Ça roule au CAPMO, janvier 2018
Année 19, numéro 05, version pdf
Interculturalité et engagement social
Si on se perd en forêt, on revient sur ses pas pour retrouver son chemin. Perdus en ce monde, l’homme et la femme postmodernes doivent retrouver leur souffle en se reconnectant en leur centre, avec la création et les grands principes qui gouvernent leur existence. Sans cette expérience sentie, il est impossible d’entrer à nouveau en communion avec ce monde et de s’y engager avec résolution. À partir de ce premier constat, il faut considérer notre première appartenance à l’humanité, l’identité fondamentale par laquelle on reconnait l’égalité en dignité de chaque être humain.
La crise d’identité que traverse la société québécoise et l’incapacité que nous avons à saisir la dimension spirituelle présente dans les différentes religions, ferment les voies au dialogue qui ne peut avoir lieu dans la négation de l’autre dans sa culture et son histoire. C’est par sa parole que l’immigrant s’incarne comme sujet dans notre réalité. C’est à nous de l’entendre dans l’expression de sa vérité et de l’accueillir dans son humanité. Mais pour que cette rencontre ne soit pas que de convenance, nous devons faire la vérité sur ce que nous sommes en train de devenir. Comme société d’accueil, nous devons exorciser la peur de l’autre, nous désaliéner d’une culture matérialiste et nous décoloniser de l’esprit de domination qui nous a été inculqué. Parce qu’il nous rappelle à cette vérité première, l’immigrant nous est salutaire, l’égoïsme national ou individuel ne pouvant servir d’alibis identitaires.
À la recherche du fil d’Ariane des origines, cette quête identitaire s’articule en fonction d’un projet que nous poursuivons ensemble. Sur ce territoire où nous habitons, ce récit a deux racines : l’une autochtone vieille de 12 000 ans; et l’autre européenne, la langue française servant de ciment identitaire à cette société plurielle. Ensuite, pour créer du tissu social, il faut organiser des rencontres qui permettent de réfléchir ensemble, d’apprendre à se connaitre et à se libérer de nos préjugés. Comme le dit si bien le Petit Prince : « parce qu’on ne connait bien qu’avec le cœur. »
Si le racisme et la peur de l’autre naissent de la méconnaissance de soi, se croire propriétaire de ce territoire fausse aussi notre rapport à l’autre et à l’environnement. Quiconque habite ici depuis longtemps sait bien qu’il appartient à la terre, que c’est le pays et son climat qui nous forgent. Si le colonisateur se croit maitre du monde, il s’illusionne, comme en amour, l’esprit de possession tue la relation à l’autre.
Cet exercice s’inspire du virage décolonisateur en provenance du Sud global. À la manière des anciens qui cherchaient à comprendre les événements présents à la lumière des mythes fondateurs, nous devons apprendre à lire notre histoire avec un paradigme qui transcende les liens du sang, pour embrasser un projet d’humanité nouvelle. Pour citer un théologien de chez-nous : « Le sens tient à deux pôles essentiels. D’une part, il existe un point d’ancrage, un enracinement, un lieu historique qui a en même temps la figure d’un héritage et celle d’un projet. Il comporte la tâche d’assumer le poids de cet héritage, de le faire fructifier, de consentir à d’inévitables pertes, de déceler sa capacité d’engendrer des changements, de créer de la nouveauté et de s’ouvrir sur l’avenir. C’est de ce lieu qu’une culture offre à l’être humain de quoi se comprendre, s’interpréter, se donner une vision du monde. » (ndp.)
Le CAPMO reçoit un financement de la Fondation Béati pour développer un Carrefour de savoir sur le thème : Interculturalité et engagement social. Les activités se tiendront sur une année et demie, nous permettant ainsi d’orienter plusieurs de nos soirées mensuelles en fonction de cette intention générale.
Bienvenue à tous et à toutes et surtout bonne et heureuse année 2018 !
Yves Carrier
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CAFÉ SPIRITUEL ET POLITIQUE AU CAPMO LE SAMEDI
Vous voulez jaser de spiritualité et vous instruire sur la politique, il y aura à compter du 20 janvier des 5 à 7 sur ces thèmes le samedi au CAPMO.
Au programme, pour la partie spirituelle, des extraits d’une œuvre d’inspiration soufie (spiritualité de source musulmane) écrite au 12 ou 13ième siècle seront proposés. Il s’agit du Cantique des oiseaux d’Attâr. Farîdod-dîn ‘Attar est un apothicaire iranien disparu vers 1221 lors du sac de sa ville natale de Nichapur par les Mongols.
Cette œuvre raconte le voyage initiatique de milliers d’oiseaux en quête d’une spiritualité suprême symbolisée par le ou la Sîmorgh, sorte d’oiseau mythique qui vit sur une montagne sacrée qu’il faut atteindre en traversant sept vallées recelant joies et épreuves pour ceux qui s’engagent dans cette course.
