me suis retrouvée à vivre des difficultés importantes avec ma petite famille. Après avoir surmonté cette épreuve, j’ai pris toutes mes économies et je dis à mes enfant nous célébrons une période de renouveau. Nous sommes partis au Pérou, mes deux adolescents et moi, avec de minuscules sac-à-dos. Ils parlaient un peu espagnol, donc ce sont eux qui communiquaient avec les Péruviens pour trouver le gîte et la nourriture. Nous avons rencontré des familles là-bas et ce voyage a représenté le coup d’envoi d’une nouvelle autonomie pour tout le monde. Nous n’avions jamais voyagé et nous sommes partis à l’aventure. Tout le monde disait que nous étions fous, mais parfois pour vivre le renouveau, il faut oser vivre une expérience hors du commun. Il faut oser une nouvelle naissance, oser un nouvel emploi. Alors nous l’avons fait et cela nous a fait énormément grandir. Comme j’avais un tout petit sac-à-dos, je ne pouvais pas ramener grand-chose. Les petites figurines de la crèche que j’ai ramenées du Pérou sont les seuls objets qui ont survécus à tous mes déménagements. Nous étions partis à la période des fêtes et les crèches étaient omniprésentes partout où nous allions. C’est pourquoi j’en ai ramené une, sauf qu’à ce moment de ma vie, je n’étais pas impliquée dans une démarche spirituelle. Étrangement, quand nous sommes revenus ici, nous avons regardé nos photos et il y avait des crèches partout. Cette période correspond au début de mon éveil spirituel. Il y a comme une superposition de sens par rapport au renouveau qui était désiré. J’étais partie à la recherche de quelque chose, à un changement de voie dans tous les sens. Le message que j’aimerais dire ce soir c’est : pour que le renouveau, que la petite pousse parvienne à percer à travers l’asphalte, il faut avoir le courage d’oser. Emilie, vous avez osé et il y a quelque chose de magnifique dans chaque naissance et je vous souhaite tout le bonheur du monde. C’est vrai qu’être mère, c’est ce qu’il y a de plus beau.
* J’ai apporté deux choses. L’une dont je n’ai pas de photo, ma filleule. Quand elle es née, ça été quelque chose de particulier et de très spécial. Au départ, quand mon frère m’a demandé d’être la marraine de cette enfant, j’ai refusé cette responsabilité. Je ne me croyais pas être capable d’assumer ce rôle, mais comme mon frère insistait, j’ai fini par accepter. Quand je suis allée voir ma nièce à l’hôpital et que je l’ai prise dans mes bras, elle a transformé ma vie par l’amour qu’elle m’a communiqué. Je vivais alors une impasse, une situation difficile, et lorsque je l’ai eu dans les bras, j’ai eu une conversation particulière avec elle. Aujourd’hui encore, quand je ne me sens pas bien, je me mets à penser à elle et cela me redonne du courage. L’autre objet, c’est ma carte de membre du CAPMO, parce que mon implication dans les organismes communautaires m’a permise de grandir. Le fait de militer, d’apporter mon point de vue, d’apprendre des autres aussi, c’est important dans ma vie. C’est précieux pour moi parce que cela me permet de continuer d’apprendre des choses nouvelles, de partager aussi et c’est très important pour moi.
