Ça roule au CAPMO – décembre 2016 format pdf
Le métalangage de la vie
Ivan Illich écrit dans « Libérez l’avenir » que ce qui importe dans l’apprentissage d’une langue, ce sont les silences, les espaces qui marquent les temps d’arrêt permettant l’écoute et l’établissement d’une entente cordiale. Il ne suffit pas de maitriser la grammaire, il faut s’accorder à l’autre pour comprendre et porter avec soi les préoccupations et les joies qui donnent sens à une culture. Du même souffle, Illich récuse ceux ou celles qui arrivent en pays étranger sachant d’avance la teneur de leur propos, prêts à terrasser l’habitant avec leurs vérités conquérantes. « Ceux-là, dit-il, ne peuvent qu’engendrer haine et colère de la part de ceux ou celles qui les reçoivent sans être entendus. »
Pour la sociologue bolivienne Silvia Rivera Chusicanqui, le raisonnement n’est pas la seule forme qu’épouse la pensée. Selon elle, la psyché occidentale réfléchit à partir du sens de la vue, tandis que certaines cultures andines incluent des manières de penser à partir du cœur, des poumons ou du foie. « Cette référence aux trois organes supposent que l’acte de penser se réalise au sein même de l’effort nécessaire à la vie. Cela donne naissance à une éthique de la vie pour notre temps », affirme Chusicanqui.
Chez les Aymaras, l’individualité et les particularités sont respectées en éveillant les enfants au potentiel créatif de chacunE. Pour eux l’éducation n’est pas qu’une répétition des connaissances transmises par la société moderne. «Parce qu’elle est réductrice et homogénéisatrice, la raison occidentale ne permet pas l’émergence de sujets libres dans leur plénitude créatrice, dans leurs particularités de goûts, de couleurs, de connaissance de soi. La rationalité cartésienne binaire s’avère profondément autoritaire au cœur du processus éducatif. Toutefois il ne s’agit pas de tout rejeter en bloc car cette rationalité appartient en propre à notre subjectivité. C’est elle qui a permis les grandes percées scientifiques, de reconnaître la primauté de la dignité humaine et ses droits constitutifs. »
« Pour cela, il faut redécouvrir les sources originales de la pensée occidentale avant qu’elle ne soient perverties par l’esprit de domination et d’accaparement. Il faut faire de même avec la sagesse autochtone afin de la libérer de la gangue du fétichisme et de la magie, des archaïsmes, des stéréotypes, des préjugés favorables ou défavorables, qui nuisent à la plénitude de son entendement. » Il faut comprendre les rituels comme un métalangage qui s’adresse à la psyché humaine.
« La cosmovision amérindienne reconnait la qualité de sujet à tous les êtres naturels, les animaux communiquent avec nous, les étoiles nous regardent et les pierres possèdent une énergie. De temps à autres, les morts nous visitent. Nous vivons des cycles dont la mort et la vie sont parties prenantes.» « Chez les Aymaras, l’esprit des défunts s’en va vers l’Ouest et ils renaissent à la vie en empruntant des rivières souterraines qui coulent vers l’Est (l’enfant naît dans l’eau de sa mère). Les plus saints finissent par habiter les neiges éternelles des Andes. » « Vivre en communauté est l’une des finalités de l’existence humaine. Pour nous, le travail de la terre en commun n’est pas un fardeau, mais un plaisir partagé. Les repas pris ensemble en silence favorisent l’entendement. La communauté naît de l’auto-convocation, et de la cohérence que doit avoir chaque vie personnelle. »
« Marcher en actualisant les forces du passé qui ont un avenir, c’est reconnaître que chaque génération reçoit un enseignement de celles qui les ont précédées. Bien vivre, c’est parler et marcher en étant vrai. Cela signifie : écouter avant de parler, faire ce qu’on dit, et ne pas imposer ses idées aux autres car la parole naît de l’interaction avec l’autre, de la répartition de la parole entre tous et toutes. » Mais pour entrer dans ce grand dialogue, il faut se réapproprier notre subjectivité saccagée par le colonialisme et le matérialisme consommateur qui ont fait de nous des êtres craintifs et dépendants.»
Yves Carrier
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La LAICITÉ, VALEUR SPIRITUELLE
Souvent présentée comme valeur citoyenne, ce qu’elle est aussi, encadrée par les valeurs spirituelles et humaines, elle en est partie prenante, puisque l’on peut percevoir les religions comme des faits de culture, de civilisations que l’on peut opposer les unes aux autres dans un cadre où le politique manipule le spirituel.
Le religieux est un vecteur de la spiritualité, un véhicule du besoin spirituel, du désir, faudrait-il préciser. D’où son succès actuel et son in-éradicabilité. Non, on ne pourra jamais se débarrasser de la religion. C’est un ancien communiste qui vous le dit. Il faut faire avec et la comprendre. La religion est le meilleur moyen de contrôle de la population, car la spiritualité, la quête de sens, est un besoin essentiel de l’être humain.
