Ça roule au CAPMO – novembre 2017

Ça roule au CAPMO – novembre 2017

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Spiritualité bolivarienne

La spiritualité est l’orientation fondamentale qu’une personne ou une collectivité donne à son existence, les valeurs qui structurent son agir et son identité, de même que sa vision du monde et des principes qui maintiennent à la fois son intégrité psychologique, sa cohésion sociale, et le rapport qu’il parvient à établir avec l’environnement. Elle est recherche d’unité avec soi-même, les autres et le cosmos.

La spiritualité procède d’une intelligence émotionnelle capable de se mettre à la place de l’autre. D’où le proverbe amérindien : « Avant de pouvoir juger quelqu’un, tu dois d’abord chausser ses mocassins pendant une lune. » Source d’espérance, la spiritualité demeure tributaire des sagesses millénaires. Par définition, une spiritualité authentique est ouverture à l’autre et refus de l’accaparement égoïste de ce monde, de l’esprit de domination, du repli identitaire ou du rejet de l’autre. Elle est à la fois une position et une proposition existentielle, une manière d’être et d’entrer en relation avec le monde. Mais par-dessus tout, ce sont ses valeurs incarnées dans des gestes bienveillants et une ouverture du cœur aux appels d’une humanité souffrante qui en font un chemin de justice et de vérité.

La spiritualité bolivarienne est l’esprit rebelle de Bolivar qui, au nom de la dignité humaine, refuse le servage des nations du sud au profit de l’exploitation éhontée des peuples et de leurs territoires. Après l’un des ouragan qui a frappé les Caraïbes, les banques étrangères ont réclamé d’être remboursées sur le champ, au détriment des populations affligées par une catastrophe naturelle. Devant l’ignominie, une spiritualité qui défend la dignité humaine ne peut qu’être critique et dénoncer l’absence de sens moral et éthique des institutions financières qui possèdent et gouvernent le monde.

Le pouvoir de l’esprit est immense lorsque nous nous mettons à croire ensemble à autre chose que ce que nous avons sous les yeux. De fait, la réalité est la construction de l’esprit humain, la résultante de ses manquements à la solidarité et à la dignité humaine. Les objets qui nous entourent, les manières que nous avons d’entrer en relation les uns avec les autres, la perception que nous avons de nous-mêmes, procèdent tous de l’esprit parce que nous les avons rêvés et imaginés avant de les concevoir. Puis, de façon méthodique, par essais-erreurs, nous nous sommes donnés les moyens d’y parvenir. Rien ne nous empêche d’imaginer un monde sans pétrole, une société plus juste, la fin de la course aux armement et de l’oppression des peuples du tiers monde par les multinationales. De fait, nous avons construit notre propre prison comme l’esclave qui croit qu’il est né pour servir. De fait, la domination des esprits, des croyances, des espoirs et des rêves, appartient à l’appareil de domination culturelle.

Détournés de leur finalité humaine par la publicité et la désinformation qui nous inculque la peur de l’autre, nos sociétés errent à la recherche d’un ennemi à abattre. Devenu schizophrène, la civilisation occidentale vit dans une profonde illusion en ce qui concerne la place qu’elle occupe en ce monde. Nous ne sommes pas le sommet de la civilisation, mais le résultat résiduel de nos limitations personnelles que nous refusons de regarder froidement en projetant la faute sur d’autres peuples, d’autres nations, d’autres victimes de notre arrogance. La spiritualité est rebelle, l’amour aussi.

 


Table des matières

Spiritualité et citoyenneté
Autodétermination
Venezuela ???
Renégociation de l’ALENA
Brésil, dictature civile ?
Calendrier

 


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Spiritualité et citoyenneté

LE CANTIQUE DES OISEAUX D’ATTÂR
L’épopée spirituelle de la Simorgh, oiseau solaire, a traversé les âges, de l’Avesta des Zoroastriens (Zarathoustra), livre sacré des anciens persans, jusqu’à aujourd’hui. Et cela grâce à un apothicaire et parfumeur :Farid al Din Attar (Farid od-dîn Mohammad ben Ebrâhîm ‘Attâr) de Nishapur (Iran), né vers 1158 et mort vers 1221 lors du sac de sa ville par les armées mongoles.

Il a relaté en 9448 vers l’histoire de tous les oiseaux du monde en quête de cet oiseau fabuleux dont le trône est situé au-delà du mont Qâf. Ces oiseaux symbolisent toutes les âmes humaines en recherche spirituelle. Pour atteindre ce pays du non-où, il faut traverser sept vallées dont chacune est une étape avec des difficultés particulières mais aussi certaines opportunités.