Merci Monique pour tes nombreux engagements. Tu es connue, tu es une personne publique. On te voit souvent dans les journaux, à la radio, à la télé même parfois. Dans les soirées publiques, tu te lèves et tu prends la parole pour poser des questions avec conviction et détermination. Je suis en admiration devant ce que tu fais, c’est beau de te voir aller et je t’en remercie. YC
* Je ne trouve rien d’extraordinaire à dire après tout ce que les autres nous ont partagé. Personnellement, le mot renouveau m’inspire beaucoup avec l’année que nous venons de vivre. J’ai l’espoir et la conviction que nous allons renaître de nos cendres, tel un phœnix. Je ne sais pas pourquoi je sens cela. Quand je regarde l’année que nous venons de passer, j’observe beaucoup de gris. Les objets que j’ai choisi de vous montrer, c’est mon pot de pinceaux parce que c’est ma façon de ramener la couleur dans nos vies. Avec le confinement, j’ai décidé de reprendre le dessein et la peinture. Cela m’apporte plein de couleurs et de joies. C’est un renouveau qui me permet de communiquer à nouveau avec un plaisir que j’avais quand j’étais plus jeune. La pandémie nous a permis de nous rappeler des choses qui nous avions oubliées. C’est sans doute l’un des bons côtés de ce que nous vivons depuis neuf mois. Mes autres objets, ce sont des petites figurines que j’ai achetées au Mexique où j’ai vécu six mois. Cela avait été une période de renouveau pour moi qui m’avait reconnecté avec mon amour de l’art. Ce sont des reproductions des artefacts de l’époque olmèque ou toltèque. Ces objets représentent une civilisation très ancienne. La statuette du chien a un maïs dans la bouche et j’ai eu la chance de célébrer la fête du maïs lorsque j’étais là-bas et je trouvais que c’était une excellente représentation du renouveau parce que cela évoque le retour des moissons.
En effet, le Mexique représente une culture très riche et cet héritage témoigne de la présence de civilisations très anciennes sur notre continent. YC
* Je ne sais pas trop comment amener mon objet parce qu’il représente une phase de ma vie que je suis sur le point de conclure. Mon objet, c’est mon uniforme de préposée aux bénéficiaires. Je fais ce travail depuis une douzaine d’années. C’est arrivé dans un moment difficile de ma vie où je me cherchais et où j’avais besoin d’un travail. Nous parlions de famille tout à l’heure, alors dans cette famille reconstituée il y a eu un homme qui s’appelait Jean Ménard et qui a joué un rôle de père spirituel pour moi. À un moment, il est tombé malade et j’ai été plusieurs semaines à son chevet. J’observais les préposés qui travaillaient là. Ensuite, les familles qui venaient voir leur proches me demandaient où se trouvaient les couvertures, les serviettes, etc. J’ai réalisé que j’aimais cela aider les gens et que ce métier m’intéressait. Ça a aussi représenté une naissance, une ouverture pour moi à quelque chose d’inédit. Maintenant, j’ai l’impression que je suis sur le point de passer à une autre étape de ma vie. Je suis reconnaissante d’avoir vécu cette expérience pendant plusieurs années. Je n’ai pas encore quitté le métier, mais j’aimerais pouvoir servir ma famille d’une autre façon.
* Ce que j’ai, c’est une épinglette avec mon prénom, Claude. Je l’ai fait faire par le bijoutier. Je le porte lors de mes engagements pour que ceux et celles qui ne me connaissent pas m’appelle par mon nom et pour qu’ils le retiennent. C’est important pour moi.
Je trouve cela très significatif. Chacun de nous a un prénom et on aime cela l’entendre prononcer de temps en temps par des gens qui nous connaissent et nous reconnaissent. C’est triste quand personne ne nous connait. YC
* Moi, j’ai deux objets à présenter. En août 2016, le Forum social mondial a eu lieu à Montréal. Voici le tee-shirt souvenir. J’allais avoir 45 ans et cette expérience m’a convaincu de déménager à Montréal. J’étais à la recherche d’un renouveau dans ma vie et changer de ville m’a permis de vivre cela. Cela fait quatre ans que je suis déménagé ici. Pour m’intégrer dans la grande ville et me faire un nouveau réseau de connaissances, je me suis impliqué et je suis allé à la rencontre de différents organismes. C’est loin d’être évident d’aller vivre dans une ville où on ne connait personne. Je connaissais déjà des groupes de défense de droits membre du Front commun des personnes assistées sociales ou du Collectif pour un Québec sans pauvreté. Mais j’ai quand même trouvé cela difficile de m’intégrer à certains groupes de base. J’avais aussi besoin de m’occuper et mon premier bénévolat a été le 375ème anniversaire de la ville de Montréal. Depuis 2016, j’ai recueilli une vingtaine de tee-shirts d’événements où je me suis impliqué. Il y a eu le salon jeunesse de la robotique, Juste pour rire, et de nombreux événements où j’agissais à titre de photographe. C’est tout un monde qui s’est ouvert à moi. En m’impliquant, je me suis fait de nouveaux amis et en faisant du bénévolat, j’ai construit une confiance en moi. Vivant beaucoup de solitude, je perdais confiance en moi et j’allais consulter un psychologue au CLSC. C’est pour cela que mon deuxième objet, c’est mon appareil photo qui m’a permis d’améliorer ma confiance en moi. La photo m’oblige à relever des défis qui m’aident à améliorer ma confiance. Cela donne une image positive de moi qui démontre que je suis bien avec moi-même. N’eut été la pandémie, j’aurais eu cette année 7 à 8 événements comme photographe bénévole. Venir vivre à Montréal m’a permis d’élargir mes horizons comme photographe et grâce au téléphone, je demeure en contact avec vous à Québec.