Les vallées à traverser sont celles du Désir, de l’Amour, de la Connaissance, de la Plénitude, de l’Unicité, de la Perplexité et enfin du Dénuement et de l’Anéantissement. Le Guide des oiseaux est la huppe, messagère du roi Salomon, qui s’efforce de convaincre les oiseaux à effectuer ce voyage et les encourage à le poursuivre par la suite. Le Coran inspire cette œuvre et on y trouve beaucoup de références à l’Ancien Testament et à l’histoire de Jésus.
Leili Anvar, écrivaine collaborant notamment à la revue Monde des religions, a traduit ce document du persan en vers sonnant comme des alexandrins, c’est-à-dire sans en respecter toutes les règles sévères. Il demeure que leur rythme et leur musique sont assez bien préservés, ce qui produit une lecture à haute voix agréable du texte. On y trouve environ 10 000 vers ordonnés en distiques dont plusieurs contiennent plus de deux vers.
L’autre volet, politique, en seconde partie, nous amènera à nous interroger sur les doctrines favorisant le changement social et sur le rôle de la spiritualité dans ce contexte.
Nous offrirons le café et le thé et les participants pourront apporter de quoi luncher.
LES SOIRÉES DE CARTES DU CAPMO se poursuivent toujours les vendredis et les dimanches à compter de 16h. On peut arriver ou partir à l’heure que l’on veut.
Robert Lapointe
Renaud Blais, membre du CAPMO et citoyen engagé
M. Couillard, en choisissant de faire de la politique active partisane, vous avez sacrifié une partie de votre revenu personnel potentiel, comme médecin spécialiste, pour « faire œuvre sociale » ? Vous en faites quoi ? Avec la modification récente annoncée quant à l’aide de « dernier recours », j’ai des doutes sur votre œuvre sociale…
Moi, M. Couillard j’ai sacrifié plus de 80% de mon revenu potentiel pour faire œuvre sociale. Un moment donné dans mon quartier le comptoir alimentaire devait fermer. Je m’y suis investi avec des gens du quartier et il n’a pas fermé. Cela fait bientôt 4 ans et,de la charité chrétienne de la Société Saint-Vincent de Paul (SSVP) où des gens bien nantis, souvent retraités/rentiers et autres, venaient aider des pauvres ; nous avons maintenant un comptoir alimentaire citoyen où les usagers eux-mêmes se donnent un comptoir alimentaire complètement déconfessionnalisé. Ceci est faire œuvre sociale.
Comme coresponsable de ce comptoir alimentaire citoyen je fais partie d’une concertation de gens, avec des représentants institutionnels, c’est le Chantier se nourrir de Sainte-Foy. Là, nous nous concertons pour faire la promotion de cuisines collectives, de potagers collectifs urbains et autres moyens pour que les oubliés de nos gouvernements supérieurs mangent à leur faim tout au long des douze mois de l’année. Ceci est faire œuvre sociale. Par exemple, à ce chantier nous travaillons avec la Ville de Québec afin de disposer de plus de locaux, aux normes MAPAQ et Ville…, où nous pourrons convier des gens et familles pour cuisiner ensemble à des coûts infimes. Notez ici qu’en plus de se nourrir à moindre coûts, les participentEs à ces cuisines collectives socialisent et partagent leurs conditions avec d’autres, ce qui aide beaucoup ces gens à réaliser qu’ils ne sont pas seuls… Prenez note ici de l’effet de socialisation qui contribue, dans le cas des nouveaux arrivants, à faciliter leur intégration sociale. Et pour tous les participantEs qui cuisinent ensemble ils vivent de très heureux moments de fraternité, de partage de recettes ce qui contribuent à la construction du vivre ensemble de demain. Une autre réalisation de ce Chantier se nourrir sera la mise en place prochaine d’une armoire et d’un premier frigo-partage à Sainte-Foy. N’y a-t-il pas là œuvre sociale ?
Après la refondation du comptoir alimentaire et ma participation, depuis près de 10 ans, à différentes concertations dans mon quartier, j’ai rapidement constaté que des groupes communautaires (autres que des organismes de services suppléants aux services publics devenus faméliques surtout depuis VOTRE austérité, M. le premier ministre), sont très rares dans l’ouest de Québec, où j’habite depuis bientôt 20 ans.
Nous avons alors fondé un OBNL afin de disposer d’une institution. Cela nous a permis de « faire de la guignolée » pour financer le comptoir alimentaire. Nous avons durant 2 ans faits notre guignolée avec la Guignolée St-Yves de la SSVP qui fonctionnait depuis les années 1950.
