Ça roule au CAPMO, avril 2023

La turlutte printanière

Le lundi 3 avril 2023, une immense satisfaction a envahi tous ceux et celles qui ont milité au sein du Collectif pour un transport abordable et accessible à Québec (TRAAQ). Cela fait du bien d’obtenir quelque chose de concret qui va aider la vie de nos concitoyens et concitoyennes.

Cette démarche a été initiée par les militants et militantes du Comité transport du CAPMO en février 2012. Bon, on ne savait pas alors dans quoi on s’embarquait, mais on a tenu bon. L’enquête conscientisante sur les coûts du transport en commun nous a occupés les trois premières années. Elle a permis de nous faire une idée et de rencontrer d’autres citoyen.ne.s désireux de travailler sur cette question. Ça a donné naissance au Collectif TRAAQ en 2017.

Bien sûr, tout cela n’aurait pas été possible sans le dévouement et l’implication d’Émilie Frémont-Cloutier, animatrice sociale du TRAAQ et salariée du CAPMO, de Monique Toutant, Ghislain Hudon, Renaud Blais, Éric Lapointe, Stuart Edward, Gérald Doré, Nicole Bouchard, Laurence Letarte, Johanne Pelletier, Robert Roussel, et de nombreux autres. Une mention spéciale à Catherine Rainville pour son idée de la feuille de route qui a permis de bien nous préparer aux séances de consultations avec le Réseau de Transport de la Capitale. Ce fut un outil précieux qui a démontré  notre sérieux.

Cette démarche, en plus de nous former à l’implication sur le long terme, a apporté une importante crédibilité à notre organisme. Une fois encore, nous avons su innover en nous attaquant à un problème qui était alors absent des préoccupations des décideurs.

C’est une histoire qui fait du bien  lorsqu’on la raconte. Elle démontre que le changement est possible quand on prend le temps de s’organiser pour faire valoir ses revendications et qu’on obtient l’écoute nécessaire. C’est cela qui est le plus long, mais il faut utiliser ce temps, pour rassembler les forces vives autour de soi et pour étayer son argumentaire en observant ce qui se fait ailleurs.

Dans ce domaine, c’est la ville de Calgary qui était en avance, tout comme celle de Kingston pour la gratuité du transport en commun pour les de moins de 18 ans. Une autre revendication que nous avons adoptée en assemblée générale du TRAAQ. Cette dernière mesure permet aux jeunes d’utiliser le transport en commun 12 mois par année, les soirs et les fins de semaine, ce qui, en plus d’augmenter la fréquentation du réseau de transport, retarde de plusieurs années l’achat d’une première voiture. Si bien que nombre d’entre eux n’hésitent pas à se payer une passe mensuelle lorsqu’ils atteignent l’âge de la majorité.

Alors, si vous êtes une personne seule qui gagne moins de 29 300$ par année, vous avez droit à la tarification sociale. Pour en bénéficier, remplissez un formulaire en ligne sur la page du RTC, puis imprimez-le, et inscrivez-vous au bureau d’arrondissement de La Cité-Limoilou ou de Ste-Foy. N’oubliez pas d’apporter une pièce d’identité avec photo et votre avis de cotisation du Ministère du Revenu. L’inscription peut aussi se faire par la poste.

Yves Carrier


 

Le lancement d’ÉquiMobilité applaudi par la communauté!

Communiqué de presse

Québec, le 3 avril 2023 – Des citoyennes, citoyens, des représentantes et représentants du milieu communautaire de Québec saluent l’initiative de la Ville de Québec d’implanter et d’administrer une mesure concrète d’accessibilité pour le transport en commun et adapté destinée aux personnes à plus faible revenu. Le milieu considère que la Ville démontre qu’elle se porte à l’écoute du plaidoyer porté par nombre d’organisations, de citoyens et de citoyennes concernant les besoins criants pour des tarifs plus abordables en transport en commun et adapté. Dans un contexte inflationniste et post-pandémique, cette mesure permettra d’alléger la charge budgétaire attribuée au transport.