La première vallée est celle du désir, car sait-on ce qu’il faut désirer. Peut-être est-ce là la première étape : savoir ce qu’on désire et faire une hiérarchie de nos désirs afin de progresser spirituellement. S’arracher de la confusion entre désirs et besoins, comprendre nos instincts et notre part d’ombre pour les utiliser à bon escient. C’est l’étape du départ. Personne ne sait où aller et même s’il faut y aller, avoir la motivation et éviter de s’enfoncer dans le monde de la consommation inutile et destructrice. Il faut un guide de départ, c’est la huppe.

D’autres vallées sont à traverser. La deuxième est celle de l’amour et du piège de l’amant. Amour de bienveillance plutôt que de possession. Il ne faut pas que ce qu’on aime nous enferme. Et nous empêche d’avancer. Il faut la connaissance des pièges de l’amour et des désirs.

La troisième étape est celle de la connaissance, spirituelle bien sûr; car les connaissances peuvent aussi nous inhiber, quand on s’en satisfait et qu’on ne s’envole pas vers la vallée suivante. Pour lier théorie et pratique, il faut la motivation de l’être, son désir et l’amour pour poursuivre le chemin vers la quatrième vallée dite de la plénitude.

Quand on est rempli de soi-même, a-t-on atteint le but ? Mais il s’agirait plutôt de la plénitude de l’être quand il a réussi à joindre théorie et pratique dans son cheminement spirituel vers l’unicité, cinquième vallée, l’être unifié dans son savoir et son vouloir.

Mais l’être est-il le tout? C’est la sixième vallée, celle de la perplexité. Et la dernière est celle du dénuement et de l’anéantissement, de notre ego probablement. Mais pour en être certain, il faudrait se procurer l’œuvre de Leila Anvar : Cantique des Oiseaux d’Attâr, éditeur Diane de Selliers, 2012. Voir sur le Net aussi.

Seuls trente oiseaux parviendront au bout du voyage. Trente oiseaux se dit si morghen persan. Comme il est dit dans le Coran, Dieu est plus proche de nous que notre veine jugulaire. C’est le paradoxe, Dieu est à la fois si loin et si proche. Si difficile à atteindre à travers nos présomptions et si près dans le dénuement et l’anéantissement de notre ego. Je reconnais pour ma part que je n’en suis que dans la vallée, alors que je me suis déjà cru dans la troisième, mais ce n’était qu’une illusion.
Robert

 


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L’autodétermination des peuples 

Droits et protection de tous en péril   par Victor Hugo Ramos, anthropologue

La démolition globale croissante
Depuis trois décennies, les puissances occidentales, le gouvernement des États-Unis en tête, s’en prennent à l’autodétermination des peuples, qui est la protection fondamentale de tous. Ce non-respect de ce principe de base de cohabitation entre les Nations cause des chaos de longue durée, la destructions des pays, provoquant la mort de centaines de milliers, voire de millions de civils, pour aboutir à la satellisation des Nations attaqués et à la confiscation de leurs richesses. Ainsi va le monde mondialisé sous « la protection » de la plus grande mafia : les compagnies militaro-industrielles.
Extorsion de la pire espèce, qui dénature totalement les relations internationales en passe de reculer à l’époque pré-onusienne et même à cette période pré-Westphalienne (Traité de 1648, point de départ de la souveraineté des États-Nations) caractérisée par l’imposition de la force brutale des empires et des pays puissants. En même temps, l’ONU devient surtout le fief des intérêts transnationaux et non plus une organisation démocratique et pacifique au service des Nations qui pourtant la composent. En fait, les deux piliers fondamentaux de l’ONU, soit le respect de la souveraineté des États et la résolution pacifique des conflits, sont en cours d’anéantissement par une politique et une économie à caractère transnational et impérial, avec, pour conséquence, la négation des protections et des remparts du droit international au bénéfice du plus fort, au profit de la barbarie guerrière et mercantile.