Il y a 2 ans, nous avons repris la relève de ces valeureux aînés. Nous continuons selon les mêmes pratiques. Ce qui nous permet de faire plus que de financer une partie du comptoir alimentaire. Par exemple, nous amenons annuellement un autobus scolaire complet de nouveaux arrivants du quartier à la cabane à sucre, moyen très opportun pour ceux qui nous ont fait l’honneur de choisir Québec comme destination d’immigration de se plonger dans la réalité culturelle concrète de la société québécoise. Nous avons également acheté le frigo pour le projet mentionné plus haut. Ceci est pour moi, faire œuvre sociale.
M. Couillard, comme je vis seul avec un enfant au primaire, je peux rester disponible pour lui et faire œuvre sociale. Autre exemple M. Couillard, comme membre d’une coopérative d’habitation, pendant 2 ans à 2 reprises, je me suis acharné, seul moyen de faire aboutir un projet de financement en période d’austérité ;auprès de membres de la fonction publique, aux ressources humaines faméliques, à la Société d’habitation du Québec pour les convaincre que nous avions de très grands besoins de financement pour rénover nos immeubles où des moisissures proliféraient et mettaient en danger à la fois la santé physique de membres et la santé mentale de certains de ces membres à l’anxiété facile… Pour moi, il y a là faire œuvre sociale.
Durant la dernière campagne électorale municipale nous avons convié les candidats de tous les partis en présence, et ils ont tous acceptés, de venir répondre aux questions de citoyens. Tous les participants, candidats et citoyens ont été très satisfaits de l’expérience. Une participante : je n’avais jamais voté aux municipales et maintenant je sais pour qui voté. Il y a là œuvre sociale.
M. le premier ministre, depuis que vous êtes en poste, mon avis est que vous ne faites pas œuvre sociale. Par exemple quand, après avoir coupé avec ardeur dans les services publics (où tout le monde a perdu) vous en redistribué les surplus aujourd’hui en cadeau par des diminutions d’impôt, où seul les 60% qui en paient, en sont les bénéficiaires. M. le premier ministre, combien de milliards extorqués aux plus faibles allez-vous offrir en cadeau, lors de votre prochain budget, à ceux qui en ont le moins besoin ? M. le premier ministre, vous faites œuvre asociale aux profits de certaines minorités qui en ont le moins besoin, mais qui sans doute sont très utiles pour vous en période électorale.
Renaud Blais, Québec
Un citoyen qui vote toujours
Plan d’action gouvernemental pour l’inclusion économique et la participation sociale
Les groupes d’action communautaire autonome plus mobilisés que jamais !
Québec, le 14 décembre 2017- Le RÉPAC 03-12 appelle ses allié-e-s à intensifier la mobilisation pour un meilleur financement de l’action communautaire autonome et un réinvestissement massif dans les services publics et les programmes sociaux. L’annonce de la bonification du Fond d’aide à l’action communautaire autonome dans le Plan d’action gouvernemental pour l’inclusion économique et la participation sociale est loin de permettre aux quelques 300 organismes en défense collective des droits qu’il finance de mener à bien leurs missions. De plus, le respect de notre autonomie est clairement menacé par cette annonce.
Le plan de « lutte » à la pauvreté…de la poudre aux yeux
Bien que des gains significatifs au niveau des revenus des personnes assistées sociales considérées en contraintes sévères à l’emploi sont à souligner, le plan de lutte à la pauvreté nous laisse sur notre faim. « En refusant d’augmenter significativement les prestations pour l’ensemble des personnes assistées sociales, en creusant l’écart entre les personnes considérées aptes et inaptes à l’emploi, en maintenant les pénalités financières d’Objectif emploi, en misant presque uniquement sur des mesures d’incitation à l’emploi, en laissant 700 000 personnes dans la pauvreté, le gouvernement fait le choix, une fois de plus, de renforcer les préjugés et de s’attaquer aux pauvres plutôt que de s’attaquer à la pauvreté », s’insurge Karina Hasbun du Regroupement des femmes sans emploi du nord de Québec.
L’autonomie des groupes en défense collective des droits menacés
Le RÉPAC 03-12 reconnait le gain qui a été fait pour les groupes en défense collective des droits, le premier depuis de nombreuses années. La mobilisation historique des groupes communautaires a clairement contribué à cette victoire. Cependant, les sommes annoncées sont nettement insuffisantes. À terme, l’investissement ne représente que 30% de notre revendication de 40M$ pour les groupes en défense collective des droits. Bien que les 2,2 millions $ annoncées pour le financement de la mission des groupes dans le budget 2018 soient un pas dans la bonne direction, les 48 millions supplémentaires pourraient représenter un recul historique pour l’autonomie des groupes de défense collective des droits. « Le gouvernement semble préparer un Plan d’action en matière d’action communautaire autonome qui, si on lit entre les lignes, pourrait impliquer une refonte de notre financement autour des services individuels, ce qui va à contresens de nos missions axées sur l’action collective. Ce gouvernement voit dans les organismes communautaires une façon de livrer des services à rabais alors que notre rôle est d’encourager la participation démocratique et la défense des droits des personnes les plus vulnérables », dénonce Sébastien Harvey de la Ligue des droits et libertés, section de Québec.