« Grâce à ÉquiMobilité, ce sera 400$ de moins par année à dépenser pour nous déplacer. Pour nous, ce sera de l’argent libéré pour mieux se nourrir, pour se payer des loisirs. Cet  accès facilité au transport aura un impact positif sur notre vie sociale et notre implication citoyenne. » disent Monique Toutant, citoyenne utilisatrice du Réseau de transport de la Capitale (RTC), future adhérente d’EquiMobilité, membre du Collectif pour un transport abordable et accessible à Québec (TRAAQ) et Ghislain Hudon, citoyen utilisateur du Service de transport adapté de la Capitale (STAC) et du RTC, futur adhérent d’EquiMobilité, membre du TRAAQ.

Les groupes membres du comité conseil issus du milieu communautaire soulignent « La tarification sociale mise en place est une bonne première étape. Il reste encore des progrès à faire en termes d’accessibilité physique, financière et de littératie : ce sont les améliorations souhaitées que nous ferons valoir au courant des prochains mois de travail commun».

Un comité conseil qui permet de faire avancer les droits des usagères et usagers les plus vulnérables

Le milieu communautaire considère que sa participation au comité conseil a permis de mettre de l’avant les intérêts des usagers et usagères des transports collectifs et adaptés.

En effet, suite à l’annonce de cette mesure en juin 2022, la Ville a invité des membres du milieu communautaire, représentant des usagers et des usagères des transports collectifs et adaptés, à siéger sur un comité conseil. C’est notamment en partant d’une Feuille de route résultant du travail collectif mené par des citoyennes et des citoyens et par des organismes membres du Collectif pour un transport abordable et accessible à Québec (TRAAQ), que se sont appuyés les membres du comité afin de rendre la mesure la plus inclusive et simple possible pour les personnes admissibles.

C’est dans ce contexte que les améliorations suivantes ont été apportées:

L’admissibilité n’est plus jugée sur la base de la Mesure du panier de consommation (MPC) mais sur celle du Seuil de faible revenu (SFR);

La réduction de 33% de rabais applicable sur les abonnements mensuels est étendue aux billets unitaires;

L’admissibilité de facto de toutes les personnes inscrites au STAC;

La mise en place d’ÉquiMobilité plus tôt que prévu (mai au lieu de juillet);

Les parcours pour se prémunir d’ÉquiMobilité ont été testés par des groupes témoins.

Pour les groupes, il s’agit donc d’une première phase pour la tarification sociale à Québec. Ceux-ci comptent poursuivre avec la Ville les travaux du comité afin de veiller à sa bonification constante au cours des prochains mois, notamment en ce qui a trait à l’augmentation du pourcentage de rabais dans une perspective de gratuité.

« C’est satisfaisant que dans le cadre du comité conseil, nous soyons consultés pour notre expertise et non dans l’intention de nous déléguer la gestion du programme. Pour les personnes qui seront admissibles, il est significatif qu’EquiMobilité soit administrée par les services municipaux comme c’est le cas des autres titres. C’est pour elles une démonstration concrète que la ville a cette volonté de se dévouer aux citoyennes et aux citoyens avec équité, quel que soit leur revenu. » déclare Émilie Frémont-Cloutier, animatrice sociale pour le Collectif pour un transport abordable et accessible à Québec (TRAAQ).

« La Table de concertation des personnes aînées de la Capitale-nationale souhaite que la Ville de Québec poursuive la bonification pour 2024 et que les personnes aînées qui se qualifieront puissent en profiter et contrer l’isolement social pour une partie de cette clientèle. » ajoute Nicole Laveau, représentante de la Table de concertation des personnes aînées de la Capitale-nationale.

« C’est avec beaucoup de fierté que nous constatons le travail réalisé à la fois par la Ville et par les groupes communautaires pour faire aboutir cette  première mouture de tarification sociale, sur laquelle nous pourrons bâtir! Nous espérons fortement que cette initiative encourage les autres paliers gouvernementaux à contribuer pour rendre les transports collectifs plus abordables et inclusifs pour tous et toutes puisque c’est, après tout, une responsabilité partagée. » dit Marie-Soleil Gagné, directrice générale d’Accès transports viables .

