Ça roule au CAPMO, janvier-février 2023

La violence des oppresseurs

Lima fut fondée par Pizarro en 1535, le conquistador espagnol qui par traitrise a vaincu l’empire Inca. Il fut lui-même assassiné et l’histoire de ce pays semble une longue succession de trahisons. À l’époque de l’indépendance, la vice-royauté du Pérou ne voulait pas se soulever contre la couronne espagnole puisqu’elle en tirait tous les bénéfices aux dépends des populations mises en servitude. Bolivar dut se déplacer avec son armée pour vaincre les forces royalistes et proclamer l’indépendance du Pérou.

Aujourd’hui, la population se révolte contre l’injustice et l’arrogance des classes dirigeantes, riches, blanches, éduquées, qui contrôlent depuis 500 ans tous les leviers du pouvoir: financier, juridique, politique, académique et médiatique. En effet, il ne faut jamais oublier que l’idéologie des classes dominantes s’exprime aussi à travers la publicité et les roman-savons, films hollywoodiens et tutti quanti, dans une guerre de  propagande incessante qui promeut le mode de vie bourgeois en colonisant les rêves et les aspirations des populations dominées. Au passage, lorsqu’elle ne les dénigre pas comme arriérées, elle heurte les cultures traditionnelles des autres idiosyncrasies comme celles des peuples andins, beaucoup plus solidaires et fraternelles dans leur essence. La pensée dominante  s’attaque aux traditions afin de briser les liens intergénérationnels et rien n’est plus aux antipodes que le capitalisme et le Buen vivir Quechua, Quichua et Aymara. Ceux-ci nous proposent de vivre sobrement, en communauté et en harmonie avec la nature conçue comme une entité vivante à laquelle nous devons le plus grand respect puisque l’individu n’est pas le centre de l’univers.

Depuis le règne de Fujimori (1990-2000), le Pérou a été soumis à une application maximale du néolibéralisme. Après avoir vaincu le Sentier lumineux, non sans éliminer toutes formes d’opposition civile jugée suspecte, Fujimori semblait avoir créé la dictature parfaite en parvenant à se succéder à lui-même grâce à un ingénieux coup d’État contre le congrès national. Il purge maintenant une sentence à vie pour crime contre l’humanité et sa fille est la leader de l’opposition.

L’actuelle constitution péruvienne que le dernier président Pedro Castillo avait promis de réécrire à l’aide d’une assemblée constituante, octroie l’essentiel du pouvoir aux représentants du Congrès national, faisant du président un pantin de leur bon vouloir. Au paradis du néolibéralisme, l’État édenté ne peut plus décider de rien qui porterait atteinte aux intérêts financiers, alors que ses prétendues élites laissent la population et les régions abandonnées dans un marasme où sévit la destruction environnementale des minières étrangères et canadiennes.

Le Pérou compte environ 40% de population autochtone qui parle toujours leur langue ancestrale et habitent leur territoire, plus une bonne moitié de la population, enseignants, fonctionnaires publics et policiers inclus, vivant dans une grande précarité. Les services publics sont en ruine, si tant est qu’ils aient déjà existés.

Yves Carrier


 

Hannah Arent, Le système totalitaire

par Emilie Frémont-Cloutier

Je voulais vous partager un aspect inspirant de la pensée de Hannah Arendt qui m’a été révélé aujourd’hui.

Il apparaît que pour elle, la résistance au totalitarisme réside dans la  »naissance » ce qui se retrouve dans plusieurs archétypes de l’histoire et notamment dans la Bible. La naissance de Moïse comme renversement de l’esclavage des Égyptiens. La naissance du Christ:  »La terreur totale, l’essence du régime totalitaire, n’existe ni pour les hommes ni contre eux. Elle est censée fournir aux forces de la nature ou de l’histoire un incomparable moyen d’accélérer leur mouvement. Ce mouvement, qui va de l’avant selon une loi qui lui est propre, ne peut à la longue être enrayé ; sa force s’avérera finalement toujours plus puissante que les plus puissantes des forces engendrées par les actions ou la volonté des hommes. Mais il peut être ralenti, et il l’est en fait de manière presque inévitable par la liberté de l’homme, que même les dirigeants totalitaires ne peuvent nier ; car cette liberté — aussi déplacée et arbitraire qu’ils puissent la juger — est identique au fait que les hommes sont parce qu’ils sont nés, que chacun d’eux est donc un nouveau commencement, et commence, en un sens, un monde nouveau. Du point de vue totalitaire, le fait que les hommes naissent et meurent ne peut être tenu que pour une entrave désagréable à des forces supérieures. La terreur, en tant que servante obéissante du mouvement historique ou naturel, a donc le devoir d’éliminer, non seulement la liberté, quel que soit le sens particulier donné à ce terme, mais encore la source même de la liberté que le fait de la naissance confère à l’homme et qui réside dans la capacité qu’a celui-ci d’engendrer un nouveau commencement. »