En route vers la grève du communautaire
Le RÉPAC appelle ses membres et ses allié-e-s à maintenir la pression et à se mobiliser activement dans la campagne
Engagez-vous pour le communautaire. « Le gouvernement a ouvert quelque peu la porte à nos revendications, il doit maintenant, en cette période pré-budgétaire et pré-électorale, nous inviter au banquet. Les groupes se sont assez serrés la ceinture, les populations les plus vulnérables aussi. Il est temps qu’il reconnaisse l’importance de nos missions, en les finançant adéquatement, pour le plus grand bien commun », déclare Karina Hasbun. Le RÉPAC appelle ses membres et allié-e-s à se doter de mandat de grève/fermeture/interruption de service afin de revendiquer :
un financement à la mission suffisant pour l’ensemble des groupes d’action communautaire autonome et l’indexation des subventions;
le respect de la Politique de reconnaissance de l’action communautaire et la reconnaissance de l’Action communautaire autonome;
un réinvestissement massif dans les services publics et les programmes sociaux.
Le RÉPAC 03-12 regroupe une cinquantaine de groupes communautaires partageant des pratiques d’éducation populaire autonome et un engagement envers la justice sociale.
Vers une déclaration universelle du bien commun de l’humanité
Forum mondial des alternatives
Le projet de déclaration qui suit, encore provisoire, est le fruit d’un travail d’élaboration internationale de juristes et de dirigeants sociaux. Il est présenté par le Forum mondial des alternatives (FMA) aux mouvements sociaux et aux organisations présentes au Sommet des peuples de Rio de Janeiro de juin 2012.
Préambule
Nous vivons un temps critique pour la survie de la nature et de l’humanité. Les agressions à la planète (la Terre-Mère) se multiplient, mettant en danger les espèces vivantes, les écosystèmes, la biodiversité, les océans et même le climat. La vie des peuples est détruite par la dépossession de leurs territoires. La concentration monopolistique du capital, l’hégémonie du secteur financier, la déforestation, les monocultures, l’utilisation massive des agents toxiques, mais aussi les guerres, l’impérialisme culturel, les politiques d’austérité et la destruction des acquis sociaux sont devenus le pain quotidien de l´humanité
Nous vivons un temps de crise multidimensionnelle : financière, économique, alimentaire, énergétique, climatique ; une crise de système, de valeurs, de civilisation, entraînant des logiques de mort. Un tel moment historique ne permet pas de réponses partielles et exige la recherche d’alternatives.
Nous vivons un temps marqué par un besoin de cohésion. Les résolutions de l’assemblée générale des Nations unies ; la Déclaration universelle des droits de l’homme (1948) ; les Pactes des Nations unies des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels (1966) ; la Charte des droits et des obligations économiques des États (1974) ; la Charte mondiale de la nature (1982) ; la Déclaration sur le droit au développement (1986) ; la Conférence des Nations unies sur l’environnement et le développement (1992) ; la Charte de la Terre (2000), la Déclaration universelle de l’UNESCO sur la diversité culturelle (2001), la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples indigènes (2007) : autant d’engagements qui, parmi d´autres, exigent une vision d’ensemble et un système de décisions intégré, écologique, économique, politique et culturel, au service de la vie.
Nous vivons un temps où les êtres humains s’aperçoivent qu’ils forment la partie consciente d’une nature capable de vivre sans eux. Cependant, ils continuent à la détruire progressivement, par l’irrationalité d’une prédation orientée par la logique du gain et de l’accumulation capitaliste, et alimentée par une vision anthropocentrique d’un progrès linéaire sur une planète inépuisable. Passer de l´anthropocentrisme au bio-centrisme est devenu une condition de survie.
Nous vivons aussi un temps où de multiples mouvements sociaux et politiques luttent à la base pour une justice écologique et en faveur des droits collectifs des peuples. La vie de l’Humanité – comme projet commun partagé et conditionné par la vie de la planète – se retrouve au centre des préoccupations de divers documents tels que la Déclaration universelle des droits des peuples (Alger, 1976), la Déclaration universelle des femmes indigènes du monde (Pékin, 1995), la Déclaration universelle des droits de la Terre-Mère (Cochabamba, 2010). Cette vision doit s’intensifier et se diffuser, dans un effort commun qui respecte les spécificités.