« L’immense majorité des gens en transport adapté est à faible revenu ou à plus de 65 ans. Les admettre tous et toutes est donc une excellente nouvelle. Hâte que le gouvernement du Québec agisse, la mobilité durable ça urge aussi pour les tarifs. » ajoute Olivier Colomb-Deyrames, directeur général du Regroupement des organismes de personnes handicapées de la région 03  (ROP03)

« Le Service d’aide à l’adaptation des immigrantes et immigrants (S.A.A.I.) tient à souligner l’effort remarquable réalisé de concert par la Ville de Québec et le milieu communautaire pour la mise en œuvre d’ÉquiMobilité.  À notre sens, c’est la preuve concrète d’une écoute concernant l’accès à une tarification sociale pour les personnes immigrantes vulnérables et des efforts concrets pour rendre la ville accueillante et inclusive. » ajoute Aïcha Mansoor, Directrice générale du Service d’aide à l’adaptation des immigrants et immigrantes (SAAI).

Se sont également impliqués dans le comité conseil le Regroupement d’éducation populaire en action communautaire des régions de Québec et de Chaudières-Appalaches (REPAC), l’AGIR en santé mentale, le Regroupement pour l’Aide aux Itinérants et Itinérantes de Québec (RAIIQ) et le Regroupement Des Organismes Communautaires De La Région 03 (ROC-03).

Sources :

Emilie Frémont-Cloutier

Animatrice sociale

Collectif pour un transport abordable et accessible à Québec (TRAAQ)

418 525-6187 poste 222

transportscapmo@gmail.com

Angèle Pineau-Lemieux
Coordonnatrice aux affaires publiques et aux communications
Accès transports viables

438 495-9892
a.pineau-lemieux@transportsviables.org

 

Olivier Colomb-Deyrames

Directeur général

Regroupement des organismes de personnes handicapées de la région 03  (ROP03)

581 307-4241

oliviercde@rop03.com


 

Dans la rue, sur le chemin, au travail: le Québec c’est chez nous

Communiqué de presse

Québec, le 26 mars 2023 – Des centaines de personnes ont manifesté cet après-midi, à l’invitation de la Ligue des droits et libertés section Québec, du Collectif de lutte et d’action contre le racisme (CLAR), du Collectif 1629, du Centre des travailleurs et travailleuses immigrants (CTI), du Réseau d’Aide aux Travailleuses et Travailleurs Migrants Agricoles du Québec (RATTMAQ) et du Regroupement d’éducation populaire en action communautaire des régions de Québec et de Chaudière-Appalaches (RÉPAC 03-12) à l’occasion de la semaine d’actions contre le racisme. Trois revendications étaient mises de l’avant: que cessent les interpellations policières aléatoires, que les travailleurs-ses étrangers aient accès à des permis de travail ouverts et que le Canada accueille et assure la régularisation de toute personne au statut précaire habitant sur le territoire.

Pour la fin des interpellations policières aléatoires

Être chez soi, ça implique de pouvoir se déplacer librement. Or, chaque jour, des personnes racisées et/ou immigrantes sont interpellées et interceptées par les forces policières sans raison et sans motif. En découle un profilage racial qui expose les personnes racisées, notamment celles de la communauté afro-descendante, à un traitement différentiel et discriminatoire. En 2022, la Cour supérieure a interdit les interceptions aléatoires sur la route précisément parce qu’elles ouvraient la porte au profilage racial. Le gouvernement du Québec a décidé de contester le jugement et d’aller en appel. Dans la foulée des mobilisations internationales ayant suivi l’affaire George Floyd, un comité d’experts québécois a proposé de “modifier le cadre normatif en vigueur pour interdire explicitement les interpellations policières des piétons et des passagers de véhicules basées sur un motif discriminatoire partout au Québec”. Le gouvernement du Québec vient tout juste de prendre la balle au bond, mais a clairement décidé d’aller marquer dans le mauvais but puisque le nouveau projet assume la prétendue nécessité – jamais démontrée – des interpellations, cherche à tout prix une façon de maintenir la pratique et abandonne l’esprit de l’interdire.

En ce sens, le gouvernement du Québec fait exactement le contraire de ce qu’a fait le gouvernement de la Nouvelle-Écosse en 2019.