Il faut donc affirmer avec force que la spiritualité est une question individuelle et personnelle; elle transcende le politique, le religieux, l’économie, bien qu’elle s’incarne dans tous les domaines de la vie.
Mais de quelle laïcité parlons-nous? Avant de décréter des lois, des chartes, des règlements, ce qui est citoyen, il faut interroger les valeurs humaines et spirituelles qui doivent encadrer les valeurs citoyennes. Certains modèles sont à prendre avec des pincettes avec leurs bonnes intentions, leurs radicalismes, leurs réflexes identitaires. Plusieurs pays sont des phares dans ce domaine, que la laïcité progresse ou soit en recul : France, Turquie, Tunisie… La société québécoise est aussi au cœur du débat. Et il faut prendre garde.
Il faut faire la part entre l’identité et l’appartenance pour en arriver à une juste conception de la laïcité. L’identité a un double sens, ce qui nous rend identiques à une essence, ce qui nous ressemble et nous rassemble, et, d’autre part, ce qui nous identifie personnellement, ce qui nous distingue des autres avec lesquels nous avons beaucoup en commun sur les plans humains, citoyens et spirituels.
Ce qui nous rassemble, c’est ce que nous avons d’identique, notre humanité, notre citoyenneté, notre spiritualité. Et cela compte davantage que nos appartenances, lesquelles permettent de nous reconnaître, de nous identifier, de nous distinguer. Mais négliger cet aspect au nom de notre universalité est très dangereux, car le premier réflexe est de s’identifier à des familles, des clans, des tribus, des nations, des cultures. Et la meilleure manière d’être universel est d’être québécois. Le particulier, le singulier, est la façon d’être universel. L’appartenance nous identifie. Pire que l’appartenance peut-être, l’uniformité, qui revient à imposer une seule appartenance. C’est le danger intégriste.
Robert Lapointe
Quelle est la source de la richesse, et de la pauvreté. Elle est liée à la valeur, ce à quoi on attribue de la valeur laquelle, en principe, n’a pas de prix, est inestimable, n’est pas monnayable. Donc, ce qui a de la valeur n’est pas économique, c’est plutôt de l’ordre du sacré, du spirituel, ou encore historique, ou inspirant, qui trouve sens et émotion. Cette argumentation vaut davantage pour la plus récente conception de la valeur, où elle est explicite. Elle est plutôt implicite, non dite, méconnue, ignorée, dans les conceptions plus économistes des trois derniers siècles du dernier millénaire.
En fait, il y a beaucoup plus de liens que l’on pense entre les divers domaines de la connaissance et de l’activité humaines. Deux mots parmi d’autres comme exemples : crédit vient de credo, je crois, et commerce, qui signifie avec grâce ou miséricorde, vieux sens du mot merci.
D’ailleurs, il semble qu’à chaque théorie correspond un siècle où elle est dominante. Celle des physiocrates date du XVIIIème siècle. La théorie capitaliste domine depuis le XIXème quoique élaborée au siècle précédent. Celle du marxisme, née au XIXème, compétitionne avec le capitalisme au XXème. La dernière, à venir, à naître, à construire, s’inspire de la géographie structurale, élaborée à Québec par le professeur Gilles Ritchot, et de la théorie du rachat de Thierry Rebour, penseur français.
Il ne s’agit pas de choisir une théorie contre l’autre, mais d’y voir une évolution, chacune développant certains aspects de la précédente et ajoutant des dimensions oubliées ou négligées
Les physiocrates
Ils ont fondé la science économique en la rendant indépendante des autres domaines de la pensée. François Quesnay (1694-1774) est leur représentant le plus célèbre. Pour eux, la terre est la seule source de la valeur et de la richesse. Les produits de la terre et des mines sont seuls valables. La transformation, le transport et le commerce sont des domaines stériles lesquels permettent, diraient les capitalistes, de réaliser la valeur. La destruction des terroirs agricoles riches autour de Montréal par exemple leur apparaîtrait comme une destruction de la valeur.
Ils ont raison bien sûr en ce qui concerne cette origine de la valeur qui concerne les sols et les sous-sols riches qui peuvent être converties en richesse par la transformation et la vente, mais ce n’est pas suffisant selon les théories capitalistes et marxistes qui négligent quelque peu cette source de la valeur. On y reviendra dans la dernière théorie, mais d’une façon différente un peu entrevue dans l’introduction.
Dans la prochaine livraison de cette feuille de chou, nous présenterons les théories de la valeur capitaliste et marxiste, s’il y a suffisamment de la place.