Pour rétablir les droits de la nature et construire une solidarité interhumaine au niveau planétaire, tâches intrinsèquement liées, une nouvelle initiative, parallèle à la Déclaration universelle des droits de l’homme, s’impose aujourd´hui. Elle a pour vocation de redéfinir, dans une vision d’ensemble (holistique), les éléments fondamentaux de la vie collective de l’humanité sur la planète, de proposer une nouvelle conception (paradigme) et de servir de base à la convergence des mouvements sociaux et politiques.
Il s’agit (1) de passer de l’exploitation de la nature comme ressource naturelle au respect de la Terre comme source de vie ; (2) de privilégier la valeur d’usage sur la valeur d´échange dans l’activité économique ; (3) d’introduire le principe de la démocratie généralisée dans tous les rapports sociaux, y compris entre hommes et femmes, et au sein de toutes les institutions sociales et (4) de promouvoir l’interculturalité pour permettre à toutes les cultures, tous les savoirs, toutes les religions d´éclairer la lecture de la réalité, de participer à l’élaboration de l’éthique nécessaire pour sa construction permanente, et de contribuer aux anticipations qui permettent de dire qu’ « un autre monde est possible ».
Tel est le paradigme du « Bien commun de l’humanité » ou du « Bien vivre », comme possibilité, capacité et responsabilité de produire et de reproduire la vie de la planète et l´existence physique, culturelle et spirituelle de tous les êtres humains à travers le monde. D´où la proposition d´une Déclaration universelle.
Déclaration universelle du Bien commun de l’humanité
I.- Le respect de la nature comme source de vie
Article 1 : Établir la symbiose entre la Terre et le genre humain, partie consciente de la nature)
La nature est à l’origine des multiples formes de vie, y compris celle de l’humanité, dont la Terre constitue le foyer. Le noyau et la croûte terrestre, l’air, la lumière, l’atmosphère, l’eau, les sols ; les rivières, les océans, les forêts, la flore, la faune, la biodiversité ; les graines, le génome des espèces vivantes : tous sont les éléments constitutifs de sa réalité. La nature doit être respectée dans sa beauté, son intégrité de base, ses équilibres, la richesse des écosystèmes producteurs et reproducteurs de la biodiversité et dans sa capacité de régénération. Le genre humain est responsable, en tant que partie consciente de la planète, de respecter la justice écologique et les droits de la nature, qui forment aussi la base de sa propre existence et donc du Bien commun de l’humanité.
Toutes pratiques détruisant les capacités de régénération de la Terre-Mère – telles que les exploitations sauvages des richesses naturelles, l’utilisation destructive de produits chimiques, l’émission massive de gaz à effet de serre, les monocultures qui épuisent les sols et les réserves aquatiques, l’utilisation irrationnelle des énergies, la production d’armes nucléaires, chimiques, biologiques – sont contraires à la responsabilité humaine envers la nature, le Bien commun de l’humanité et le Bien vivre, et donc passibles de sanctions.
Article 2 : Assurer l’harmonie entre tous les éléments de la nature
Les peuples de la Terre ont le devoir de vivre en harmonie avec tous les autres éléments de la nature. Aucune action de développement entraînant des dommages graves et irréversibles pour la vie de la nature – qui est aussi le pilier de la reproduction de la vie physique, culturelle et spirituelle de l’humanité – ne pourra être entreprise. L’information et la consultation préalable des communautés ou des populations concernées par les projets d’extraction de minéraux, de travaux publics ou de toute utilisation des richesses naturelles, seront les principes à respecter.
Sont contraires au Bien commun de l’humanité et devront faire l’objet de sanctions, toute action, toute institution et tout système environnemental qui adoptent des modèles de développement contraires à l’intégrité et à la reproduction du système écologique.
Article 3 : Protéger la Terre, base de toute vie, physique, culturelle, spirituelle
La nature est une réalité unique et limitée, source de vie de toutes les espèces qui l’habitent aujourd’hui et de toute entité vivante à naître dans l´avenir. La Terre peut être gérée par les êtres humains, avec les garanties nécessaires de continuité dans la gestion, mais elle ne peut pas devenir une propriété, ni une marchandise, ni une source de spéculation. Elle ne peut subir des agressions systématiques et irréversibles, quel que soit le mode de production. Les richesses naturelles – ressources minières, pétrolières, océaniques, forestières – sont des patrimoines collectifs qui ne peuvent être appropriés, ni par des individus, ni par des entreprises, ni par des groupes financiers. Les éléments de la Terre – sols, air, eau, mer, rivières, forêts, bois, flore, faune, espaces, génome, etc. – doivent être gérés, extraits et traités en respectant la reproduction des écosystèmes, la biodiversité, la vie des espèces, l’équilibre du métabolisme entre Nature et espèce humaine, le Bien vivre des peuples actuels et des générations futures.