* Pour moi, mon renouveau c’est d’utiliser les vidéoconférences pour communiquer avec les gens des différents organismes où je m’implique. Cela m’a pris un peu de temps avant de devenir fonctionnel. Cela va aussi me servir pour communiquer avec mes proches. Probablement qu’on ne se verra pas à Noël et au Jour de l’An, alors nous allons le faire par vidéoconférence. J’espère que nous parviendront à nous amuser avec cela. Ça va être pas mal tranquille cette année.
* Moi je dirais que c’est le CAPMO qui représente pour moi le renouveau. Sans cet organisme, j’aurais de la misère à communiquer. Le fait que vous ayez fourni des ordinateurs reconditionnés à ceux et celles qui s’impliquaient dans l’organisme et n’avaient pas les moyens de s’en procurer un qui fonctionnait avec une caméra, a été d’un grand secours pour moi. C’est la chose la plus importante que j’ai eu cette année. C’est important de travailler et d’avoir un contact régulier avec les gens. Lorsqu’on est confiné dans notre résidence comme je le suis, en plus que je suis une personne vivant avec un handicap, j’aime mieux être encore plus prudent. Un autre objet qui a changé ma vie, c’est que j’ai porté le flambeau olympique lors des olympiques d’hiver de Vancouver. À partir de là, je me suis ouvert à d’autres groupes avec lesquels je me suis impliqué. Après 2010, j’ai commencé à m’impliquer dans des groupes comme la CDEC, l’ADDS-QM, et d’autres. Ce sont ces différentes expériences de vie qui m’ont amené au CAPMO. C’est un groupe où j’ai du plaisir à m’impliquer. Je vous remercie pour l’aide que vous m’avez apporté. Ce n’est pas qu’une question d’argent. Avec mon handicap, j’ai de la difficulté à me déplacer et à porter une grosse boîte dans mes mains. Je n’aurais pas été capable de l’amener et de l’installer moi-même. C’est un grand service que vous m’avez rendu.
Personnellement, j’ai autant besoin de vous qui vous engagez dans l’organisme. Sans mon conseil d’administration, cela ne pouvait plus fonctionner. J’étais dans l’obligation de vous connecter pour que nous puissions poursuivre nos activités et pour prendre des décisions ensemble. YC
* L’objet que j’apporte est un aviron stylisé. Cela réfère au Brésil et à notre expérience en Amazonie. C’est un ami qui nous l’a offert, un cueilleur de caoutchouc qui recueille le latex d’arbres d’Uvéa. Je m’étais impliqué avant mon départ dans des groupes de solidarité internationale, mais vivre pendant trois ans là-bas m’a permis de comprendre ce que c’est que d’être un étranger et d’être accueilli. Le fait de me retrouver avec plein de gens simples qui avaient une foi profonde et une espérance à transporter les montagnes. Malgré des conditions de vie épouvantables et difficiles à supporter, ces gens étaient heureux de vivre parce que leur principale richesse c’étaient les autres, la communauté et leur spiritualité. Ces gens vivaient aussi en profonde communion avec leur environnement naturel. Nous n’habitions pas avec des peuples autochtones, mais avec des riverains, des métis, dans des communautés rurales. J’ai découvert aussi l’expérience de foi profonde que j’ai trouvée tout à fait libératrice. Pour moi, il y a un avant et un après dans ma croissance humaine et spirituelle. À partir de cela, je peux comprendre ce que c’est que de vivre sans autre sécurité que la foi. Après ces années à l’étranger, cela a pris une année avant de retrouver du travail à Québec. Nous avons connu la précarité et cela m’a permis de comprendre les personnes qui vivent en situation de pauvreté au Québec tout en demeurant animé par la force spirituelle des gens du Brésil qui me portaient pendant cette année d’incertitude.