La déferlante impériale avant et avec Trump
Si « Chaque révolution produit son grand homme», alors, chaque involution impériale produit son petit homme. La déferlante barbare des puissances occidentales actuelle est née dans le contexte de la crise et de la décadence du capitalisme. Et les petits hommes se succèdent à la Maison-Blanche : Reagan, les Bush, le mirage Obama et maintenant Trump. Mais le caractère guerrier du capitalisme et de l’impérialisme ne dépend pas des traits personnels des chefs d’État : il est intrinsèque au système. Cependant, ces « petites marionnettes » des grandes corporations rendent plus grotesques et brutales les interventions et les guerres des puissances. Les meurtrières et illégales interventions en Afghanistan, en Irak, en Libye et en Syrie au cours de ce XXIe siècle font partie de la stratégie de la « domination de spectre complet » concoctée entre les années 1998 et 2000 par le Commandement conjoint des États-Unis, dont l’horizon de réalisation se situe en l’an 2020. Cette stratégie comporte des opérations d’intelligence, de manipulation de l’information pour influencer l’opinion publique locale et internationale, de sanctions économiques, d’interventions dans les politiques internes des pays ciblés, des opérations militaires camouflées en actions humanitaires et des interventions militaires directes. Affaiblissant encore plus la vocation des Nations unies, lors de la 72e Assemblée générale de l’ONU, le 19 septembre, Trump a menacé de « détruire totalement » la Corée du Nord où vivent 25 millions de personnes. Il a également dénoncé l’Iran comme État voyou, passible de nouvelles mesures punitives, et a menacé le Venezuela de plus de sanctions et d’interventions militaires pour « instaurer » la démocratie (de riches). Le gouvernement des États-Unis finance l’opposition violente qui a causé plus de 150 morts et qui cherche à renverser le gouvernement légitime de Nicolas Maduro qualifié de « dictature » par Trump et les grands médias, contrôlés par les transnationales.

 De plus, il a loué les actions guerrières unilatérales des Nations fortes et il a déclaré du même coup que le contrôle de l’armée des États-Unis a été confié au Pentagone, confisquant ainsi le pouvoir des élus au profit des militaires, mesure qui enfreint un principe clef de tout gouvernement démocratique. Il ignore très probablement la fameuse sentence de Georges Clémenceau qui dit : « La guerre est une chose trop grave pour être confiée à des militaires », surtout quand l’armée des États-Unis a une stratégie de domination globale et complète qui vise les différents peuples.

La Catalogne ignorée par les puissants, mais accompagnée par les peuples du monde
La Catalogne a réalisé un référendum pour faire l’indépendance, un exercice démocratique et pacifique saboté et brutalement réprimé par le gouvernement « démocratique » espagnol que la « communauté internationale » a tardé à dénoncer timidement. Pierre Moscovici, commissaire de l’UE aux affaires économiques, déclarait le 5 octobre 2017 que « la Catalogne indépendante ne serait pas membre de l’Union européenne, car l’Union européenne ne connaît qu’un État membre, qui est l’Espagne » et il ajoutait qu’un État catalan indépendant « C’est de la politique-fiction ». « La France ne reconnaîtra pas la Catalogne si elle se proclame indépendante de manière unilatérale », déclarait le 9 octobre la ministre française des Affaires européennes. Autant l’Union européenne que plusieurs pays européens ne reconnaissent pas à la Catalogne son droit intrinsèque de peuple à faire son indépendance. Ils invoquent qu’il s’agit d’une « affaire interne » de l’État espagnol, piège qui donne à cet État le pouvoir de ne pas reconnaître le droit du peuple catalan, de décider à sa place, de le réprimer encore avec plus de barbarie au besoin. Le 10 octobre, le gouvernement catalan annonce la signature et la suspension de la déclaration d’indépendance pour ouvrir un dialogue sur sa réalisation. Madrid répond que «c’est inadmissible », c’est un « coup d’État », l’Union européenne et Trump, tous « démocratiques » qu’ils sont, appuient le gouvernement espagnol. Tout est prêt pour ne pas reconnaître la décision du peuple catalan et pour utiliser la force. Cependant, ce club de puissants et les médias des grandes corporations ont validé une consultation sans valeur légale organisée sans vérification sérieuse par l’opposition vénézuélienne le 16 juillet dernier, et cela sans sabotage ni répression de la part du gouvernement du « dictateur » Maduro. Des journalistes munis d’une caméra cachée ont testé la sécurité du vote et ils ont pu voter à maintes reprises sans aucun problème, ainsi que plusieurs autres personnes. À la fin du scrutin, les organisateurs ont brûlé les bulletins de vote. Cependant, l’élection des membres de l’Assemblée constituante réalisée le 30 juillet sous strict contrôle, a été qualifiée d’illégale et frauduleuse par ces mêmes « démocraties. » Mais la Catalogne n’est pas seule ni le Venezuela non plus. Les peuples du monde, les organisations qui travaillent et luttent pour la liberté, la justice et le bienêtre des citoyens appuient la Catalogne et le Venezuela en quête de sa libération du joug des puissances impériales, des transnationales et de leurs «commis » locaux.