Sont contraires au respect constructif de la Nature, au Bien commun de l’humanité, et par conséquence sont exclus et passibles de sanctions : la pollution des eaux, des sols et des mers ; la prise de brevets sur la nature ; la privatisation de la Terre ; la mise en marchandise des richesses naturelles et des éléments naturels nécessaires à la reproduction de la vie des espèces vivantes, en particulier l´eau, l´oxygène, les semences.
Article 4 : Garantir la régénération de la Terre
La Terre doit être restaurée de manière urgente dans sa capacité de régénérescence. Tous les peuples et groupes humains ont l´obligation de contribuer à cet objectif. L’inventaire et le contrôle des impacts environnementaux s’imposent, tout autant que les évaluations et la réparation des préjudices causés. Tous les peuples et individus, et particulièrement, les industries, entreprises et gouvernements, ont le devoir de réduire, réutiliser et recycler les matériaux utilisés pour la production, la circulation et la consommation des biens.
Sont contraires au Bien commun de l’humanité, et donc passibles de sanctions : la diminution artificielle de l’espérance de vie des produits, le gaspillage d’énergie et d’autres matières premières, les dépôts irresponsables de déchets dangereux et les omissions ou les
reports de la restauration écologique.
II.- La production économique au service de la vie et de sa continuité
Article 5 : Utiliser les formes sociales de production et de circulation, sans accumulation privée
Pour assurer le Bien commun de l’humanité et le Bien vivre, il est indispensable que les personnes, les institutions et les systèmes économiques donnent la priorité aux formes sociales de propriété des principaux moyens de production et de circulation économique – communautaire, familiale, communale, coopérative, citoyenne, publique – en évitant ainsi les processus d’accumulation individuelle ou corporative qui provoquent injustement les inégalités sociales. Le contrôle de la production et de la circulation des biens et des services, de même que celui du système financier par les travailleurs et les consommateurs, sera organisé selon les formes sociales adéquates, allant de la coopérative à la participation citoyenne ou à la nationalisation. L´appropriation par des individus, des entreprises ou des groupes financiers, des moyens de production et de circulation en vue d´une accumulation capitaliste privée, est contraire au Bien commun de l’humanité, et donc prohibée.
Article 6 : Donner la priorité à la valeur d’usage sur la valeur d´échange
Le système économique de production et de circulation est destiné à répondre aux nécessités et aux capacités de tous les peuples et de tous les individus de la planète. L’accès aux valeurs d’usage est un droit fondamental qu’exigent la production et la reproduction de la vie. La valeur d´échange, produit de la commercialisation, doit être soumise à la valeur d’usage et ne peut servir à l’accumulation du capital et à la formation de bulles financières fruits de la spéculation et sources de profondes inégalités sociales.
Sont contraires au Bien commun de l’humanité et au Bien vivre, et donc sont interdites, toutes les actions individuelles ou corporatives de circulation économique qui mercantilisent les valeurs d’usage comme de simples valeurs d´échange, les instrumentalisent par la publicité pour une consommation irrationnelle et poussent à la spéculation pour une accumulation privée du capital. Sont également contraires au Bien commun de l’humanité : les paradis fiscaux, le secret bancaire, la spéculation sur les produits alimentaires, les richesses naturelles et les sources d’énergie.
Sont déclarées illégales les « dettes odieuses » publiques et privées, de même que la pauvreté, en tant que fruit d’un rapport social injuste.
Article 7 : Promouvoir un travail non exploité et digne
Les processus de production et de circulation doivent garantir aux travailleurs un travail digne, participatif, adapté à une vie familiale et culturelle, favorisant leurs capacités et garantissant une existence matérielle adéquate. Toutes les formes modernes d’esclavage, de servitude et d’exploitation du travail – notamment des enfants – dans le but d’un profit personnel ou d’une accumulation privée de la plus-value, et toutes les limitations à la liberté d´association des travailleurs, s´opposent au Bien commun de l´humanité et sont donc passibles de sanctions.
Article 8 : Reconstruire les territoires
Face à la mondialisation qui a favorisé une économie unipolaire, la concentration des pouvoirs de décision, l’hégémonie du capital financier et une circulation irrationnelle des biens et des services, il est indispensable de reconstruire les territoires comme base de la souveraineté alimentaire et énergétique et des principaux échanges ; de régionaliser les économies sur la base de la complémentarité et de la solidarité et, pour les régions périphériques, de se « déconnecter » des centres économiques hégémoniques, pour établir une autonomie commerciales, financière et de production.
Est contraire au Bien commun de l’humanité, et donc est interdite, la constitution de monopoles et d´oligopoles, quels que soient les champs d’activité de production, de circulation ou de financement.