Je dirais que cette expérience constitue un véritable tremplin parce qu’il s’est produit un saut qualitatif dans ma vie. Désormais, je ne vois plus la vie de la même façon. Présentement, je pense beaucoup aux Brésiliens qui en ce temps de pandémie ont un gouvernement qui n’a pas d’allure. Ce sont les plus pauvres qui reçoivent les contrecoups de la pandémie et de la misère économique qui s’abat sur ce pays en raison des mauvais choix que ce gouvernement s’entête à faire. Aujourd’hui, avec Internet, il est facile de savoir en temps réel ce qui se passe là-bas. Je suis content de ce cadeau que la vie m’a fait où j’allais au Brésil par solidarité, mais où j’ai bien plus reçu que ce que j’ai pu donner. Cela fait 25 ans que nous sommes revenus de cette expérience et j’ai l’impression d’en récolter encore les fruits dans une espèce de renaissance continuelle. Il y a eu un début, mais il n’y a comme pas de fin. Merci à Dieu et à la vie pour cela.
* Pour moi, il y a deux objets qui sont importants. D’abord un chaudron que j’ai laissé au Hilton de Québec où j’ai travaillé à la plonge de nombreuses années. Je m’amusais et j’ai voulu faire une tête avec ce chaudron comme s’il s’agissait d’un ballon de soccer. J’ai perdu connaissance et je me suis retrouvé à l’urgence. Les collègues qui m’ont prodigué les premiers soins ont découvert de l’alcool dans mes affaires. L’agent de sécurité en a parlé à mon président de syndicat et ils ont convenu de ne pas en parler aux patrons. Cela correspond au début de mon changement de vie et d’une renaissance spirituelle. Mon deuxième objet, c’est une médaille pour mes 22 ans de sobriété. Dans mon éveil, les femmes ont beaucoup compté dans mon évolution. Ma sœur, une religieuse, et plusieurs autres, ont contribué à mon cheminement. Le meilleur moyen pour se débarrasser d’une dépendance, c’est la spiritualité. Une spiritualité laïque et ouverte où tu choisis ton propre dieu.
Alors, je vais y aller de mon témoignage. Mon objet, c’est une petit poupée de chiffon que j’ai rapportée de San Cristobal de las Casas au Chiapas. Cela fait 35 ans que je l’ai avec moi. C’était en décembre 1985, lors de mon premier voyage solo au Mexique. Pour moi, cette première expérience a été le précurseur du voyage suivant que j’ai effectué avec ma blonde pendant 18 mois de novembre 1986 à avril 1988. Pour nous, ça a été une expérience fondatrice de nos valeurs et de notre spiritualité, de notre foi et de notre amour des humbles gens qui ont pris soin de nous lorsque nous étions dans la misère. Il faut dire que nous étions partis pour trois mois, sans trop d’argent et que notre aînée est née au Brésil pendant ce périple. Cette expérience nous a sauvé la vie parce que nous n’étions pas heureux au Québec à cette époque. La jeunesse n’avait pas d’avenir, il y avait beaucoup de consommation de drogue et d’alcool, et le taux de suicide le plus élevé en Occident. La plupart de nos amis vivaient de l’aide sociale parce qu’il n’y avait pas d’emploi. Le taux de chômage chez les jeunes devait atteindre les 35%, mais on nous parlait de 13% dans toute la population. Plusieurs allaient à l’université parce que recevoir des prêts et bourse était un moyen de survivre. C’était pratiquement impossible de se projeter dans l’avenir. C’était le noir autour de nous, aucune trace de foi ou d’espérance, les gens refusaient même d’avoir des enfants, sauf les jeunes femmes insouciantes qui lançaient un défi à la fatalité. Il semblait qu’il n’y avait pas d’avenir au Québec à cette époque, alors nous avons décidé d’aller voir ailleurs s’il y avait autre chose et surtout, des réponses à nos questions existentielles. C’est cet ailleurs qui nous a sauvé.