 Le 1 % contre le 99 %, voilà le défi !
En dépit de la simplification qu’exprime cette formule du défi contemporain complexe auquel nous faisons face comme individus et comme société, elle nous permet de définir le contour général et stratégique de la contradiction fondamentale à laquelle nous faisons face. Toutes les sociétés hiérarchisées aient utilisé la peur systémique de l’autre comme arme de cohésion et de domination internes. Mais aujourd’hui, à cette peur, les puissances occidentales ont ajouté la création permanente de pays ennemis imaginaires qu’elles accusent de posséder des armes redoutables et des intentions belliqueuses injustifiées, de quoi légitimer leurs attaques militaires et l’asservissement de ces Nations. Mais ce « jihad » de la « guerre sans fin » des puissances occidentales contre les peuples d’autres pays est aussi une guerre contre leurs propres peuples. L’attaque contre les droits et libertés de la personne, contre les conditions de travail, l’aggravation de la précarité sociale, l’appauvrissement économique, l’espionnage généralisé, la répression croissante contre les citoyens et les organisations sociales, tout cela fait partie d’une politique globale menée par les gouvernements au profit du 1 % de super-riches, nouveaux tsars sans foyer ni patrie de l’économie transnationale. Cette nouvelle bourgeoisie globale qui fait de nous et de nos sociétés ses simples « facteurs de production », qui ruine les fondements et les institutions de nos très imparfaites démocraties et qui détruit la nature, les bases mêmes de la vie, constitue le principal danger pour nous, pour les autres peuples, pour l’espèce humaine. Cet adversaire global appelle à des stratégies et à des actions locales globales pour contrecarrer l’instauration du totalitarisme de marché global en plein développement. De là la pertinence de ce cri de ralliement  : CITOYENS DU MONDE, UNISSONS-NOUS !

Réseau de Solidarité avec l’Amérique latine et les Caraïbes de Québec

 


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QUE SE PASSE-T-IL AU VENEZUELA?

 La complexité de la situation au Venezuela mérite une analyse approfondie, mais faute d’espace, nous nous contenterons d’esquisser quelques éléments importants, tout en soulevant quelques incohérences du gouvernement et de l’opposition.

Quels intérêts sont en confrontation et dans quel contexte?
Les intérêts qui se confrontent actuellement au Venezuela, pays clef de l’Amérique latine, représentent deux secteurs antagoniques qui sont en lutte pour le contrôle du pays et de ses richesses qui sont stratégiquement importantes et abondantes. Le premier secteur est celui qui a hérité le pouvoir de ‘État et les richesses de l’époque coloniale, composée des « bonnes familles ». C’est la couche sociale très riche qui, en connivence avec le capital international, contrôle les terres, les grandes entreprises, les banques et le grand commerce import-export, les médias et qui s’appropriait presque sans partage de la rente du pétrole jusqu’à l’arrivée au pouvoir du mouvement bolivarien. L’autre secteur est composé par les salariés de différentes professions, les paysans, les artisans, petits et moyens entrepreneurs et commerçants, bref 90% de la population. Couche exclue systématiquement de la manne du pétrole et des autres richesses et du pouvoir.

Avec l’élection de Hugo Chavez, ce secteur a commencé à bénéficier des retombées de l’« or noir » par l’amélioration de son niveau de vie, la construction de plus de 1,7 million d’habitations, l’accès à l’éducation et à la santé, etc., dont certains sont aujourd’hui gravement détériorés comme le cas de l’alimentation et de la santé. Problèmes principalement causés par la guerre économique de ceux qui contrôlent l’économie. Le gouvernement a aussi ses responsabilités.

Quelques incohérences et contradictions
Manipulation des sens de mots et des faits. La fameuse « dictature » de Maduro ne résiste pas à l’analyse du sens ni des faits. Définition de dictature par le dictionnaire Larousse : « Régime politique dans lequel le pouvoir est détenu par une personne ou par un groupe de personnes (junte) qui l’exercent sans contrôle, de façon autoritaire. » Les faits contredisent l’affirmation de l’opposition. Depuis que le chavisme est au pouvoir, 18 élections avec la présence de surveillants internationaux ont eu lieu. Il y a une opposition très active avec beaucoup de moyens et réalisent de manifestations violentes et meurtrières, dont 10 chavistes brûlés et ayant comme objectif faire tomber le gouvernement. De plus, les médias sont à 67-95,2 %, selon le secteur, sous contrôle de corporations privées liés à l’opposition. Aucune réelle dictature ne permettrait cela.