Article 9 : Garantir l’accès aux biens communs et à une protection sociale universelle
Il existe des biens communs indispensables pour la vie collective des individus et des peuples, qui constituent des droits imprescriptibles. Il s’agit de l’alimentation, de l’habitat, de la santé, de l’éducation et des communications matérielles et immatérielles. Il existe aussi différents moyens de contrôle citoyen ou de propriété sociale pour l’organisation efficace de l’accès à ces biens et services. La « protection universelle » est un droit de tous les peuples et de tous les individus, et donc un devoir des autorités publiques, qui doit être assuré par une fiscalité adéquate. Est contraire au Bien commun de l’humanité, et donc interdite, la privatisation des services publics dans le but de contribuer á l´accumulation du capital privé. Sont passibles de sanctions : la spéculation sur l’alimentation, le logement, la santé, l’éducation, les communications, de même que toute corruption dans l´exercice de ces droits.
III.- L’organisation collective démocratique comme base de l’être humain en tant que sujet
Article 10 : Généraliser la démocratie et assurer la construction du sujet
Tous les peuples et tous les êtres humains sont des sujets de leur histoire, et ont droit à une organisation collective sociale et politique le garantissant. Celle-ci doit assurer l’harmonie avec la Nature et l’accès de tous aux bases matérielles de la vie, par le biais de systèmes de production et de circulation basés sur la justice sociale. A cet effet, l’organisation collective doit permettre la participation de tous à la production et la reproduction de la vie physique de la planète et des êtres humains, c’est-à-dire du Bien commun de l’humanité. Le principe organisateur de cet objectif est la généralisation de la démocratie dans tous les rapports sociaux – famille, genre, travail, exercice de l’autorité publique -, entre les peuples et les nations et au sein de toutes les institutions sociales, politiques, économiques, sociales, culturelles et religieuses.
À côté des initiatives politiques de démocratie participative, seront développées des formes de participation dans tous les secteurs de la vie commune, économique, sociale, culturelle. Sont contraires au Bien commun de l’humanité et au Bien vivre, toutes les formes non démocratiques d’organisation de la vie politique, économique, sociale et culturelle de la société. Les génocides sont condamnés comme actes irréparables de discrimination. Sont passibles de sanctions toutes les discriminations de genre, race, nation, culture, préférence sexuelle, capacité physique ou mentale, religion et appartenance idéologique.
Article 11 : Établir une relations d’égalité entre hommes et femmes
Une importance particulière sera accordée aux relations entre hommes et femmes, inégales depuis des temps immémoriaux et dans les différentes sociétés qui se sont succédées au cours de l´histoire de l´humanité. Toutes les institutions et tous les systèmes sociaux et culturels doivent reconnaître, respecter et promouvoir le droit à une vie pleine des femmes, égale à celle des hommes.
Sont contraires au Bien commun de l’humanité les actions sociales et économiques, les institutions et les systèmes culturels et religieux qui défendent ou appliquent la discrimination de la femme. Sont passibles de sanctions toutes les formes de domination masculine, et notamment les différences de revenu économique salarial et la non reconnaissance du travail domestique intrafamilial lié à la reproduction de la vie.
Article 12 : Interdire la guerre
Les relations internationales démocratiques ne permettent pas l’utilisation de la guerre pour résoudre les conflits. De nos jours, la paix n’est pas garantie par la course aux armements. L’existence d’armes nucléaires, biologiques, chimiques, met en danger la vie de l’humanité. Les armements se sont transformés en marchandises. Leur fabrication entraîne un gaspillage énorme d’énergie, de richesses naturelles et de talents humains, et leur utilisation provoque, outre des pertes de vies humaines, de graves destructions environnementales.
Sont contraires au Bien commun de l’humanité, et donc sont interdits : la fabrication, la possession et l’utilisation des armes de destruction massive ; l’accumulation des armes conventionnelles pour établir des hégémonies régionales et contrôler les ressources naturelles ; les pactes régionaux hégémoniques ; la solution militaire pour résoudre des problèmes politiques internes.
Article 13 : Construire l’État en fonction du Bien commun
Le rôle de l’État, comme administrateur collectif, est d’assurer le Bien commun, c’est-à-dire l’intérêt général, face aux intérêts individuels ou particuliers. Une participation démocratique est donc nécessaire pour définir le Bien commun (les Constitutions) et pour les appliquer. Tous les peuples de la Terre, dans la pluralité de chacun de leurs membres, des organisations et mouvement sociaux, ont droit à des systèmes politiques de participation directe ou déléguée avec mandat révocable. Les gouvernements régionaux et les organisations internationales doivent se construire sur un principe démocratique, en particulier les Nations unies. Cela vaut pour toutes les institutions qui représentent des secteurs d’activité ou des intérêts spécifiques, comme les entreprises industrielles ou agricoles, les organismes financiers ou commerciaux, les partis politiques, les institutions religieuses ou syndicales, les ONG, les groupes sportifs ou culturels, les institutions humanitaires. Sont contraires au Bien commun de l’humanité, et donc prohibés : tout système dictatorial ou autoritaire de l’exercice du pouvoir politique ou économique, au sein duquel des minorités non représentatives – formelles ou informelles – monopolisent les décisions sans participation, initiative ou contrôle populaires.