(…)

 »De même que le besoin de la terreur naît de la peur qu’avec la naissance de chaque être humain un nouveau commencement n’élève et ne fasse entendre sa voix dans le monde, de même la mobilisation de la force auto-contraignante du système logique a pour origine la peur que quelqu’un ne se mette à penser — activité qui, en tant que la plus libre et la plus pure des activités humaines, est justement tout l’opposé du processus contraignant de la déduction. »

Hannah Arendt, 1951, Le Système totalitaire: https://www.philo5.com/Les%20philosophes%20Textes/Arendt_Totalitarisme.htm

La pensée de Hannah Arendt m’aide à mieux intégrer à quel point la fête de Noël ou d’autres fêtes inscrites dans diverses traditions spirituelles de l’humanité autour du solstice d’hiver ont potentiellement un caractère très libérateur, voire révolutionnaire. C’est une véritable révélation pour moi aujourd’hui.


 

La bulle culturelle

Par Carolina Vasquez Araya

De nouvelles générations déconnectées de leur entourage et immergées dans la tendance globale.

Sans trop approfondir les conséquences que peut avoir l’imitation de valeurs, l’adoption de styles culturels étrangers, ou la perte de contact avec ses racines, on pourrait dessiner une esquisse de ce qui adviendra de nos sociétés futures. Immergées dans un consumérisme qui ne lui appartient pas et guidées aveuglément par le besoin de se fondre dans la masse, nos générations nouvelles et pimpantes dans leurs habits de fibre synthétique, commencent à montrer le véritable visage de la globalisation culturelle.

Indifférentes à la réalité sociale qui les entoure, une portion dangereusement élevée de la jeunesse des pays en développement préfère répondre aux stimulis aliénants des sociétés de l’abondance et de la plastification du « moi », qui satisfont les désirs et les inquiétudes les plus élémentaires des nouveaux grimpeurs sociaux. Le « way of life » des années 1950 réapparait, vigoureux et triomphant, mais cette fois complètement dépourvu de l’enchantement ingénu qui fut à son origine et, clairement, dénué entièrement des raisons qui le sustentaient à son apogée. C’est-à-dire, qu’il s’est transformé en un écran hollywoodien qui offre à chaque rêve une réponse à sa mesure.

De cette source, les strates sociales privilégiées de nos pays ont produit une jeunesse qui vit dans un contexte accidentel, emprunté et étranger… Un contexte auquel ils se sentent attachés par la nature, mais non par la culture. Ils transforment alors leur environnement en une petite et modeste réplique de ce qu’ils croient être leur véritable foyer, auquel ils n’appartiennent ni par nature, ni par culture, mais lequel continue d’être, malgré tout, leur unique modèle valide.

Cette perte progressive du sens de la réalité et l’attitude peu charitable de nos jeunes arrivistes dénationalisés, ne repose même pas sur la certitude d’accéder aux cercles d’une société idéale. Non seulement parce que cette société  n’existe pas, mais parce qu’elle si elle existait, elle ne les accepterait pas. Cette forme de migration idéologique qui se produit de manière si violente, affecte sensiblement le profil culturel de nos pays et ne manque pas d’avoir un impact négatif sur les efforts de certains secteurs pour récupérer leur identité nationale.