La convocation de l’Assemblée constituante n’est pas constitutionnelle sans référendum consultatif. Vérifions : cet argument s’appuie sur une interprétation de l’opposition de l’introduction de l’article 348 de la constitution actuelle selon laquelle le président peut avoir « l’initiative de convocation de l’Assemblée constituante », mais c’est le peuple qui doit se prononcer par un référendum consultatif sur sa réalisation. Cependant, les articles 342 au 346 de la constitution octroient au président le droit d’initiative pour réaliser des amendements et des réformes constitutionnelles. Chavez a utilisé ce droit en 2007 et en 2009 sans avoir besoin de faire de référendum.

Le gouvernement bolivarien a négligé l’organisation cohérente du passage de l’économie liée à la rente du pétrole vers une économie diversifiée qui assure la provision des denrées alimentaires et des articles de première nécessité. De plus, il n’a pas encouragé suffisamment l’économie sociale et la démocratisation des entreprises d’État, des initiatives fondamentales si l’on veut changer le modèle économique et social prédominant.

Alors, nous assistons au Venezuela à la confrontation entre les tenants internes et externes du système actuel qui enrichit les riches et exclut la majorité des citoyens et ceux qui essayent un processus alternatif avec son lot d’erreurs et de contradictions. En ce moment, ce processus passe ou bien tombe avec ce gouvernement. S’il passe, de voies s’ouvrent pour faire avancer les changements nécessaires pour mettre l’économie et la politique au service du peuple vénézuélien. S’il tombe, non seulement seront détruits totalement ce qui reste des avancées sociales créées par ce processus, mais il sera imposée par la force, avec intervention de l’extérieur, une dictature néolibérale au service de la bourgeoisie locale et transnationale. Dans ce cas, les gens qui sont de bonne foi dans l’opposition et l’ensemble des citoyens payeront très cher les coûts de ce genre d’intervention et ceux des mesures néolibérales. De plus, l’Amérique latine pourrait tomber dans un chaos semblable à celui du Moyen-Orient et qui sera proportionnel à la confrontation vécue au Venezuela. L’opposition violente doit arrêter sa dangereuse stratégie. La voie démocratique et le dialogue sont toujours les meilleurs moyens pour résoudre les conflits.

Victor Hugo Ramos, anthropologue

 


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La renégociation de l’ALENA côté Mexique

Jacques Gélinas, L’Autre Journal, 29/09/2017

 Lors de l’entrée en vigueur de l’Accord de libre-échange nord-américain, le 1er janvier 1994, le président Carlos Salinas de Gortari arbore ce traité comme un projet porteur d’un immense espoir pour le peuple mexicain : l’ALÉNA conclu avec les deux voisins industrialisés du Nord va sortir le Mexique du sous-développement et le faire passer du Tiers-Monde au «premier monde».

C’est le contraire qui s’est produit. La dépendance du Mexique envers les États-Unis s’est aggravée. C’est le développement du sous-développement, dans un climat de corruption, d’impunité et de violence inouï. En 2017, il y a plus de pauvres au Mexique – 53 % de la population – qu’en 1994. Les riches sont plus riches et les pauvres, plus pauvres. L’accord a facilité la délocalisation d’entreprises états-uniennes et canadiennes vers le Mexique, ce qui crée des emplois – à salaires de misère – et satisfait les élites.

Mais l’Oncle Sam, lui, n’est pas satisfait. Il exige la renégociation de l’ALÉNA à l’avantage des États-Unis. Il brandit une longue liste de revendications. Alors que le gouvernement Trudeau aligne une série d’exigences très fermes, le gouvernement de Peña Nieto se présente à la table de négociation comme un agneau apeuré. Aucune demande spécifique. Comme si l’oligarchie mexicaine estimait que tout va pour le mieux avec l’accord actuel.

De l’autosuffisance alimentaire à la dépendance
Le Mexique, c’est le pays des Aztèques, cette brillante civilisation, qui a domestiqué les denrées aujourd’hui les plus utilisées dans les cuisines du monde : le maïs, la tomate, le haricot et le cacao. Avant l’ALÉNA, le Mexique jouissait d’une autosuffisance certaine en aliments de base.

Mais en signant l’ALÉNA, les dirigeants mexicains ont ouvert leur marché agroalimentaire aux produits états-uniens lourdement subventionnés : quelques 10 milliards de dollars annuellement. Le cas du maïs s’avère particulièrement scandaleux. La tortilla – galette de farine de maïs – est le pain quotidien des Mexicains. Selon les termes de l’accord, le maïs aurait pu, en tant que « culture sensible », être protégé. Au lieu de cela, la suppression des tarifs douaniers a ouvert toute grande la porte au maïs états-unien. La céréale la plus subventionnée aux États-Unis est vendue au Mexique à des prix de dumping. Ruinés par cette concurrence déloyale, cinq millions de paysans ont dû quitter la campagne pour aller s’entasser dans les bidonvilles et les maquiladoras, ou s’exiler aux États-Unis.