Sont également interdites les subventions publiques aux organisations, mouvements sociaux, partis politiques, institutions culturelles ou religieuses qui ne respectent pas les principes démocratiques ou exercent des discriminations de genre ou de race.
Article 14 : Garantir les droits des peuples originaires
Les peuples originaires ont le droit d’être reconnus dans leurs différences. Ils ont besoin des bases matérielles et institutionnelles permettant la reproduction de leurs coutumes, langues, cosmovisions, institutions communales : un territoire de référence protégé, une éducation bilingue, un système judiciaire propre, une représentation publique, etc. Ils sont à l´origine de facteurs importants dans le monde contemporain : la protection de la Terre-Mère, la résistance au mode extractif-exportateur de production et d’accumulation, une vision holistique de la réalité naturelle et sociale.
Sont contraires au Bien commun de l’humanité, et donc sont interdits : les actions, les institutions et les systèmes économiques, politiques et culturels qui détruisent, séparent, discriminent ou font obstacle à la vie physique, culturelle et spirituelle des peuples originaires.
Article 15 : Respecter le droit à la résistance
Tous les peuples et groupes sociaux ont le droit de développer une pensée critique, d’exercer des résistances pacifiques contre les actions destructives de la Nature, de la vie humaine, des libertés collectives ou individuelles et des cultures, et, si nécessaire, ont le droit à l’insurrection. Sont contraires au Bien commun de l’humanité, et sont donc prohibés : les censures de la pensée, la criminalisation des résistances et la répression violente des mouvements de libération.
IV.- L’interculturalité en tant que dynamique de la pensée et de l’éthique sociale
Article 16 : Établir l’interculturalité
Le Bien commun de l’humanité implique la participation de la totalité des cultures, savoirs, arts, philosophies, religions, folklores, à la lecture de la réalité, à l’élaboration de l’éthique nécessaire pour la construction, à la production de leurs expressions symboliques, linguistiques et esthétiques, et à la formulation des utopies. On ne peut pas détruire la richesse culturelle du genre humain, créée comme un patrimoine tout au long de l’histoire. L’interculturalité implique la contribution croisée de toutes les cultures, dans leur diversité, aux différentes dimensions du Bien commun de l’humanité : respect de la nature en tant que source de vie, priorité à la valeur d’usage sur la valeur d’échange sur la base de la justice sociale, de la démocratisation généralisée, de la diversité et des échanges culturels.
Sont contraires au Bien commun de l’humanité et au Bien vivre, et sont donc interdits : les ethnocides culturels, les pratiques, institutions et systèmes culturels qui voilent, discriminent ou folklorisent les réussites culturelles des peuples et qui imposent une homogénéisation mono-culturelle, en identifiant développement humain et culture occidentale. Sont également interdits les pratiques, les institutions et les systèmes politico-culturels qui exigent le retour à un passé illusoire, en promouvant la violence ou la discrimination entre les peuples.
Article 17 : Assurer le droit à l’information et à la circulation des savoirs
Tous les peuples et individus ont le droit à l’information pour échanger des savoirs, des connaissances, des informations utiles à la construction du Bien commun de l’humanité. Sont contraires au Bien commun de l’humanité et donc interdits, les monopoles des moyens de communication par des groupes de pouvoir financier ou industriel ; la marchandisation des publics par les agences de publicité ; le contrôle exclusif et non participatif des États sur le contenu de l’information ; les brevets sur les savoirs scientifiques, empêchant la circulation des connaissances pour le Bien vivre des peuples.
V.- Obligations et sanctions pour la non-exécution de la Déclaration
Article 18 : L’application du paradigme du Bien commun de l’humanité
La violation des droits exprimés dans cette Déclaration, formant un ensemble destiné à construire en permanence le Bien commun de l´humanité, ou la non-exécution des mécanismes prévus par cette même déclaration, doivent être connus, jugés, sanctionnés et réparés, au prorata de la dimension et des effets du mal causé et, quand elles existent, en accord avec les dispositions des législations nationales et du droit international. Des mesures de transition à court et à moyen termes (réformes et régulations) permettront de transformer les rapports à la Nature, d’établir la priorité de la valeur d’usage, de généraliser la démocratie et de créer l’interculturalité. Elles ne pourront cependant pas signifier une simple adaptation du mode contemporain d’accumulation aux nouvelles demandes écologiques et sociales.
Sont contraires au Bien commun de l’humanité et au Bien vivre, et donc frappées de nullité : toute impunité, loi de « point final », amnistie ou toute autre disposition impliquant un déni de justice envers les victimes : la Nature et son élément conscient, le genre humain.
Texte repris du site Mémoire de luttes