«On peut voir que le gouvernement Legault se préoccupe beaucoup des conditions dans lesquelles s’exercent le travail policier. Il serait intéressant de le voir se soucier autant des droits et libertés des citoyens et citoyennes», s’indigne Maxim Fortin de la Ligue des Droits et libertés section Québec.

Pour des permis de travail ouverts

Il est de plus en plus documenté que les permis de travail liés à un employeur donné (ou “fermés”) sont à la source de nombreux abus: violation des droits de la personne, violence psychologique ou sexuelle, mauvaises conditions de logement, frais de recrutement illégaux, traite de personnes à des fins d’exploitation, etc.

Depuis quelques années, les scandales dans les journaux se multiplient: Tomates Demers, Villa mon Domaine, Havana Club, Club-Med de Charlevoix, etc.  Au Centre des travailleurs & travailleuses immigrants (CTI) et au Réseau d’aide aux travailleurs & travailleuses migrants agricoles du Québec (RATTMAQ), nous constatons malheureusement que ces scandales ne sont que la pointe de l’iceberg. «Les permis de travail fermés constituent une forme d’immigration privée dans laquelle les employeurs paient pour faire venir des travailleurs et travailleuses. Une fois au pays, ces personnes ont une mobilité restreinte et dépendent de leur employeur pour leur possibilité d’immigrer au Canada et pour leur accès aux services. Lorsqu’ils et elles font face à des abus, les migrant·es se trouvent devant un choix déchirant. En ce que quitter l’employeur, aussi abusif soit-il, les met à risque de perdre leur statut et d’annuler les démarches d’immigration pour lesquelles ils et elles ont tant fait de sacrifices», dénonce Raphaël Laflamme du CTI.

Les maigres mesures de protection et les recours mis en place par le gouvernement fédéral n’ont pas suffi à freiner les abus. «Ces personnes ne demandent pas tout l’or du monde: elles demandent de pouvoir changer de job! Il ne devrait pas y avoir de controverse autour du fait que si on l’accueille au Canada, qu’elle travaille, qu’elle paye les mêmes taxes et impôts que tout le monde, que cette personne devrait avoir les mêmes droits que tout le monde! Il faut des permis de travail ouverts maintenant!» s’exclame Véronique Tessier du RATTMAQ.

Pour un accueil et une régularisation rapide des demandeurs-ses d’asile

On apprenait, pas plus tard que vendredi, que le gouvernement Trudeau fermait le chemin Roxham, un passage sécuritaire pour traverser la frontière Canada-États-Unis hors des postes frontaliers. Dans la même allocution, il annonçait aussi réduire le nombre de personnes demandeuses d’asile accueillies annuellement, passant de 90 000 à 15 000 faisant ainsi fi des conventions internationales que le Canada a signées protégeant le droit d’asile. Maintenant, ces personnes qui fuient vont devoir trouver d’autres points d’entrées, beaucoup moins sûrs, mettant en péril, une fois de plus, leur vie.

“On parle d’hommes, de femmes, d’enfants qui, dans l’espoir de trouver une meilleure vie, exempts de violence et de précarité, tentent de traverser au Canada. Et, depuis samedi, qu’est-ce qui les attend?

Arrestation, détention et déportation! Au-delà des chiffres, on parle de personnes! C’est scandaleux!” s’indigne Mario Gil du CLAR. En plus, une fois arrivées au Canada, les personnes demandeuses d’asile font face à la précarité notamment par le long délai d’attente (environ 24 mois) pour l’obtention d’un permis de travail. Certaines se retrouvent à vivre sans travail, avec une aide sociale insuffisante pour se trouver un loyer.  « En attente d’un permis de travail temporaire, certaines personnes sont poussées vers le travail au noir où elles sont payées sous le salaire minimum et ne sont pas encadrées par les lois du travail.

Ces conditions entraînent bien trop souvent des abus de la part des employeurs » affirme Bianca Alexandra Chamberland du CLAR. Ces personnes préfèrent se taire plutôt que de dénoncer ces abus à la police de crainte d’être expulsées du pays. Accélérer le traitement de dossier pourrait réellement faire une différence dans la vie de ces personnes.