Robert Lapointe
L’UPA prise au piège de sa logique productiviste
par Jacques B. Gélinas, L’Aut’Journal, 25/10/2016
Dans un article paru dans Le Devoir du 27 septembre dernier, le président de l’Union des producteurs agricoles (UPA), M. Marcel Groleau, lance un cri d’alarme : l’émergence d’un nouvel oligopole des intrants agricoles menace notre système agroalimentaire.
L’acquisition de Monsanto par Bayer, au coût astronomique de 87 milliards de $CAN, fait suite à trois mégafusions effectuées dans le secteur de l’agrochimie, en moins d’un an: DowChemical-DuPont, Syngenta-ChemChina et PotashCorp-Agrium. On assiste à la consolidation d’un puissant oligopole qui détient plus de 50 % du marché mondial des intrants agricoles: engrais chimiques, semences, pesticides, herbicides, OGM.
«Cette vague de fusions soulève plusieurs questions fondamentales et ça nous concerne tous», avertit M. Groleau. Il décrit quelques-unes des questions fondamentales que soulève l’emprise de cet oligopole sur l’agriculture et sur notre alimentation : hausse du prix des intrants et, conséquemment, du coût de notre panier d’épicerie; perte de diversité alimentaire, réduite pour l’essentiel à 12 espèces végétales et 14 espèces animales; mise en échec de l’État impuissant à contrôler le monstre.
Le président de l’UPA oublie toutefois de mentionner deux autres impacts de ces intrants agrochimiques qui nous concernent tous au plus haut point : 1) la dégradation de l’environnement par le déversement de tous ces poisons dans les sols, dans l’eau et dans l’air; 2) l’agression contre la santé de nous tous qui buvons cette eau, respirons cet air et mangeons ces fruits et légumes enduits d’une quantité démentielle de produits chimiques perturbateurs endocriniens, souvent cancérigènes. Les pommes que nous offrent les supermarchés contiennent 50 résidus de pesticides différents. Et l’on cherche la cause de l’augmentation fulgurante des cas de cancers…
On s’attendait à ce que le président de l’UPA, après avoir dénoncé la mainmise des géants de l’agrochimie sur l’agriculture, propose une issue viable. Il en tire plutôt une conclusion désespérante : «Les intrants agricoles sont nécessaires. La demande pour ces produits est en croissance et, en pratique, incompressible, car on peut difficilement les remplacer». C’est avouer que l’agriculture québécoise est prise au piège. Le piège du productivisme dans lequel l’UPA l’a elle-même entraînée.
L’agriculture productiviste est un système d’exploitation fondé sur une augmentation constante de la production et de la productivité par l’utilisation croissante d’une machinerie lourde, d’engrais chimiques, d’hormones de croissance, d’antibiotiques, de pesticides et d’OGM. La concentration des fermes fait partie de ce système du toujours-plus-gros… pour rester concurrentiel. Depuis 1950, 100 000 fermes ont disparu au Québec. Et la saignée continue.
Comment l’UPA a entraîné l’agriculture québécoise dans le piège productiviste ?
Si aujourd’hui la demande pour les pesticides et les engrais chimiques ne cesse de croître, c’est que la haute direction de l’UPA a délibérément opté, en 1992, pour le néolibre-échange et, du même coup, pour l’agriculture productiviste.
Dans les années 1980, l’UPA, sous la présidence de Jacques Proulx, s’oppose farouchement aux nouveaux accords en négociation: l’Accord de libre-échange Canada-États-Unis et l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA). Pourquoi? Parce que ces accords vont inclurent, pour la première fois dans l’histoire, les produits agroalimentaires, qui seront soumis à la libre concurrence et à toutes les spéculations.
Or, voici qu’en 1992, l’UPA, toujours présidée par Jacques Proulx, accepte, sans consultation préalable de sa base, la nouvelle stratégie proposée par le MAPAQ et les stratèges du gouvernement Bourassa: la conquête des marchés. Entendez les fabuleux marchés mondiaux. Cette orientation exige l’adhésion au libre-échange continental, voire mondial.
Aujourd’hui, les dirigeants de l’UPA sont aux abois. Deux méga traités de néolibre-échange – l’Accord économique et commercial global Canada-Union européenne et l’Accord de partenariat transpacifique – menacent l’agriculture québécoise. Ils supplient les gouvernements fédéral et provincial de protéger le modèle québécois. Ils n’ont rien vu venir. Ils n’ont pas vu que le néolibre-échange et son pendant, le productivisme, conduisaient fatalement à la disparition de la gestion de l’offre, de la ferme familiale et du système agricole québécois.
Des alternatives existent que les dirigeants de l’UPA ne veulent pas voir.