À l’inverse, les grands propriétaires terriens qui pratiquent l’agriculture industrielle à grande échelle se sont enrichis, convertissant le pays « en puissance agroalimentaire mondiale ». Stupéfiant paradoxe ! Le Mexique, qui importe massivement des produits de base comme le maïs, le riz, les haricots, le blé, produits laitiers et huiles végétales, est devenu grand exportateur de produits agroalimentaires : surtout fruits et légumes.

PEMEX dans la moulinette des privatisations
PEMEX, Petroleos Mexicanos : société d’État qui, pendant des décennies, a fait la fierté des Mexicains. Jusqu’à ce que la corruption, la collusion et les ponctions fiscales exorbitantes la rendent financièrement exsangue. Et donc mûre pour la dénationalisation. Ces dernières années, PEMEX comblait jusqu’à 30 % du budget national. Ainsi pressurée, elle a négligé l’investissement dans la recherche et les équipements et s’est retrouvée incapable d’exploiter les nappes de pétrole en eaux profondes.

Un brin d’histoire. En 1938, le président Lazaro Cardenas, le père du Mexique moderne, nationalise les 17 compagnies étrangères qui exploitent les abondantes ressources pétrolifères du pays, au mépris de la Constitution. En effet, l’article 27 de la Constitution issue de la Revolución (1910-1917) stipulait que, concernant les hydrocarbures « aucune concession ni contrat ne pouvaient être octroyés à des intérêts privés ». Pour payer les 130 millions de dollars d’indemnités exigés par les compagnies, Cardenas fait appel à la population qui, dans un élan patriotique, dépose épargnes et bijoux dans le trésor national.

Pendant cinq décennies, le pétrole a constitué le socle de l’industrialisation du pays, fournissant une énergie bon marché aux petites et moyennes entreprises, en même temps qu’il alimentait les finances publiques moyennant impôts et redevances.

En 2013, le président Enrique Peña Nieto réussit un impensable coup de force : il dénationalise PEMEX. Un Parlement docile annule les parties de la Constitution interdisant une telle mesure. Cette dénationalisation vient clore l’ère de la Révolution mexicaine, dont PEMEX était l’emblème par excellence.

Exxon Mobil, Esso, BP et autres multinationales de l’or noir se sont dardées sur cette proie dégriffée. Le 7 septembre, au lendemain du deuxième cycle de renégociation de l’ALÉNA tenu à Mexico, Shell ouvre sa première station-service en banlieue de la capitale et annonce qu’elle va investir un milliard de dollars dans la distribution de produits pétroliers au Mexique (Agence France-Presse, le 7 septembre 2017).

La privatisation de PEMEX, c’est l’aboutissement de la logique néolibre-échangiste néolibérale.
Depuis la signature de l’ALENA, les gouvernements successifs ont procédé à la privatisation tous azimuts des biens et services publics. Plus de 1000 entreprises publiques ont été livrées à des intérêts privés. Tout y passe : le téléphone, l’électricité, le transport ferroviaire, les ports, les aéroports, les mines, les banques et jusqu’à la bière. Cette avalanche de privatisations a alimenté une vague de collusion et de corruption. C’est à qui s’enrichirait le plus et le plus vite.

Connaissez-vous Carlos Slim ? La privatisation des sociétés d’État lui a permis d’accumuler en peu de temps une fortune de 48 milliards de $US. De 2013 à 2016, ce Mexicain d’origine libanaise a figuré en tête du palmarès des multimilliardaires du monde. Récemment, la volatilité des marchés lui a fait perdre deux ou trois rangs.

Sa méthode ? En 1994, il achète à vil prix – 44 millions de dollars – la société d’État Telecomunicaciones de Mexico. Telmex qui demeure un quasi monopole, vaut aujourd’hui 2,5 milliards de dollars. Le service s’avère si mauvais et le monopole si dominant qu’il a coûté aux mexicains 13 milliard de dollars de trop, selon l’OCDE. Carlos Slim a bâti un empire en se servant au bar des sociétés d’État vendues à prix d’aubaine.

Au pays des maquiladoras
Ce que Donald Trump reproche par-dessus tout à l’ALENA, c’est d’avoir entraîné les États-Unis dans un déficit commercial avec le Mexique. En effet, de 1994 à 2016, la balance commerciale entre les deux pays est passée d’un surplus de 1,3 milliards de dollars en faveur des États-Unis à un déficit de 64 milliards.