Pour un Québec et un Canada accueillant

Bien que les sujets des prises de parole diffèrent, elles pointent toutes du doigts les discriminations que maintiennent les gouvernements canadien et québécois à l’égard d’une partie de la population et au non-respect de l’ensemble des droits humains inscrit dans les chartes. En plus de ces trois revendications phares, il faut dénoncer également l’entêtement du gouvernement caquiste à nier le racisme systémique et à ne pas adhérer au principe de Joyce ainsi que la lenteur du gouvernement Trudeau à doter les communautés autochtones d’accès à l’eau potable. Dénonçons aussi l’inaction de ces gouvernements à agir pour la protection de l’environnement qui touche plus durement les communautés autochtones et les populations des pays du Sud appauvries par les politiques colonialistes des pays occidentaux. C’est pourquoi, le 22 avril, Jour de la Terre, nous reprendrons la rue pour exiger une véritable justice climatique pour tous les peuples de notre planète.


 

Un Brésil à construire

par Leonardo Boff, 13 mars 2023

Quel Brésil voulons-nous ? Cette question est constante dans nos discussions, particulièrement pour les gens de la base qui endurent le poids du type de pays que nous avons, marqué par les immenses inégalités et saigné par le plus pervers gouvernant de notre histoire : Jair Bolsonaro.

Pour donner consistance au projet Brésil, il est important de travailler sur trois axes dialectiquement imbriqués : l’éducation libératrice, la démocratie intégrale et le développement socio-écologique.

En résumant, il est nécessaire de développer une éducation libératrice qui nous ouvre à une démocratie intégrale, capable de produire un type de développement socialement juste et écologiquement durable.

Nous partons du présupposé que la Terre n’a plus les capacités de supporter la déprédation produite par la voracité productiviste et consumériste de l’éthos capitaliste. Cet ordre dans le désordre perdure seulement parce qu’on emploie la force brute pour maintenir les masses dans un état de pénurie chronique. 18% de la population mondiale consomme de manière irresponsable 80% des ressources non renouvelables, sans aucun sens de solidarité générationnelle ni respect pour le patrimoine naturel de toutes les formes de vie.

À juste titre, Celso Furtado affirme : « Le défi qui est posé à l’aube du 21e siècle n’est rien de moins que de changer le cours de la civilisation, de déplacer en un court laps de temps son axe de la logique des moyens de production au service de l’accumulation du capital vers une logique des finalités en fonction du bien-être social, de l’exercice de la liberté et de la coopération entre les peuples. (Brasil : A construção interrompida, Paz e Terra, 1992. p.76).

Un nouveau paradigme de développement

Ce qui est postulé ici, c’est un changement de paradigme du développement, indispensable pour préserver la nature, sauver l’humanité et rendre possible un projet Brésil alternatif.

La Déclaration des Nations-Unies sur le droit des peuples au développement, du 18 octobre 1993, interprétait déjà cette nécessité en définissant le développement comme « un processus économique, social, culturel et politique englobant, qui vise l’amélioration constante du bien-être des populations et de chaque individu sur la base de sa participation active, libre et significative, et la juste distribution des bénéfices qui en résultent » (Declaration on the Right to Development, ECOSOC 18.10.1993). Nous ajouterions, dans un sens d’intégralité, la dimension psychologique et spirituelle.

Par conséquent, on postule que l’économie, comme production des biens matériels, est un moyen qui rend possible le développement social, culturel et spirituel de l’être humain. Est erronée et de funestes conséquences la vision qui comprend l’être humain uniquement comme un être de besoins et de désir d’accumulation illimitée, et pour cela, qui comprend l’économie comme une croissance illimitée, comme si l’homme n’était qu’un animal affamé et non pas un être créatif ayant soif de beauté, de communion et de spiritualité. Le Pape François dans l’encyclique Laudato Si, qualifie ce présupposé de mensonge. (n.106).