Contrairement à ce que prétend l’actuel président de l’UPA, il existe des alternatives aux produits fournis par les alchimistes des intrants agricoles. Les expériences se multiplient sous nos yeux : agriculture biologique, permaculture, agriculture soutenue par la communauté, agriculture multifonctionnelle. Sans oublier les «incroyables commestibles», une innovation propagée par le film Demain. Les dirigeants de l’UPA, aveuglés par leur implication collusionnaire dans la filière productiviste, refusent de voir ces avenues.
Dans son livre Les champs de bataille : Histoire et défis de l’agriculture biologique au Québec, Roméo Bouchard décrit 40 ans d’efforts acharnés pour implanter chez nous ce modèle agricole. «L’agriculture biologique est née,explique-t-il, d’une volonté de rompre avec les intrants chimiques et les dogmes du productivisme et de renouer avec la nature.» Créé en 1974, le Mouvement d’agriculture biologique (MAB) reçoit à ses débuts l’appui enthousiaste des dirigeants de l’UPA. En 1989, son premier vice-président, Pierre Gaudet, déclare : «L’agriculture biologique ne fait plus partie du folklore granola, c’est une question économique. Nous voulons sauver nos terres qui se meurent d’avoir été surexploitées. La demande pour les produits biologiques (cultivés sans produit chimique) est sans cesse croissante. D’Ici 10 ans, 20 % des producteurs utiliseront les méthodes de l’agrobiologie et dans 20 ans, 40 à 60 % de la production agricole sera biologique.» (Ibidem)
Hélas, trois ans plus tard, l’UPA virait capot, comme on l’a vu plus haut. Aujourd’hui, ce n’est pas 40 % de la production agricole qui est biologique, mais à peine 2 %. Nos producteurs bio ne fournissent pas à la demande. Ni l’UPA ni le MAPAQ ne les encouragent. La certification – octroyée par des agences chapeautées par le MAPAQ – a un prix qui peut varier de 700$ à 2000$ annuellement. De plus, il y a la cotisation annuelle obligatoire à l’UPA: une mordée de 331$, plus taxe, pour un agriculteur individuel; le double pour une ferme d’associés (exemple: une agricultrice et son mari); le triple pour une ferme de trois propriétaires (exemple: le père, la mère et leur enfant).
Malgré cela… Si vous parcourez l’une ou l’autre des régions du Québec, vous y trouverez des artisans agricoles ingénieux, inventifs et passionnés, qui ont à cœur la qualité des aliments, la santé, l’environnement et le développement local. À Frelighsburg, en Estrie, on peut visiter le Clos Saragnat, un verger entièrement biologique, qui produit une quarantaine de variétés de pommes, lesquelles n’ont pas droit aux étalages des supermarchés. Ces pionniers ont inventé le cidre de glace. Non loin de là, vous découvrirez la Ferme du Haut-Vallon qui offre des produits biologiques de grande qualité : pommes, raisins, ail, agneau, sirop d’érable.
Dans la municipalité voisine, à Saint-Armand, vous serez épatés par les rendements de la micro ferme La Grelinette du jardinier-maraîcher, Jean-Martin Fortier, qui lui rapporte plus de 100 000$ annuellement, avec moins d’un hectare en culture biologique. Un peu plus à l’ouest, à Hemmingford, en Montérégie, on trouve la Ferme des Quatre-Temps, parrainée par André Desmarais – eh oui, le fils et le frère de Paul et Paul – converti à une alimentation saine et donc à l’agriculture biologique. Il a demadé au jardinier-maraîcher Fortier de le seconder. Voilà enfin un membre de notre élite économique qui a de la vision. Il a simplement vu que l’avenir de notre alimentation, de notre santé, de nos régions et de nos jeunes est dans une agriculture biologique, intensive et… très rentable. «Je veux attirer les jeunes dans le métier et nourrir les gens avec des aliments plus sains», a-t-il déclaré à la chroniqueuse Josée Blanchette (Le Devoir, le 10 juin 2016).
Redécouvrir le rapport Pronovost
Le président de l’UPA a donc tort, terriblement tort, d’affirmer que la demande pour les intrants agrochimiques est incompressible et que ces produits sont difficilement remplaçables. Un spectre hante le monde agricole québécois: le rapport Pronovost. En 2008, la Commission sur l’avenir de l’agriculture et de l’agroalimentaire québécois, présidée par Jean Pronovost, a déposé un rapport solide, étoffé et réaliste, qui ouvre la voie à une agriculture écologique et sociale. Les dirigeants de l’UPA l’ont aussitôt rejeté et ne manquent pas une occasion de le critiquer. M. Groleau n’aurait qu’à le relire et à s’en inspirer pour sortir l’agriculture québécoise du cul-de-sac étouffant des intrants agrochimiques.