L’impossibilité d’engendrer une identité culturelle solide et transcendante à partir de la rupture avec ses propres racines est plus qu’évident. Rien ne peut être aussi épuisant que de lutter contre un ennemi intérieur qui ne s’identifie pas facilement parce qu’il se faufile à travers les moyens de communication, l’adoption de coutumes étrangères, le mépris envers soi et la dédain ethnique qui resurgit comme conséquence naturelle du rejet de ce qui constitue son essence et son origine.

Vincent Van Gogh, La nuit étoilée

La superficialité de ce nouveau cadre de valeurs est clairement défini parce qu’aucun de ses principes ne répond à une nécessité réelle, à une analyse profonde de ses raisons ni à une tendance généralisée de chercher des voies accessibles vers le progrès.

Bien au contraire, l’une de ses caractéristiques la plus notoire est son manque absolu de consistance, révélé à travers des positions qui ne possèdent  aucun contenu intellectuel permettant de suggérer une posture philosophique.

Ses disciples les plus fidèles sont des personnes qui vivent, généralement, à l’intérieur d’un cercle de création et de satisfaction immédiate de besoins qui appartiennent à une autre réalité, laquelle leur permet de se fondre dans un rêve doré duquel ils ignorent les règles.

Cette jeunesse ne parvient pas à voir la responsabilité qui lui incombe dans le développement de leur propre monde, parce qu’ils insistent à se situer dans un éther décrit en anglais, rejetant le contact avec tout élément qui les empêche de s’évader de la réalité qui les circonscrit. Ils tombent dans la torpeur de leurs faux idéaux, s’efforçant de disqualifier les traits particuliers de leur milieu. Tandis que cela se produit dans les hauteurs des privilèges économiques, d’autres jeunes conscients luttent pour récupérer leur identité perdue et tentent, sans grand succès, de restaurer les idéaux qui donnèrent vie à une culture riche en traditions. La même qui agit comme un miroir de la pauvreté et des contraintes d’une population qui méconnait les supposés avantages de la globalisation.

Les peuples en développement perdent leurs racines culturelles par imitation.

www.carolinavasquezaraya.com

Traduit de l’espagnol par

Yves Carrier

Murale du peintre mexicain Diego Rivera


 

L’éducation publique comme responsabilité éthique

Par Hervi Lara B.,

Santiago, Chili, 15 décembre 2022

Même si ce n’était que partiellement, l’ancienne éducation publique ouvrait des canaux d’intégration sociale en transmettant des valeurs comme la nation et le travail. C’étaient des valeurs communes et une source de dignité. Mais la globalisation néolibérale a brisé l’esprit de la nation et du travail parce qu’elle n’a globalisé que les élites. Les grandes masses sont demeurées marginalisées. Les élites  du monde entier communiquent entre elles, mais évitent d’entrer en contact avec leur propre peuple. Elles vivent à l’extérieur des villes dans des paradis artificiels qu’elles quittent pour voyager vers les paradis touristiques ou les paradis fiscaux qui constituent le symbole de la rupture de la solidarité. Elles évitent les impôts et produisent un État affaibli qui protège les privilégiés et réprime le désordre et les « soulèvements ». Elles ne s’intéressent pas à l’éducation publique, ni à la santé, ni au logement, ni aux pensions de vieillesse. Elles n’ont aucune idée des conditions de vie leur propre peuple.

L’éducation publique était la préparation pour réaliser un travail comme citoyen d’une société démocratique, mais la globalisation néolibérale a mis fin à la démocratie libérale et le travail salarié, ce qui a aussi précarisé les familles. La famille n’éduque pas parce que les parents (lorsqu’il y en a) ne savent pas quoi transmettre à leurs enfants. Ils les abandonnent à eux-mêmes en leur donnant des choses et de l’instruction. Les écoles ne transmettent pas de valeurs non plus parce que ce sont des centres de préparation pour le marché. Mais tous les enfants et les jeunes des classes sociales moins fortunées savent depuis le début que dans cette compétition ils seront les « perdants ». L’éducation néolibérale, sans valeurs éthiques, est pour ceux et celles qui vont vaincre sur le marché du travail. Pour la majorité, il est inutile d’aller à l’école parce qu’elle n’offre pas la préparation pour la vie qu’ils et elles devront véritablement vivre. Se résigner à cette réalité fataliste est l’objectif de la dépolitisation, à laquelle s’ajoutent les examens internationaux standardisés.