Il est nécessaire de produire et de consommer ce dont nous avons besoin pour vivre décemment, et non pas ce qui est superflu, excessif et abusif. Nous devons passer d’une économie de production illimitée à une économie multidimensionnelle de production du suffisant pour tous les êtres humains, et aussi pour tous les autres êtres de la communauté des vivants dont nous faisons partie. Le sujet central du développement n’est donc pas la marchandise, le marché, le capital, le secteur privé et l’État, mais l’être humain et les autres êtres vivants, comme le mentionnent les principaux documents écologiques.

Construction de la démocratie intégrale

Dans ce contexte se pose la question de la démocratie intégrale. D’abord comme valeur universelle devant être vécue dans tous les domaines où l’être humain se trouve avec d’autres êtres humains, dans les relations familiales, communautaires, productives et sociales.

Ensuite comme forme d’organisation politique. Ce serait le système qui garantit à tous et à chacun des citoyens et citoyennes la participation active et créative dans toutes les sphères du pouvoir et du savoir de la société. Cette démocratie serait par définition populaire (plus large que la démocratie bourgeoise libérale), solidaire (elle n’exclurait personne pour des raisons de genre, de race ou d’idéologie), respectueuse des différences (pluraliste et œcuménique), et socio-écologique, parce qu’elle inclurait aussi comme citoyens et sujets de droit l’environnement, les paysages, les rivières, les plantes et les animaux, en un mot, elle serait une démocratie véritablement entière.

Pour être un citoyen-sujet, trois processus sont nécessaires :

Premièrement, la capacité d’agir, c’est-à-dire la conquête du pouvoir pour devenir un sujet personnel et collectif dans tous les processus associés au développement personnel et collectif;

Deuxièmement, la coopération qui, au-delà de la compétition et de la compétitivité, moteur de la culture du capital, rend les citoyens protagonistes du bien commun;

Troisièmement, l’auto-éducation continue, pour exercer sa citoyenneté et concitoyenneté avec d’autres sujets. Comme l’affirme Hannah Arendt : « Quelqu’un peut traverser toute la vie sans s’auto-éduquer ».

Éducation de la praxis

Sur ce point, le développement centré sur l’être humain et la démocratie intégrale s’articule avec l’éducation intégrale comme processus pédagogique permanent, qui englobe tous les citoyens dans toutes les dimensions, et qui a pour objectif de les éduquer à l’exercice croissant du pouvoir, tant dans la sphère de sa subjectivité que dans celle de ses relations sociales. Sans cet exercice du pouvoir solidaire et coopératif, une démocratie intégrale ne pourra pas apparaître, ni un développement centré sur la personne et la nature qui, pour cela, est le seul véritablement durable.

Par conséquent, la pratique est la source originelle de l’apprentissage et de la connaissance humaine, puisque l’être humain est, par nature constitutive, un être pratique. Il n’a pas d’existence comme quelque chose d’achevé, mais plutôt comme quelque chose à réaliser, comme une tâche qui exige une pratique de construction permanente. Sans avoir aucun organe spécialisé, il doit continuellement se construire lui-même et construire son habitat au moyen de la pratique culturelle, sociale, technique et spirituelle. C’est ce qu’a souligné avec perspicacité l’économiste et éducateur populaire Marco Arruda, disciple de Paulo Freire, dans son livre Rendre le réel possible (Tornar o real possivel, Vozes 2003).

Il faut reconnaître que la connaissance par elle-même ne transforme pas la réalitéà elle seule; ce qui la transforme, c’est la conversion de la connaissance en action. Nous entendons par praxis exactement ce mouvement dialectique entre la conversion de la connaissance en action transformatrice et la conversion de l’action transformatrice en connaissance. Et cette double conversion transforme non seulement la réalité, mais également le sujet.

Ainsi, la praxis est le chemin de tous dans la construction de la conscience humaine et universelle. Elle est accessible à tous les êtres humains qui réalisent une pratique. Ainsi, pour apprendre, le travailleur manuel n’a pas besoin de mémoriser une quantité de contenus illimités.

L’essentiel, c’est qu’il apprenne à penser sa pratique individuelle et sociale, articulant le local avec le global et vice versa.

L’éducation de la praxis a pour objectif d’atteindre ces trois objectifs fondamentaux :

L’appropriation des instruments adéquats pour penser sa pratique individuelle.