LES « TRUMPERIES » D’UNE DÉMOCRATIE EN ÉTAT DE PSYCHOSE
Victor H. Ramos, anthropologue
« La victoire de la colère » (Le monde), « Trumpocalaypse » (Libération), « La revanche des petites gens… » (Daily Mail de Londres), « An American Tragedy » (The New Yorker), « La maison des horreurs », avec la maison blanche comme fond (Daily News), etc., ce sont quelques exemples des titres sensationnalistes des journaux de par le monde. Les médias locaux et internationaux et leurs spécialistes se sont totalement trompés quant au résultat des élections présidentielles des États-Unis du 8 novembre et pendant la longue campagne électorale prenant leur désir pour la réalité.
Comment est que les Étasuniens ont pu élire un personnage avec des idées si rétrogrades, sexistes et xénophobes, n’étant pas tous les électeurs une bande de décérébrée? Pour résoudre cette fausse énigme, car il n’en est pas une, il faut percer l’épaisse couche d’informations partielles des grands médias et interpeller plutôt la réalité économique, politique et sociale frustrante et difficile dans laquelle vivent une partie importante des citoyens des États-Unis. Il faut aussi considérer l’écœurement d’une très importante partie de la population étasunienne de la politique du mensonge et de l’abandon des principes démocratiques par la classe politique de deux principaux partis. En même temps, il faut tenir compte de deux importantes traditions économiques étasuniennes contraires qui prédominent alternativement chacun avec leur lot de problèmes pour la population et les bénéfices pour la classe corporative et les très riches : les livres échangistes et les protectionnistes, dont de ces derniers fait partie Trump.
Libre-échange et exclusion
Depuis presque trente ans, le libre-échangisme impose ses lois aux États-Unis et ailleurs. La globalisation néolibérale qui promettait un « nouvel ordre économique et politique mondial » de richesse et de paix, bref la « terre promise », le paradis pour tous « n’a pas livré la marchandise »… Au contraire, la pauvreté a augmenté dans la plupart des pays, la brèche entre le 1% des privilégiés de la planète et le 99% de la population mondiale a augmenté de façon très importante… Aux États-Unis, l’économie va mieux, le taux de chômage officiel est 4,9 %, la bourse bat de records historiques, les banques font d’importants profits, etc. Cependant, selon une étude d’une agence de presse, près de 50 millions de personnes vivent même en dessous du seuil de pauvreté et ils seraient 5 millions de plus sans l’aide pour l’alimentation! L’étude a également montré que l’écart de richesse entre riches et pauvres était plus grand que jamais aux États-Unis. Chez les Latino-américains, 27,8 % vivent en dessous du seuil de pauvreté et 16,7 % des Asiatiques américains. Les Afro-Américains d’un autre côté, ont maintenant une vie un peu moins difficile (de 27,3 % à 25,8 %), mais les blancs sont passés de 9,8 % à 10,7 % dans cette catégorie plus précaire parmi les pauvres. « La raison principale qui maintient la pauvreté à un seuil si haut vient du fait que les bénéfices d’une économie qui croît ne sont plus partagés par tous les travailleurs… » (Associated Press, avril 2014) Il y a aux États-Unis plus de 3,5 millions de sans-abri, dont 35% sont de familles avec enfants. Le Bureau américain de recensement affirme que près de 150 millions d’Américains (presque la moitié de la population totale) sont « pauvres » ou à « faible revenu » et 48 millions reçoivent des bons d’alimentation, dont 43% sont des travailleurs! La tendance prédominante de ce monde néolibéral globalisé de la concentration de la richesse dans les mains des riches et la dégradation de la qualité de vie et l’augmentation de la pauvreté se vérifie aussi dans ce grand pays.
Une démocratie en état de psychose
Pour ce texte, nous utilisons le terme « psychose » dans le sens suivant : « terme générique psychiatrique désignant un trouble ou une condition anormale de l’esprit, évoquant le plus souvent une ‘perte de contact avec la réalité’ » (Wikipédia) Force est de constater que dans les conditions socio-économiques dans laquelle vivent une partie très importante de la population des États-Unis, auxquelles l’on peut ajouter le problème de l’insécurité et la violence croissante, la « démocratie » représentative, ses institutions et les politiciens ont perdu contact avec cette réalité très difficile de désespoir et qui provoque la colère des citoyens. Ce désespoir et ces frustrations de différentes sortes n’ont pas été perçus non plus par les médias, d’ailleurs contrôlés par les grandes corporations des gens fortunés. Il y a le pays des riches et des politiciens à leur service où l’on amasse beaucoup de richesses et le pays de la majorité où l’on accumule les « bleus » et la frustration de décennies de salaires bas, voire de misère, d’insécurité et de précarité au travail. Bref de décennies d’exclusion et d’appauvrissement.