Le premier coup que j’ai reçu lorsque j’ai mis les pieds au Mexique, c’est que les gens étaient heureux malgré leurs difficultés économiques et leur pauvreté. J’ai vu l’amour des femmes autochtones pour leurs enfants et cela m’a ému. Je me demandais, comment cela se fait-il que ces gens qui ont cent fois moins que nous parviennent à être heureux ? Ils avaient sûrement une réponse que je n’avais pas encore trouvée et je voulais leur arracher. Le voyage s’est fait en deux temps: Le premier séjour d’un mois m’a apporté la question, les dix-huit mois suivants, la réponse. YC
Qu’est-ce qu’on se souhaite pour l’année 2021 ?
On se souhaite de ne plus avoir la pandémie et des rencontres significatives avec des gens qui s’aiment et s’apprécient. Peut-être que pour certains d’entre nous, cette épreuve nous aura libérés d’une vie superficielle dans la consommation et les apparences. Cela a permis un retour sur soi, un temps d’arrêt et un certain regard rétrospectif pour évaluer vers où nous voulons aller. Certains ont eu plus de temps pour lire et écouter de la musique, pour se rapprocher. Nous sommes en train de vivre une grande traversée du désert qui va marquer un avant et un après pour les générations qui l’auront vécu. Pour les plus jeunes qui entraient au cégep cette année, l’expérience s’est vécu en zoom. Je pense que les jeunes vont être marqués davantage que nous par la pandémie. Alors que leurs écoles étaient fermées, ils ont beaucoup mûri en remplaçant les jeunes retraités qui occupaient des emplois à temps partiel dans les quincailleries et les épiceries. Plusieurs d’entre eux n’avaient que 14, 15 ou 16 ans. De plus c’était sérieux, ils devaient supporter un stress considérable et c’est souvent eux qui rappelaient les adultes à l’ordre. La pandémie leur a un peu volé la gaîté et l’insouciance de leur jeunesse. Les rôles ont été renversés à plusieurs niveaux et il est certain que cela a été pour eux une source d’apprentissage considérable. À vous de conclure. YC
* Pour faire du pouce sur ce que tu viens de dire, honnêtement, j’envie les jeunes d’avoir eu un avertissement aussi tôt dans leur vie parce que la plupart des adultes vivent dans une roue d’hamster. On parlait de décroissance sans être capable d’arrêter de consommer. Avec la pandémie, nous avons compris ce que la chose impliquait. Concrètement, c’est une opportunité pour eux de saisir les enjeux actuels que nous sommes appelés à vivre. Cela va probablement être très porteur pour leur cheminement. Je parle des jeunes de 16, 17 et 18 ans, qui sont en train de choisir leur future carrière. Certains vont se réorienter ou seront déterminés par ce qu’ils sont en train de vivre. En ce sens, c’est porteur d’espoir. C’est ce que j’aperçois.
* Moi aussi, je suis convaincu qu’il va ressortir de bonnes choses de ce drame collectif.
* Même si beaucoup de gens vivent des deuils, nous sommes obligés de voir le positif pour continuer d’avancer. J’ai énormément de respect pour toutes les personnes qui travaillent dans le milieu de la santé. Je vous lève mon chapeau. Pour les autres qui ne fréquentent pas ce milieu, nous avons observé cela de loin. J’espère que cela va amener beaucoup de personnes à arrêter de se regarder le nombril et à apprendre à penser globalement. C’est épouvantable ce que nous avons vécu, mais il y a plein de belles choses qui vont ressortir de cela. Il faut s’accrocher à l’espoir.
* Le témoignage de Claudia m’apparaît paradoxal parce qu’elle se disait reconnaissante d’exercer le métier de préposée aux bénéficiaire alors que c’est nous qui devrions être reconnaissants envers ces travailleurs qui ont couru des risques d’attraper la maladie.