L’industrie automobile contribue pour 86 % à ce déficit, soit 55 milliards de dollars. Pour être exportée aux États-Unis sans frais de douanes, une automobile fabriquée au Mexique doit contenir 62,5 % de pièces états-uniennes en valeur monétaire. Trump veut élever cette proportion à 70 % et même 80 %. Une grande partie de cette industrie se trouve dans les zones franches d’exportation appelées maquiladoras.

Les maquiladoras sont des zones industrielles, situées au nord du Mexique, le long de la frontière avec les États-Unis. Destinées exclusivement à l’installation d’usines d’assemblage étrangères, ces zones bien délimitées, parfois clôturées, jouissent d’un régime particulier d’exonération fiscale, sociale et environnementale. Les dites firmes bénéficient d’une main d’œuvre bon marché, non syndiquée à 98%. Ce sont surtout des filiales de multinationales états-uniennes, qui exportent la plus grande partie de leur production aux États-Unis.

Ce système d’exploitation existait bien avant la signature de l’ALENA, mais l’accord a établi un cadre juridique et commercial qui en favorise l’expansion.
Pour les élites économiques et politiques, cette pratique constitue une solution de facilité concernant la création d’emplois. Elles ont démissionné face au défi d’un véritable développement fondé sur une politique d’industrialisation. Le système des maquiladoras désarticule l’industrie nationale, la réduisant potentiellement à un rôle de sous-traitance.

Qu’en disent les syndicalistes canadiens ? Le président d’UNIFOR[1], Jerry Dias, estime qu’on ne peut avoir un accord commercial équitable avec un pays au salaire minimum établi à 90 cents l’heure. Tant la partie états-unienne que la canadienne plaident pour un rehaussement à 4,50 $ l’heure. Ce que les élites mexicaines refusent absolument. Comme le Guépard du célèbre roman de l’aristocrate italien di Lampedusa, elles sont «prêtes à tout changer pour que rien ne change». Lire : prêtes à toutes les compromissions pour conserver leurs privilèges.

Le pacte du silence
Un premier cycle de renégociation de l’ALENA a eu lieu à Washington, du 16 au 21 août. Un deuxième à Mexico, du 1er au 5 septembre. Le troisième cycle vient de s’ouvrir à Ottawa, ce 23 septembre. Que sait-on de l’avancée de ces négociations ? Rien. Nous avons appris, le 24 août, que los tres amigos ont signé un pacte de confidentialité, par lequel ils s’obligent à garder secret le contenu de leurs discussions pendant quatre ans après l’entrée en vigueur du nouvel ALENA. Comme quoi, malgré les promesses de transparences, les politiciens libre-échangistes ne disent pas ce qu’ils font et ne font pas ce qu’ils disent.

UNIFOR, le plus grand syndicat du secteur privé au Canada, regroupe 300 000 travailleuses et travailleurs œuvrant dans l’industrie automobile, la foresterie, la pêche et les médias.

 


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Sommes-nous déjà en dictature civile ?

2017-09-24 Leonardo Boff, Brésil

Ce que nous vivons actuellement au Brésil ne peut pas être qualifié de démocratie de basse intensité. Si nous prenons comme référence minimum qu’une démocratie est en relation avec la peuple, le détenteur originel du pouvoir, l’expérience que nous traversons est une négation de la démocratie et représente une véritable farse.

Pour les décisions qui affectent profondément l’ensemble de la population, il n’y a eu aucune discussion avec la société civile, les mouvement sociaux n’ont pas été entendues, ni même les groupes d’experts sur des questions aussi vitales que le salaire minimum, le code du travail, les aides sociales, les nouvelles règles pour la santé et l’éducation, les privatisations des biens publics fondamentaux comme par exemple la compagnie nationale d’électricité et des réserves stratégiques de pétrole, les lois qui délimitent les terres indigènes et, ce qui est un véritable attentat à la souveraineté nationale, la permission de vendre des terres en Amazonie pour l’exploitation minière par des entreprises étrangères.

Tout cela est fait au moyen de décrets ou de mesures provisoires proposées par un président accusé de diriger une organisation criminelle et avec un infime appui populaire qui n’atteint pas les 5%. Les propositions ont été envoyées à un parlement dont 40% de ses membres sont accusés ou suspectés de corruption.

Que signifie une telle situation sinon la prévalence d’un État d’exception, ou davantage, d’une véritable dictature civile ? Un gouvernement qui gouverne sans le peuple, a abandonné le statut démocratique et a clairement instauré une dictature civile. C’est ce que nous vivons en ce moment au Brésil.