Dans cette « trumperie » politique, un non-politicien comme Donald Trump, un « anti establishment » politique, mais membre de l’« establishment » économique, avec un discours faussement à faveur de la majorité exclue a réussi à canaliser à sa faveur la frustration et la colère de différents électeurs. Et cela en dépit de son discours « corrosif », inquiétant et simpliste. Mais il faut souligner quand même que sa position contre les traités de libre-échange a un fond réel et qui fait écho aux réclamations de millions de travailleurs appauvris à cause de ces traités qui facilitent énormément l’émigration des capitaux vers les pays qui ont les plus bas salaires et sont plus complaisants en matière de normes du travail et de l’environnement. Ces traités très favorables aux transnationales et défavorables aux pays et aux citoyens commencent à être contestés non seulement par les Wallons, mais aussi par d’autres pays et depuis longtemps dénoncés par les mouvements de la société civile et les altermondialistes.
Est-ce que Trump pourra tenir ses promesses, en particulier les plus controversées? Comme tout politicien de la « démocratie » représentative qui ne nous représente plus, qu’il en est devenu, il en laissera de côté plusieurs. Le « mur de la peur » avec le Mexique est déjà en bonne partie construit. Pour le compléter, il lui faudra forcer quelques États à le faire. Le Mexique ne payera pas, si jamais il est complété. Quant au refus d’accueillir les immigrants et réfugiés musulmans, il a déjà tempéré ses propos en ouvrant la possibilité des contrôles très serrés à la place de la fermeture totale. Par rapport aux traités de libre-échange, en particulier l’ALÉNA, le Canada et le Mexique sont ouverts à le renégocier. Quant à se retirer de l’ALÉNA, le nouveau président peut utiliser l’article 2205 du traité pour le faire, quoique les experts sont divisés sur le pouvoir du président d’agir sans accord du Sénat.
Cependant, le plus important c’est que l’ « aberrante » élection de Trump permet de réaliser qu’elle n’est pas si aberrante que l’on nous présente les médias si l’on tient compte, d’une part, la vie réelle d’exclusion des Étasuniens. Leur pouvoir d’achat réel stagne, car il ne suit pas la croissance de la richesse et de la productivité (+100%) depuis trente-sept ans! D’autre part, concomitant à cette grave situation, la démocratie représentative est en crise, non seulement aux États-Unis, et des signes inquiétants se manifestent depuis des années de la façon suivante : très basse participation (moyenne de 53,42% depuis 36 ans. 52,9% en 2016); le vote majoritaire direct n’est pas la base des élections présidentielles aux États-Unis, ce qui permet de devenir président à un candidat qui a eu moins de votes comme c’est le cas de Trump qui a récolté près de 650000 votes de moins que madame Clinton. Mais le plus grave c’est que la « démocratie » représentative est devenue sa négation même en étant de fait « le gouvernement des riches, pour les riches et par les riches. » Est-ce que Trump, un milliardaire peut devenir le président du peuple américain majoritairement exclu dans une « démocratie » qui a perdu contact avec la réalité de ses citoyens et qui est au service de la bourgeoisie transnationale aux commandes de l’économie, de la politique et de la géopolitique du profit? Les problèmes des citoyens américains ne sont pas à la veille d’être résolus.
La crèche de Noël interdite à Nantes
Lettre de Jean-Pierre Santon au tribunal administratif de Nante
À l’occasion de Noël, une lettre d’un certain Jean-Pierre Santon, Français, au Tribunal administratif de Nantes qui a interdit l’installation d’une crèche dans un lieu public.
Cher Monsieur le Tribunal,
J’ai pris connaissance, il y a quelques jours, de votre décision d’interdire la crèche de Noël traditionnellement installée dans le hall du Conseil Général de la Vendée. Quelle mouche vous a donc piqué ?
Vous avez fait des études, je suppose. Peut-être savez-vous donc que Noël vient du latin « natalis » qui veut dire naissance. Alors, je vais vous livrer un secret que vous voudrez bien transmettre à vos confrères, qui peut-être nagent avec complaisance dans la même ignorance que vous.
La naissance dont il est question est celle d’un certain Jésus de Nazareth, né il y a un peu plus de 2000 ans. Je dis ça, parce qu’étant donné que vous n’avez pas interdit les illuminations de Noël, je suppose que vous ignoriez ce détail. Voyez-vous, Noël n’est pas l’anniversaire de la naissance du Père Noël ( je suis désolé si je casse ici une croyance ancrée en vous ), mais bien celle de ce Jésus. Interdire une crèche sans interdire toute manifestation publique de cette fête est aussi stupide que si vous autorisiez la fête de l’andouillette, tout en interdisant la consommation d’andouillette, le jour de la fête de l’andouillette1.