« Nous serons le cauchemar de ceux qui ont volé nos rêves. »

L’État a laissé l’éducation publique en décadence parce qu’il n’y voit pas le sens. Les techniciens dont les entreprises ont besoin sont formés par des institutions privées davantage intégrées au marché. La seule connaissance qui est valorisée est celle qui a trait au marché. Toute l’information que transmettent les médias se réfère au marché pour sélectionner et orienter la production et offrir ainsi aux capitaux les meilleurs rendements. La technologie et la science bénéficient à ceux et celles qui en profitent économiquement, faisant d’elles de nouvelles marchandises. Elles ne transmettent pas de valeurs éthiques parce que cela perturbe le marché.

Pour les jeunes, plus important que les messages des écoles sont ceux que diffusent la télévision et les réseaux sociaux. Ils diffusent le mode de vie des élites. L’éthos de la classe dirigeante est le narcissisme: l’individu ne se réfère pas à lui-même, mais à l’image qu’il projette. De là, le besoin de consommer pour exister. Et s’ils n’ont pas d’argent pour consommer, les jeunes font remarquer leur existence par des manifestations violentes.

On ne pourra parler d’éducation que lorsqu’on aura décolonisé l’esprit de l’opprimé de la présence de l’oppresseur. Pour cela, il est indispensable d’implanter une éducation publique parce que c’est la seule instance qui peut rejoindre les grandes masses des pauvres et empêcher l’intensification de la dégradation des générations actuelles de classes populaires qui se trouvent dans des conditions sans alternative, sans refuge, sans socialisation et sans dignité. Cela implique un changement du système néolibéral tel que l’avait proposé la Convention constitutionnelle en affirmant que le Chili est un État social et démocratique de droit et que l’éducation publique constitue l’axe stratégique du système national d’éducation. Mais la grande masse n’a pas la capacité de se rendre compte de ce qui se passe et les élites détentrices du pouvoir mentent pour maintenir une culture avilie.

Ce qui a été dit plus haut peut être vérifié dans la manière que la proposition d’une nouvelle convention constitutionnelle a été disqualifiée et le pacte à l’origine du fameux Accord pour le Chili.

Les élites économiques (qui décident) et les élites politiques à leur service, ne reconnaissent l’enfer qu’elles ont créé autour de leurs paradis.

Extrait du texte traduit de l’espagnol par Yves Carrier

« Plus de néolibéralisme, dehors Pinera, refondons le Chili. »


 

Allons-nous à la rencontre de notre autodestruction ?

par Leonardo Boff

Amerindia, décembre 2022

L’histoire de l’être humain sur la Terre se résume en grande partie en un conflit permanent contre l’environnement. Ce processus a été si loin que l’être humain a mené une véritable guerre contre la Terre sur tous les fronts : dans le sol, le sous-sol, l’air, et la mer, toujours avec la perspective de saccager et extraire davantage de bénéfices. Dans les cercles scientifiques on dit que l’action humaine comme un tout a initié une nouvelle ère géologique : l’anthropocène qui signifie que les dommages à la nature ne proviennent pas de l’extérieur, mais de la propre action de l’être humain, pensée et orchestrée dans sa volonté d’extraire toujours plus de bénéfices pour sa vie. Un tel fait a eu comme conséquence le déséquilibre de la planète qui réagit en nous envoyant plus de chaleur, d’événements extrêmes tels que des inondations, des ouragans et des sécheresses, en plus d’une gamme croissante de virus dont plusieurs sont mortels comme le coronavirus.

Le fait est que nous avons perdu la perspective du Tout. Nous sommes demeurés uniquement avec la partie. Il s’est produit une véritable fragmentation et atomisation de la réalité et des savoirs respectifs. On en sait toujours plus sur chaque fois moins de choses. Un tel fait a ses avantages et ses limites. Les avantages, spécialement pour la médecine qui est parvenue à identifier les différents types de maladies et leurs traitements.  Mais il faut se rappeler que la réalité n’est pas fragmentée. C’est pourquoi, les savoirs sur elle ne peuvent l’être non plus.