* La toile de fond de ce que nous vivons, c’est le mur financier que nous ne voyons pas parce que nous avons les moyens de nous endetter à l’infini à 0% d’intérêt. Quand on observe ce qui se passe dans les pays du sud, c’est la réforme des retraites qui est un mur financier pour eux. S’il n’y a pas une façon d’envisager la vie communautaire autrement, les drames que nous avons vécus cette année à cause de la surcharge dans le domaine de la santé, cela ne sera rien. L’isolement ne sera que pire encore. Le système économique nie la personne humaine qui est première. Par contre, les nouvelles générations comprennent que la plus grande richesse que nous avons, ce sont les liens que nous parvenons à tisser entre nous. Sur cela, les places boursières n’ont aucune puissance. Il ne faut pas oublier qu’il y a une toile de fond qui est très laide.
* J’aimerais dire que je vous suis très attachée et très solidaire de tout ce qui se passe. Le CAPMO m’a apporté beaucoup. Non seulement de la joie, mais j’y ai aussi vécu des choses extraordinaires que je n’oublierai jamais comme « Le Parlement de la rue », « Le Jeûne à relais du refus de la misère » ou « La Nuit des taons qui piquent ». Ce sont des souvenirs que je garde précieusement. Cette année, pendant la pandémie, la chance m’a été donnée que des nièces m’ont demandée d’écrire l’histoire de ma vie. J’ai décidé de m’y mettre et à chaque jour j’écris un peu. C’est quasiment une thérapie qui me permet de revisiter les souvenirs que j’ai de mon enfance. Je suis née à l’Ile aux Grues alors j’ai plein de choses à raconter, mais mes expériences au CAPMO, cela fait aussi parti de mes mémoires. J’ai écrit pendant six mois et j’en suis à la mise en page et aux corrections. Ce n’est pas un livre, mais un petit recueil. C’est une belle expérience à vivre et cela me rend heureuse. Il existe des liens très forts au CAPMO qui si on ne s’aimait pas, nous n’aurions pas été capables de partager tout ce qui s’est dit ce soir. Il y a un climat de confiance.
* Je vais aller dormir avec de vraies richesses. C’est tellement beau ce qui s’est dit ce soir. C’est impressionnant d’entendre les parcours de vie. Cela fait du bien d’entendre des témoignages comme cela en ces moments d’isolement social. Quand on est habitué d’aller voir du monde, de sortir pour se changer les idées, la COVID a amené des changements dans la vie de tout le monde. Je trouve que c’est difficile de passer à travers. Le fait de pouvoir parler en groupe, cela fait du bien. Cela m’enlève un peu d’amertume face à ce que nous vivons. Je vous souhaite à tous et à toutes de passer un très beau temps des fêtes, rempli de joie et d’amour. Je vous souhaite du bonheur et de la prospérité.
* Merci à tout le monde pour vos partages. Ce qui me donne espoir pour 2021, c’est que ce soir nous avons vraiment parlé de renaissances et de renouveau. Je trouve cela beau que malgré tout ce que nous vivons de difficile, la naissance vient nous habiter. Je trouve cela inspirant et je demeure confiante pour l’année à venir. Je souhaite que ce que nous avons appris pendant la pandémie, le meilleur soit mis en pratique dans l’avenir. Il ne faut pas que nous agissions après comme si rien ne s’était passé. Nous avons eu l’opportunité de réfléchir aux changements que nous souhaitons voir réalisés dans notre société.
* Je suis tellement contente de vous avoir vu et d’être avec vous ce soir. Je vous souhaite de très joyeuses fêtes et au plaisir de vous revoir en 2021. Merci beaucoup.
* Joyeuse Noël à tout le monde et bonne année 2021.
* Je remercie les rois et les reines mages qui nous ont partagé leurs trésors. Ce fut très apprécié.
* Je souhaite que la vie vous fasse beaucoup de présents au cours de l’année à venir.
* De l’or, de l’encens et de la mire.
* Minimum.
* Merci pour le choix du thème. C’était une très bonne idée.
* On lâche pas.
Propos rapportés par Yves Carrier