La crèche, c’est ce qu’on appelle une tradition. Et ne me faites pas croire, Monsieur le Tribunal, que le principe de la tradition vous est étranger. Sinon comment expliquer que les magistrats exercent leur métier dans un costume aussi ridicule, si ce n’est parce qu’il est le fruit d’une tradition ? Vous êtes un briseur de rêves, Monsieur, vous êtes un étouffeur de sens. La crèche, c’est Noël et Noël, c’est la crèche.
La crèche, c’est aussi l’histoire d’une famille qui faute de droit opposable au logement est venue se réfugier dans une étable. C’est un signe d’espoir pour tous les sans-abri. La crèche, c’est aussi un roi arabe et un autre africain qui viennent visiter un Juif. C’est un signe d’espérance et de paix, en ces temps de choc de civilisations, de conflit au Moyen-Orient et de crainte de « l’ autre », attisée par des attentats horribles. La crèche, c’est aussi des éleveurs de moutons pauvres, criant de joie et chantant dans une nuit de décembre. Connaissez-vous beaucoup d’agriculteurs qui rigolent en cette période de crise? La crèche, c’est un bœuf, symbole de la condition laborieuse de l’homme. Enfin, la crèche, c’est un âne, même si une rumeur court disant que cet âne a quitté la crèche pour rejoindre le Tribunal administratif de Nantes et ne semble pas en être revenu. Malgré le fait que vous allez sans doute, par souci de cohérence, vous rendre à votre travail le 25 décembre, je vous prie de croire, Monsieur le Tribunal, à l’expression de mes souhaits de bon et joyeux Noël.
La transcendance par Jacques Grand’Maison
Réenchanter la vie, Fides, 2002, pp. 153-156.
La transcendance est un autre de ces vieux mots spirituels qui refont surface, comme la conscience, l’âme, le sacré (…) Il y a déjà dans la conscience humaine, dans la culture, une dynamique de distanciation, d’élévation. La modernité, dont on dit tant de mal, porte des ferments critiques qui ouvrent sur la transcendance et le dépassement. La sensibilité aux droits fondamentaux a quelque chose de cette ouverture. Un sens transcendant, une conquête de l’âme. Un respect sacré, un idéal de société, et non pas seulement une régulation juridique et sociale. Au meilleur d’elle-même, la Charte des droits tient d’une philosophie et d’une spiritualité de la dignité humaine et de sa transcendance.
Rappelons ici que le Dieu de la Bible et des évangiles dans sa révélation progressive a logé la sacré et la sainteté dans le respect radical de la personne humaine, et plus particulièrement de ceux ou celles qui ne peuvent mettre leur humanité dans la balance des rapports de force, d’intérêt, d’avoir et de pouvoir (…)
D’aucuns soit d’option laïque, soit religieuse, en font aussi un enjeu de société. Ils s’interrogent sur le monde occidental de plus en plus noyé, sinon engoncé dans son immanence, un peu comme les mégalopoles, ces immenses magmas de dimensions indéfinies, sans dehors ni dedans, d’une fluidité sans finalité. Une immanence sans mémoire de ses propres fondements historiques, de ses propres références fondatrices. Des esprits lucides s’inquiètent de la crise de la transmission et des ruptures à ce chapitre crucial de la compréhension de notre civilisation, de ses fondements judéo-chrétiens, gréco-romains, et, plus récemment, des idéaux du siècles des Lumières, par delà les travers idéologiques qui les ont transmis ou pervertis.
(…) Cet éveil à la transcendance interroge aussi une immanence sans horizon de sens du long terme, aussi bien en avant de nous qu’en arrière de nous. Un horizon autre qu’une croissance économique illimitée., illusoirement sacralisée en promesse de paradis terrestre. Comment s’étonner que la transcendance en son élan premier de rehaussement de la vie et du sens rebondisse dans l’âme contemporaine, d’abord sous un mode critique devant les nouveaux défis de la barbarie et de ravalement de la dignité humaine ? Sans compter une conscience plus vive des profondes inégalités de conditions de vie et de mercantilisation de tous les échanges humains, même les plus nobles et les plus fondamentaux, comme l’amour, l’éducation, la santé, l’adieu aux morts et quoi encore…
(…) La transcendance à l’œuvre dans la conscience est l’un des ressorts les plus décisifs de l’aventure humaine individuelle et collective, avec sa capacité de rebondissement aussi étonnante que mystérieuse. Mais ce n’est jamais une donnée qui va de soi. C’est le fruit d’une longue conquête, d’une conscience en prise sur ses profondeurs morales et spirituelles, d’une force d’âme cultivée, « culturée », comme en témoignent les grandes traditions spirituelles de l’humanité.
par Monique Toutant
Le temps des fêtes approchent à grand pas pour vous tous chers lecteurs et lectrice.