Dit d’une manière figurative : l’attention s’est concentrée sur les arbres considérés en soi-même, tout en perdant la vision globale de la forêt. Pire encore, on a cessé de considérer les relations d’interdépendance que toutes les choses gardent entre elles. Elles ne sont pas lancées ici au hasard, l’une à côté de l’autre, sans les connexions nécessaires qui leur permettent solidairement de vivre, de s’entre-aider et d’évoluer ensemble.

Regardons les arbres: ils ont un langage qui leur est propre, distinct du nôtre, fondé sur l’émission de son. Les arbres communiquent à travers les odeurs qu’ils émettent et en produisant des toxines qu’ils envoient aux autres arbres. Entre les égaux s’établit une relation de réciprocité et de collaboration. Avec les arbres différents, ils établissent de véritables batailles chimiques dans leur désir d’avoir chacun davantage accès à la lumière du soleil ou aux nutriments du sol. Mais cela se fait toujours sans excès, dans une juste mesure, de telle manière que l’ensemble des arbres forment une forêt ou une jungle riche et diversifiée.

Dans le cas des êtres humains, nous avons perdu cet équilibre et la juste mesure: a été érodé ce courant qui nous reliait à tout avec tous, appelé Matrice relationnelle. Nous n’avons pas tenu compte de l’ample réseau de relations et d’interconnexions qui enveloppaient l’univers et tous les êtres existants. Il n’existe rien en dehors de la relation. Tout est relié avec tout en toutes circonstances.

C’est la réalité de toutes les choses qui existent dans l’univers et sur la Terre, depuis les galaxies les plus lointaines à notre Lune et jusqu’aux herbes des forêts. Elles ont leur endroit et leur fonction dans le Tout. Dans une formulation élégante du Pape François dans son encyclique Laudato si sur le soin de la Maison commune (2015), il affirme :

« Tout est relié et nous tous, les êtres humains, nous marchons ensemble comme des frères et des sœurs, dans un merveilleux pèlerinage qui nous unit dans une tendresse chaleureuse au frère Soleil, à la sœur Lune, au frère fleuve et à la Terre-Mère… le soleil et la lune, le cèdre et la fleur, l’aigle et le moineau n’existent qu’en interdépendance les uns avec les autres, pour se compléter et se servir mutuellement » (n.92;86).

Si réellement nous sommes tous entrelacés, alors nous devons conclure que le mode de production capitaliste, individualiste qui cherche le plus grand profit possible au coût de l’exploitation de la force de travail et de l’intelligence humaine et spécialement des richesses naturelles, sans s’apercevoir des relations qui existent entre toutes les réalités, contaminant l’air et empoisonnant les sols avec des pesticides, est à contre-courant de la logique de la nature et de l’univers lui-même qui lient et relient tout avec tout, constituant la splendeur du grand Tout.

La Terre nous a créé un lieu amical pour vivre, mais nous ne sommes pas amicaux envers elle. Au contraire, nous l’agressons sans cesse jusqu’au point où elle ne le supportera plus et elle commence à réagir comme si c’était une contre-attaque. C’est la signification principale de l’irruption d’une gamme de virus, particulièrement du COVID19. De protecteurs de la nature (Genèse 2,15), nous somme devenus son Satan menaçant.

Jusqu’à l’arrivée de la modernité,  entre le 17ème et le 18ème siècle, l’humanité se concevait normalement comme faisant partie de la Terre-Mère et d’un cosmos vivant et rempli d’intention. On se percevait comme lié au Tout. Maintenant, la Terre-Mère a été transformée en un entrepôt de ressources et en un réservoir rempli de richesses naturelles à exploiter.

Dans cette compréhension, qui a fini par s’imposer, les choses et les êtres humains sont déconnectés entre eux, chacun suivant son cours individuel. L’absence de sentiment d’appartenance à un Tout plus grand, ne pas tenir compte du tissu de relations qui relie tous les êtres, nous a rendu déracinés et submergés dans une profonde solitude. Nous sommes envahit par le sentiment que nous sommes seuls dans l’univers et perdus, chose que la vision intégratrice du monde qui existait antérieurement, empêchait.