Dans la perspective de ceux et celles qui observent la réalité politique à partir d’en bas, depuis les victimes de ce nouveau type de violence, le pays s’apparente à un avion sans pilote dans un ciel opaque. Où allons-nous ? Nous l’ignorons. Mais les usurpateurs le savent: en créant les conditions politiques pour transférer une grande partie de la richesse nationale à un petit groupe d’entreprises qui, selon un institut de recherche, ne représe pas plus de 0,05% de la population brésilienne (un peu moins de 70 000 multimilionnaires), qui constituent les élites fortunées, insatiables et représentantes de l’establishment traditionnel associé à d’autres groupes de pouvoir antipeuple, spécialement certains médias de communication qui ont toujours appuyer les coups d’États et qui n’apprécient pas la démocratie.

Je transcris un article de Roberto Malvezzi, un observateur attentif de la réalité brésilienne qui habite le sertao et qui partage les souffrances des victimes dune des pires sécheresse de notre histoire. Son article est une dénonciation et une mise en garde, il s’intitule : « De la dictature civile à la dictature militaire. » « Avant le coup parlementaire de 2016 envers la majorité du peuple brésilien travailleur ou exclu, nous réfléchissions déjà à l’éventualité de l’instauration d’une nouvelle dictature au Brésil. Nous étions convaincus qu’il pourrait s’agir simplement d’une « dictature civile », sans être nécessairement militaire. Cependant, tout comme en 1964, elle pourrait évoluer vers une dictature militaire. À ce moment là, peu d’entre nous croyaient que le gouvernement de Dilma Rousef pourrait être renversé.

Pour moi, il ne fait aucun doute que nous sommes en pleine dictature civile. C’est un groupe de 350 députés, 60 sénateurs, 11 ministres, les membres de la Cour suprême, et quelques grandes entreprises et les familles propriétaires des moyens de communication traditionnelles qui ont imposé une dictature au peuple. Les institutions fonctionnent, comme ils disent, mais contre le peuple et uniquement en faveur d’une part infime de la population appartenant à la classe des privilégiés brésiliens. Évidemment, toujours en connexion avec les multinationales et les pouvoirs économiques qui dominent le monde. Pendant ce temps, nous, le peuple, avons été abandonnés, exclus. Tout est décidé par un groupe de personnes qui ne représentent tout au plus qu’un millier d’individus, avec autour d’eux un groupe un peu plus mombreux qui participe indirectement aux prises de décisions. (La population du Brésil est de 220 millions.)

Ce qui se produit, c’est que le coup d’État ne se termine pas parce que la corruption, vieille formule pour appliquer des changements de régime dans ce pays, est visible aujourd’hui grâce aux moyens de communication alternatifs toujours plus présents et influents parmi nous. La corruption se retrouve à tous les niveaux de la société brésilienne, surtout chez les hypocrites qui lèvent cette bannière pour faire valoir leurs intérêts.

Mais la corruption est seulement un prétexte. L’objectif du coup parlementaire est de réduire la taille de l’État brésilien pour qu’il fonctionne seulement pour 120 millions de personnes. Les 100 millions restant devront chercher comment survivre au moyen de l’économie informelle et de la petite criminalité, prostitution, rackets, trafic d’armes ou de drogues. (Le retrait de l’État entraîne toujours une augmentation de la criminalité qui prospère sur le dos de la misère en plus de détruire le tissu social et les capacités organisationnelles de la population. La mafia est un allié objectif du néolibéralisme.)

En ce moment, commencent à apparaître des signes de l’idéologie de ceux qui dirigent le pays: lors d’une réunion de la Maçonnerie, un général raconta les idées qui circulent parmi ses membres, les vieux moyens avec l’opinion de « spécialistes », les nostalgiques de l’ancienne dictature disent dans les médias sociaux :  » Ceux qui ne sont pas corrompus ne doivent pas avoir peur des militaires. »

Enfin, ils envisagent la possibilité d’avoir recours à la dictature militaire. Pour le petit groupe qui a rééalisé le coup, c’est excellent parce que cela représente la meilleure des sorties à la crise qu’ils ont eux-mêmes provoquée. Ils n’ont jamais été démocrates. Ils n’aiment pas le peuple. Au sein même de a chambre des députés ou du sénat, très peu d’entre eux vont perdre leur charge ou aller en prison. Le pire d’une dictature civile ou militaire est toujours pour le peuple. Les nouvelles générations ne connaissent pas la cruauté d’une dictature totale. Le silence de la société devant les déclarations de ce général me glace l’âme. Que Dieu et le peuple organisé nous viennent en aide.

 


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Calendrier des activités du mois de novembre 2017

À noter que la conférence contre le racisme du mercredi 8 novembre a été déplacée à l’Université Laval, Pavillon Charles-DeKoninck, Amphithéâtre A-1

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