Comme décembre est le mois des préparatifs des fêtes, je suis sûre que vous être en train de préparer de succulents plats et desserts pour séduire vos convives et les rendre heureux.
Je sais aussi que vous préparez de grandes réjouissances afin de passer de beaux moments avec ceux et celles que vous aimez le plus au monde.
La période des fêtes n’est pas facile pour tout le monde. C’est un moment de l’année où l’on peut pardonner et prendre de nouvelles résolutions. Pour certains, ce moment est plus difficile. Ils ou elles n’ont pas accès à de la nourriture ou ne peuvent aller dans leur famille, car ils n’ont pas les moyens de se payer le voyage ni pour acheter de beaux cadeaux.
D’autres se retrouvent seules et sans famille le soir du réveillon. La nouvelle année approche et les temps deviennent de plus en plus difficiles pour tous et pour toutes. Je suis un peu nostalgique pendant la période des fêtes même si j’ai encore ma famille et qu’elle est loin de moi. Alors je viens ici vous souhaiter une année remplie de bonheur et de joie. Donner un baiser ou un gros câlin aux personnes que vous rencontrez pour leur donner un peu de bonheur. J’en envoie un à chacun d’entre vous qui lira ce mot XXXXXXXX.
Un recul majeur pour les droits des personnes assistées sociales
Québec, le 9 novembre2016. –Le gouvernement persiste et signe. Il lui aura finalement fallu un an pour imposer le projet de loi 70 à la société québécoise. Dorénavant, les personnes qui feront une première demande d’aide sociale devront répondre aux exigences du programme Objectif emploi, sans quoi leur prestation de base pourra être coupée d’un montant pouvant aller jusqu’à 224 $. Il s’agit d’un recul majeur pour les droits des personnes assistées sociales.
« Aujourd’hui, tout le Québec devrait avoir honte de ce gouvernement qui appauvrira des centaines, voire des milliers de prestataires, plaide Yann Tremblay-Marcotte, porte-parole de la Coalition Objectif Dignité. Nous le répétons depuis un an : 623 $ par mois, ça ne se coupe pas! 623 $ par mois, c’est déjà tellement insuffisant que ça ne permet même pas de couvrir la moitié des besoins de base. »
Rappelons que, pour faire adopter son odieux projet de loi 70, le gouvernement a dû mépriser les rappels à l’ordre de la Protectrice du citoyen, de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, de toutes les centrales syndicales québécoises, de 300 professeurEs et chargéEs de cours universitaires, du mouvement des femmes et du mouvement communautaire, en y incluant les groupes travaillant en employabilité.
L’autre porte-parole de la Coalition Objectif Dignité, Serge Petitclerc, ajoute que « le gouvernement a aussi dû ignorer les centaines d’organisations regroupées au sein de la Coalition Objectif Dignité, qui a talonné les ministres Sam Hamad puis François Blais pendant un an. En septembre dernier, la Coalition a même soumis une proposition de programme Objectif emploi alternatif au gouvernement pour lui offrir une porte de sortie. » Serge Petitclerc déplore que le ministre François Blais ait opposé une fin de non-recevoir à tous ces avis et ces appels au dialogue.
La suite des choses
Malgré la gravité du moment et la fermeture évidente du ministre, la Coalition Objectif Dignité fait le choix de continuer de regarder vers l’avenir et de lutter pour que le règlement visant la mise en application de la loi soit le moins cruel possible pour les personnes assistées sociales. Plusieurs « détails » restent à confirmer et les deux principaux sont sans contredit la possibilité de retenue du chèque et le montant des pénalités pour les personnes qui ne seront pas en mesure de participer de façon satisfaisante au programme Objectif emploi. Yann Tremblay-Marcotte le répète : « C’est indécent de retenir le seul revenu dont dispose une personne; c’est une atteinte grave aux droits humains. »
En plus de rester vigilante quant aux mesures réglementaires, la Coalition continuera de réclamer pour les personnes assistées sociales des services et des programmes mieux financés et mieux adaptés à leurs besoins, en plus d’une augmentation substantielle du montant de leurs prestations.
En terminant, Serge Petitclerc tient à souligner que le gouvernement québécois fait montre d’une arrogance inouïe en adoptant le projet de loi 70 le jour même où des centaines d’organismes communautaires en grève dénoncent leur sous-financement et les ravages de l’austérité sur les personnes les plus vulnérables de la société, y compris les personnes assistées sociales.
La Coalition Objectif Dignité réunit une vingtaine de regroupements nationaux et régionaux s’opposant aux récentes réformes à l’aide sociale et réclame des mesures volontaires et adaptées aux besoins des personnes ainsi qu’un rehaussement de la prestation. Plus de trois cents groupes appuient la Coalition et ses demandes.
Renseignements : Patrice Lemieux Breton, responsable des communications
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