Aujourd’hui, nous nous apercevons que nous devons établir un lien affectif avec la nature et ses différents êtres vivants et inertes, d’ailleurs nous possédons le même code génétique de base, alors nous sommes frères et sœurs (arbres, animaux, lacs et rivières). Si nous ne mettons pas notre cœur dans cette relation —de là la raison cordiale — il sera difficile de sauver la diversité de la vie et la propre vitalité de la Terre-Mère.

Pourquoi avons-nous fait ce changement de cap? Il n’y a pas une seule cause, mais un ensemble. Or, le plus important et préjudiciable a été d’avoir abandonné la Matrice relationnelle, c’est-à-dire, la perception du tissu des relations qui entrelacent tous les êtres. Celle-ci nous donnait la sensation d’appartenir à un tout plus grand, que nous étions inclus dans la nature comme faisant partie d’elle et non simplement comme ses utilisateurs ayant des intérêts simplement utilitaristes. Nous avons perdu la capacité d’enchantement pour la grandeur de la création, de révérence devant le ciel étoilé et de respect pour toutes sortes de vie.

Si nous ne changeons pas, pourrait se réaliser ce que le pape François a écrit dans l’encyclique Fratelli tutti : « Nous sommes dans le même bateau: ou nous nous sauvons tous ou personne ne se sauvera » (n.32). Nous ne sommes pas appelés à être les agents de notre propre destruction, mais à être la meilleure floraison du processus cosmique.

Traduit de l’espagnol

par Yves Carrier


 

Pérou : Le mouvement populaire appelle à la grève nationale pour le 19 janvier

Par Andrés Figueroa Cornejo

Politika, 20 janvier 2023

Mardi 17 janvier, la Confédération générale des travailleurs du Pérou, CGTP, et l’Assemblée nationale des peuples, ANP, réalisèrent une conférence de presse. Le dirigeant de la CGTP a affirmé ce qui suit : « Après la mort de 50 personnes lors d’affrontement avec la police, nous appelons à une grève nationale, civique et populaire, pour le 19 janvier. Différentes régions du pays exigent démocratiquement la démission de la présidente par intérim Dina Boluarte, des élections générales en 2023, la tenue d’un référendum pour que le peuple se prononce sur la formation d’une assemblée constituante et le changement du conseil exécutif du Congrès. »

Le membre de l’ANP, Hernando Ceballos, a déclaré : « Nous rejetons la violence des forces de l’ordre qui, hier, ont tenté d’interdire l’assemblée que nous avons réalisée au siège des Travailleurs de la Téléphonie. La protestation est un droit et nous voulons que l’Exécutif et le pouvoir législatif respectent la voix et les revendications du peuple. »

Pour sa part, Jorge Pizarro a indiqué que : « 70% de la population est en faveur de la tenue d’une Assemblée constituante. De plus, sont innombrables les entités syndicales, sociales et professionnelles qui réclament la démission de Boluarte. Nous ne voulons aucun mort de plus, l’État policier de Dina Boluarte doit cesser. » Une des concentrations centrales de la manifestation nationale aura lieu à Lima.

La Marche des 4 Suyos

Tel que promis, ce lundi 16 janvier, des milliers de personnes provenant des 4 Suyos, anciennes divisions territoriales de l’empire Inca, se dirigent vers la capital du pays pour exiger la fin du régime Boluarte—Otarola, la fermeture du Congrès putschiste et oligarchique, et la convocation de nouvelles élections générales en 2023. Les manifestations dans différentes localités du Pérou n’ont pas cessé depuis plus d’un mois, avec une certaine intensité dans les régions de Apurimac, Cuzco, Ayacucho, Arequipa, Madre de Dios et Puno, malgré les massacres effectués par des policiers et des militaires qui ont fait 50 victimes jusqu’à présent. Les forces de l’ordre tirent à balles réelles sur les manifestants en utilisant des munitions de guerre qui ont fait un nombre incalculable de blessés. Les manifestants arrêtés font face à des accusations de « terrorisme ».

La Marche des 4 Suyos consiste en une caravane formée d’une multitude de gens en provenance des peuples du pays andin, composée de véhicules et de marches qui débutèrent le 15 janvier. Ce lundi 16 janvier, les mobilisations ont multiplié les fermetures de routes, atteignant plus d’une centaine, alors qu’il y a 15 jours à peine, il n’y en avait que 36.