L’appropriation de la connaissance scientifique, politique, culturelle et spirituelle, accumulée par l’humanité tout au long de l’histoire, pour lui garantir la satisfaction de ses besoins et réaliser ses aspirations.

L’appropriation des instruments d’évaluation critique de la connaissance accumulée, afin de les recycler et de les accroître par de nouvelles connaissances, qui incluent l’affectivité, l’intuition, la mémoire biologique et historique contenue dans le propre corps et dans la psyché, et les sens spirituels, comme ceux de l’éthique, de l’unité avec le Tout, de la beauté, de la transcendance et de l’amour.

Éducation : la plus grande révolution

Comme le répétait toujours Darcy Ribeiro, investir en éducation, c’est inaugurer la plus grande révolution qui pourra se réaliser dans l’histoire, la révolution de la conscience qui s’ouvre au monde, à sa complexité et aux défis d’aménagement qu’il nous présente. Investir dans l’éducation, c’est fonder l’autonomie d’un peuple et lui garantir les bases permanentes pour se refaire, malgré les crises qui menacent de le détruire ou de le déstructurer comme c’est le cas actuellement avec la dévastation qui a suivi l’ignoble gouvernement Bolsonaro.

Invertir dans l’éducation, c’est invertir dans la qualité de la vie sociale et spirituelle d’un peuple. Investir dans l’éducation, c’est s’assurer une plus grande productivité.

L’État brésilien n’a jamais fait la promotion de la révolution éducative. Il est l’otage historique des élites qui doivent maintenir le peuple dans l’ignorance et dans l’inculture, pour occulter la perversité de leur projet social qui ne sert qu’à reproduire leurs privilèges et à se maintenir au pouvoir.

Le projet Brésil, du Brésil qui est en train de se construire, fera de la révolution éducative son principal instrument, créant un espace pour que le peuple puisse exprimer sa grande capacité de création artistique et pratique, enfin, pour se réaliser comme bon lui semble.

Traduit de l’espagnol par Yves Carrier


 

Des nouvelles du CAPMO

 

Collectif TRAAQ

L’assemblée générale du Collectif TRAAQ s’est tenu le 23 mars avec une vingtaine de participant.e.s.

Le 3 avril, le Réseau de transport en commun de Québec, RTC, annonçait en conférence de presse les modalités d’inscription à la tarification sociale par son programme Équi-mobilité. La mesure entrera en vigueur à compter du 01 mai 2023.

 

Événement Romero 2023

En collaboration avec Développement et Paix et le Carrefour d’éducation à la solidarité internationale de Québec, le CAPMO a organisé une conférence de solidarité avec l’Amérique latine. 75 personnes étaient présentes pour accueillir Raquel Soto, militante écologique d’Antioquia en Colombie.

L’activité fut un véritable succès et un événement dont on va se souvenir longtemps.

Valentina Marin et Mario Gil Guzman assuraient la traduction.

Merci à Chantale Coulombe pour son rôle de maitre de cérémonie.

 

Journée de réflexion et de ressourcement

Autour du thème des mythes fondateurs de la Nouvelle-France

Kondiaronk, Marie-de-l’Incarnation et Samuel de Champlain

Vendredi le 7 avril  de 9 h à 15 h, au 2ème étage du 435 rue du Roi à Québec

 

Projet Solidarité intergénérationnelle

Le 25 mars dernier, dans le cadre de ce projet financé par la Caisse d’économie solidaire de Québec, nous avons participé  à une rencontre avec des autochtones organisée par l’organisme

Justice réparatrice. À l’invitation du CAPMO, une quinzaine d’immigrant.e.s se sont joints

à d’autres personnes pour participer à une activité interculturelle en compagnie de M. Réjent Siouï, membre de la nation wendate, sur un site traditionnel à Tewkesbury.

L’expérience a été fort enrichissante et les assistant.e.s en garderont un souvenir impérissable.

Merci à Lucie Painchaud pour cette belle initiative de rapprochement interculturelle.

 

Brunch du CAPMO

18 juin 2023 au Centre Mgr Marcoux à Québec de 9 h à midi.

 

 

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