Pour sa part, la dictature montrant des signes de faiblesse et de décomposition, a proclamé l’état d’urgence dans les régions de Lima, el Callao, Puno et Cusco. Ces ordres ont été ignorés par les forces populaires et démocratiques qui, armées de dignité et de la raison juste, marchent légitimement sur la capitale, comme elles le firent il y a plusieurs années contre la tyrannie du génocidaire Alberto Fujimori.

L’état d’urgence, proclamé le 15 janvier a une durée d’un mois, il accorde les pleins pouvoirs à la police pour maintenir l’ordre intérieur du pays avec le support des forces armées. Il consiste en la suspension des droits constitutionnels de la population tels que l’inviolabilité du domicile, les libertés de déplacement à l’intérieur du territoire national, de réunion ainsi que le droit à la liberté et à la sécurité personnelles. Dans le département de Puno, le couvre-feu a été imposé. (Personne dans les rues après une certaine heure, tire sans sommation des forces de l’ordre.) Néanmoins, le peuple continue de manifester. Depuis le début du mois de décembre 2022, les mobilisations, les protestations et les marches, ont débutées contre le régime putschiste qui a expulsé inconstitutionnellement le président Pedro Castillo, élu par les urnes. Le Congrès, pris par des représentants des intérêts oligarchiques, est l’épicentre d’une longue crise politique institutionnelle larvée qui a ses origines bien avant les élections présidentielles qui ont mené à la victoire de Castillo. De fait, c’est ce même parlement qui l’a empêché de gouverner. À ce propos, l’un des facteurs décisifs du coup d’État fut l’éventualité d’appliquer un programme de mesures sociales progressistes en faveur des classes ouvrières et populaires. Pour cela, lorsque se produisit la mutinerie antidémocratique, l’ambassadrice des États-Unis au Pérou, anciennement de la CIA, et le secrétaire d’État états-uniens, ont appuyé Dina Boluarte.

Dans un contexte plus large de relations de force à l’échelle mondiale, les États-Unis, pays alliés et subalternes, au milieu d’une crise de l’hégémonie planétaire contre la Chine et ses adeptes, appuient les dénommés : « coups d’État institutionnels ou parlementaires » en Amérique latine. Cela s’est déjà produit en 2004 en Haïti contre Jean-Bertrand Aristide, en 2009 au Honduras contre Manuel Zelaya, en 2012 au Paraguay contre Fernando Lugo, en 2016 au Brésil contre Dilma Rousseff et en 2019 en Bolivie contre Evo Morales.

L’impérialisme nord-américain a besoin de sécuriser les relations subalternes historiques qu’il a soutenu avec l’Amérique latine pour affronter de manière ordonnée cette nouvelle guerre froide. C’est pourquoi, le développement de la lutte du peuple péruvien acquiert immédiatement un caractère anticolonial et anti-impérialiste. Selon l’institut d’études péruviennes, la population rejette le régime de Boluarte dans une proportion de 80 à 88%.

Traduit de l’espagnol : Yves Carrier

 


 

Des nouvelles du CAPMO

Masculinité positive

Le groupe reprend ses activités de réflexion et de sport jusqu’à l’été 2023.

 

Répit pour les femmes

Ce groupe a été formé à l’initiative de quelques femmes immigrantes qui voyant le projet masculinité positive ont réclamé qu’un pendant féminin soit constitué par le CAPMO. Nous les avons alors invitées à se constituer en comité pour définir ensemble les objectifs de ce groupe et les moyens qu’elles entendaient prendre pour les réaliser. La première activité a eu lieu le 20 janvier en soirée au 435 rue du Roi. Elles prévoient se réunir toutes les deux semaines.

 

Collectif TRAAQ

Le comité conseil des organismes communautaires continuent ses rencontres avec la Ville de Québec. Une conférence de presse sera donnée à la mi-février pour informer la population des détails de la mise en place de la tarification sociale et de son fonctionnement.

La prochaine assemblée générale du Collectif TRAAQ aura lieu au Centre Durocher le jeudi 23 mars de 13 h 30 à 16 h.

 

Identité positive

Le projet a repris au centre Saint-Louis. L’école secondaire Boudreau est fermé jusqu’au début du mois de février.

 

 

 

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